Adoptée par la 60e Assemblée générale de l’AMM, New Delhi, Inde, Octobre 2009
et révisée par la 70e Assemblée Générale, Tbilissi, Géorgie, Octobre 2019

 

L’AMM réaffirme sa déclaration de Séoul sur l’autonomie professionnelle et l’indépendance clinique.

La profession médicale doit jouer un rôle central dans la régulation de la conduite et les activités professionnelles de ses membres et ainsi assurer que les pratiques professionnelles des médecins soient conformes à l’intérêt des citoyens.

La régulation de la profession médicale joue un rôle essentiel dans l’installation et le maintien de la confiance de la population dans les normes qui régissent les soins et la conduite qu’elle peut attendre des professionnels de la médecine. Cette régulation requiert une implication indépendante et très forte des professionnels.

Les médecins aspirent à la création ou au maintien de systèmes de régulation qui préserveront au mieux les normes les plus élevées en matière de soins pour tous les patients. Les médecins estiment que les modèles gérés par les médecins eux-mêmes peuvent fournir un environnement pour renforcera le droit du médecin de traiter ses patients sans interférence extérieure, sur la base de son seul jugement professionnel. Dans ces conditions, l’Association médicale mondiale demande à ses membres constituants et à tous les médecins de coopérer avec les organismes de régulation et de prendre les mesures qui s’imposent afin d’assurer que de tels systèmes efficaces soient en place. Ces mesures doivent être fondées sur les principes suivants :

  1. La société accorde aux médecins un degré élevé d’autonomie professionnelle et d’indépendance clinique, ce qui leur permet de faire des recommandations sur la base de leurs connaissances et de leur expérience, des données cliniques disponibles et de leur compréhension générale du patient, y compris de l’intérêt de ce dernier, sans influence extérieure inopportune ou abusive. Cet aspect est traité plus précisément dans la déclaration de Séoul de l’AMM.
  2. La régulation de la profession doit être proportionnée et doit avoir pour objectif de simplifier sans être pesante. Elle doit être fondée sur un modèle qui s’applique également à tous les médecins, qui protège les patients et qui se fonde sur un code d’éthique. La planification et la prestation de tous types de soins de santé sont fondées sur un modèle éthique et les connaissances médicales actuelles, qui régissent la pratique de tous les médecins. Ce modèle est un composant essentiel du professionnalisme et protège les patients. Les médecins sont les mieux placés qualifiés pour juger des actions de leurs pairs qui vont à l’encontre de ces normes, en gardant à l’esprit les circonstances locales qui peuvent être pertinentes.
  3. Il incombe aux médecins de s’associer étroitement à la régulation de la profession ou de l’assurer eux-mêmes. Les médecins doivent en dernier ressort participer au contrôle et à l’autorité de décision, du fait de leur formation médicale, de leurs connaissances, de leur expérience et de leurs compétences. Dans les pays où la régulation de la profession est assurée par les médecins eux-mêmes, ces derniers doivent assurer qu’elle inspire confiance à leurs concitoyens. Dans les pays où la régulation est mixte, les médecins doivent s’efforcer d’assurer qu’elle permet de maintenir la confiance de la population dans la profession.
  4. Les médecins de tous les pays sont priés d’instaurer et de préserver un système proportionné, reconnu, juste, légitime, rigoureux et transparent de régulation assurée par la profession et d’y participer activement. Ces systèmes sont conçus pour équilibrer les droits des médecins à exercer leur jugement professionnel librement par des obligations de sagesse et de mesure.
  5. Les associations médicales nationales doivent s’efforcer de promouvoir et de soutenir la notion de régulation efficace et éclairée parmi leurs membres et auprès du grand public. Pour éviter tout conflit d’intérêts éventuel qui pourrait naître de leur double rôle de représentation et de régulation, les médecins doivent assurer la séparation des deux processus et accorder une attention rigoureuse à la mise en œuvre d’un système juste et transparent dont l’honnêteté et l’indépendance ne puissent être mises en doute par le grand public.
  6. Tout système de régulation assurée par la profession elle-même doit promouvoir et garantir:
    • la prestation de soins sûrs et de haute qualité aux patients, dispensés par du personnel compétent;
    • la compétence des médecins qui assurent ces soins;
    • le comportement professionnel de tous les médecins, y compris sur le plan éthique;
    • la protection de la société et des droits du patient;
    • la promotion de l’adhésion et de la confiance des patients, de leur famille et du grand public;
    • l’assurance qualité du système de régulation;
    • le maintien de la confiance des patients et de la société dans son ensemble;
    • l’élaboration de solutions aux éventuels conflits d’intérêts;
    • un engagement à assumer des responsabilités professionnelles élargies.
  7. Afin de toujours assurer que les patients reçoivent des soins de qualité, les médecins devraient participer activement au processus de formation professionnelle continue, y compris d’analyse de leur pratique afin d’actualiser et de tenir à jour leurs connaissances et leurs compétences cliniques. Il incombe à leurs employeurs et à leurs supérieurs d’assurer que les médecins répondent à ces exigences.
  8. La conduite professionnelle des médecins doit toujours demeurer dans les limites du code d’éthique régissant la pratique des médecins dans chaque pays. Les associations médicales nationales doivent promouvoir une conduite professionnelle et éthique des médecins dans l’intérêt des patients. Les violations des règles éthiques doivent être rapidement reconnues, signalées aux autorités compétentes et corrigées. Les médecins doivent intervenir en temps utile pour assurer que leurs confrères ayant commis une faute ne mettent pas en danger leurs patients ou leurs collègues et reçoivent une assistance appropriée via un programme axé sur la santé des médecins ou une formation adaptée qui permettra leur exercice dans de bonnes conditions.
  9. L’autorité de régulation devrait, une fois la procédure judiciaire ou quasi judiciaire arrivée à son terme et si le médecin est reconnu coupable, publier les conclusions du tribunal et les éventuelles mesures de réparation adoptées. Les enseignements tirés de ces affaires devraient, dans la mesure du possible, inspirer la formation médicale. Le processus de régulation devrait assurer que de tels enseignements s’intègrent de manière cohérente à la formation.
  10. Les associations médicales nationales sont appelées à s’entraider dans le but de résoudre les problèmes, relever les défis nouveaux et ceux en voie d’apparition, y compris les éventuelles menaces sur la régulation assurée par la profession. L’échange continu d’informations et d’expérience entre les associations médicales nationales est fondamental pour le bien des patients.
  11. Quelles que soient les dispositions juridiques et règlementaires au niveau national, tout jugement sur le comportement ou les performances professionnelles d’un médecin doit tenir compte de l’avis de ses pairs, qui par leur formation et leur expérience comprennent la complexité des problèmes médicaux qui se posent.
  12. Il doit exister un système efficace et responsable de régulation qui ne saurait être complaisant ou avoir pour but de protéger la profession. Les associations médicales nationales devraient aider leurs membres à comprendre que l’autorégulation assurée par la profession, dans les pays où un tel système existe, doit garantir la sécurité et les droits à la santé de la population, susciter l’adhésion et la confiance du public en général et préserver l’honneur de la profession elle-même.

Adoptée par la 40e Assemblée Médicale Mondiale Vienne (Autriche), Septembre 1988,
révisée par la 57e Assemblée Générale de l’AMM, Pilanesberg, Afrique du Sud, Octobre 2006
et réaffirmée par la 203e Session du Conseil de l’AMM, Buenos Aires, Argentine, Avril 2016 

 

INTRODUCTION

  1. 1. L’exercice efficace de la médecine exige de plus en plus que les médecins et leurs associations professionnelles abordent les questions environnementales qui ont un lien avec l’état de santé des individus et des populations.
  2. Plus que jamais, en raison de la diminution des ressources naturelles, ces questions portent sur la qualité et la protection des ressources nécessaires à la sauvegarde de la santé et de la vie proprement dite. En termes concrets, les questions environnementales clés sont les suivantes :
    1. la dégradation de l’environnement qui doit être considérée comme une urgence à traiter afin que les ressources essentielles à la vie et à la santé – l’eau et l’air pur – demeurent accessibles à tous.
    2. La contamination continuelle de nos réserves d’eau pure par les hydrocarbures et les métaux lourds, tout comme la contamination de l’air ambiant et de l’air à l’intérieur par des agents toxiques qui ont de graves conséquences, notamment sur les classes les plus pauvres du globe. De plus, l’effet de serre avec son corollaire la hausse des températures doit guider nos débats et nous préparer aux conséquences toujours plus graves sur l’environnement et la santé publique.
    3. La nécessité de contrôler sans cesse l’utilisation des ressources non renouvelables telle que la couche arable (topsoil) tout comme l’importance de préserver cet héritage vital pour le transmettre aux générations futures.
    4. La nécessité de mobilier les ressources au-delà des frontières nationales et de coordonner des solutions globales pour la planète et établir ainsi une stratégie uniforme afin de faire face aux problèmes médicaux et économiques touchant le monde entier.
    5. L’objectif premier est de sensibiliser sans cesse à la nécessité de maintenir l’équilibre vital entre d’une part les ressources environnementales et d’autre part les éléments biologiques qui est essentiel pour la santé de tous partout dans le monde.
  3. Aujourd’hui, nous sommes davantage conscients mais nous n’avons pas su prévenir l’impact négatif et toujours plus nuisible de notre société sur l’environnement, comme par ex. la fonte des glaciers et la désertification croissante. Nous n’avons pas non plus stoppé la surexploitation des ressources naturelles qui entraîne entre autres la pollution des rivières et des mers, la pollution de l’air, la déforestation et la diminution de la terre arable. Dans ce contexte, la migration des populations des pays démunis ou en voie de développement, couplée à l’apparition de nouvelles maladies, exacerbe l’absence de politiques socio-économiques dans de nombreux endroits du monde. Sur un plan médical, la croissance de la population et la destruction irresponsable de l’environnement sont inacceptables et les organisations médicales du monde entier doivent redoubler d’efforts, non seulement pour parler de ces problèmes mais aussi pour suggérer des solutions.

PRINCIPES

  1. En tant qu’éléments de représentation des médecins, les associations médicales se doivent d’examiner ces questions environnementales. Elles ont le devoir de fournir des études analytiques incluant l’identification des problèmes et les législations internationales actuelles sur les questions environnementales, tout comme leur impact dans le domaine de la santé.
  2. Les médecins exercent dans un cadre éthique et déontologique et la législation sur l’environnement qu’ils défendent ne doit pas avoir pour objectif de limiter l’autonomie individuelle mais plutôt d’enrichir la qualité de vie de tous et de perpétuer toutes les formes de vie sur la planète.
  3. L’AMM doit donc agir comme une plateforme internationale pour la recherche, l’éducation et la défense des intérêts afin de contribuer à préserver l’environnement et son potentiel en matière de santé.
  4. Ainsi, lorsque de nouvelles maladies ou syndromes liés à l’environnement sont identifiés, l’AMM doit aider à coordonner les débats scientifiques/médicaux sur les données disponibles et sur leurs implications pour la santé humaine. Elle doit favoriser un mode de pensée consensuel au sein de la médecine et encourager les mesures préventives, la précision des diagnostics et des traitements de ces désordres qui apparaissent.
  5. L’AMM doit donc établir un cadre pour la coordination internationale des associations médicales, des ONG, des chercheurs cliniciens, des organisations de santé internationales, des décideurs et des mécènes dans leur travail d’étude sur l’impact sanitaire des problèmes environnementaux, sur leur prévention, sur leur résolution ainsi que sur le traitement des individus et des communautés.

Adoptée par la 43e Assemblée Médicale Mondiale Malte, Novembre 1991,
et révisée sur le plan rédactionnel par la 44e Assemblée Médicale Mondiale, Marbella, Espagne, Novembre 1992,
et révisée par la 57e Assemblée Générale de l’AMM, Pilanesberg, Afrique du Sud, Octobre 2006
et par la 68ème Assemblée générale, Chicago, Etats-Unis, Octobre 2017

 

PRÉAMBULE

1.      Les grèves de la faim se déroulent dans différents contextes mais la plupart du temps elles posent un dilemme là où les personnes sont détenues (prisons, établissements pénitentiaires, centres de rétention d’immigrés). Elles traduisent généralement une protestation de personnes qui n’ont pas d’autre manière de faire connaître leurs revendications. En refusant de s’alimenter sur une longue période, ces détenus peuvent espérer atteindre certains objectifs tout en donnant une mauvaise image des autorités. Le fait de refuser toute alimentation à court terme ou de simuler un tel refus soulève rarement des problèmes éthiques. Un jeûne prolongé peut entraîner la mort ou des dommages irréversibles. Face aux grévistes de la faim, les médecins peuvent se trouver dans un conflit de valeurs. Les grévistes de la faim souhaitent rarement mourir mais certains peuvent s’y préparer pour atteindre leurs objectifs.

2.      Les médecins ont besoin de connaître la véritable intention d’une personne, notamment lors d’une grève collective ou dans des situations ou la pression des pairs peut l’influencer. Il peut être émotionnellement difficile d’assister des grévistes de la faim qui ont manifestement donné des instructions précises pour ne pas être soignés et qui atteignent un stade où ils perdent leurs capacités cognitives. Le principe de bienfaisance pousse les médecins à les réanimer mais le respect de l’autonomie empêche les médecins d’intervenir lorsque les grévistes de la faim s’y sont opposés en toute connaissance de cause. Cette question a été travaillée dans le cadre d’autres situations cliniques, y compris des cas de refus d’un traitement vital. D’autres problèmes se posent dans les établissements pénitentiaires car on ne sait jamais précisément si les instructions données par le gréviste de la faim reposent sur sa propre volonté et sa pleine connaissance des conséquences ultérieures.

PRINCIPES

3.      Devoir d’agir conformément à l’éthique. Tous les médecins ont un devoir éthique dans leurs relations professionnelles avec des personnes vulnérables, même lorsqu’il ne leur est pas demandé de les traiter. Quel que soit leur rôle, les médecins doivent tenter d’éviter toute coercition ou mauvais traitement des détenus et protester si de tels actes se produisaient.

4.      Respect de l’autonomie. Les médecins doivent respecter l’autonomie des personnes, qui peut être difficile à évaluer car le souhait véritable du gréviste de la faim peut ne pas être aussi clair que les apparences le laissent penser. Une décision n’a aucune valeur morale si elle est prise sous la menace, la pression des pairs ou la coercition. Les grévistes de la faim ne doivent pas être contraints à subir un traitement qu’ils refusent. Préconiser ou procéder à l’alimentation forcée en dépit d’un refus volontaire et éclairé n’est pas justifiable. L’alimentation artificielle du gréviste avec son consentement explicite ou nécessairement implicite est acceptable d’un point de vue éthique.

5.      « Bienfaits » et « nuisances ». Les médecins doivent mettre leurs compétences et connaissances au service de ceux qu’ils traitent. Il s’agit du concept de « bienfaisance » qui complété par celui de « malfaisance » ou Primum non nocere. Ces deux concepts doivent être en équilibre. Le « bienfait » implique de respecter les souhaits de la personne et de favoriser son bien-être. Prévenir la « nuisance » signifie non seulement limiter les dégâts sur la santé mais aussi ne pas contraindre à un traitement des personnes capables et ne pas les forcer à mettre fin à leur jeûne. Les bienfaits ne signifient pas prolonger à tout prix la vie, sans égard pour d’autres déterminants.

Les médecins doivent respecter l’autonomie des personnes capables, même lorsqu’il est prévisible que leur comportement leur nuira. La perte d’autonomie ne signifie pas qu’un refus éclairé de traitement, y compris l’alimentation forcée, exprimé antérieurement, puisse être ignoré.

6.      Équilibrer les loyautés contradictoires. Les médecins qui assistent les grévistes de la faim peuvent vivre un conflit entre leur loyauté vis-à-vis des autorités qui les emploient (telles que les autorités pénitentiaires) et leur loyauté vis-à-vis des patients. Dans cette situation, les médecins confrontés à un conflit de loyauté sont liés par les mêmes principes éthiques que les autres médecins, à savoir que leur obligation première les engage envers leur patient. Les médecins demeurent indépendants de leur employeur en ce qui a trait à leurs décisions médicales.

7.      Indépendance médicale. Les médecins doivent demeurer objectifs dans leur évaluation et ne pas permettre à des tiers d’influencer leur jugement médical. Ils ne doivent pas se laisser convaincre de violer leurs principes éthiques, comme accepter d’intervenir pour des raisons non médicales.

8.      Confidentialité. Le devoir de confidentialité est important pour instaurer la confiance sans pour autant être impératif. Il peut ne pas être rempli si la non divulgation d’informations fait courir aux autres un danger grave et imminent. Comme avec d’autres patients, la confidentialité des échanges avec des grévistes de la faim doit être respectée à moins que ceux-ci n’acceptent la communication des informations ou que le partage des informations ne soit nécessaire pour prévenir un danger grave. Si les personnes acceptent la communication de renseignements, leurs familles et les conseillers juridiques doivent être tenus informés de la situation.

9.      Établir la confiance. Établir un lien de confiance entre médecins et grévistes de la faim est souvent la clé pour résoudre la situation en respectant les droits de ces derniers et en limitant les conséquences de leur grève sur leur santé. La confiance peut créer des possibilités de résoudre des situations difficiles. La confiance dépend de l’aptitude des médecins à donner de bons conseils et à se montrer francs à l’égard des grévistes de la faim au sujet des limites de ce qu’ils peuvent faire, y compris dans les situations dans lesquelles les médecins ne pourront pas préserver la confidentialité.

10.    Les médecins doivent évaluer les capacités mentales des personnes qui souhaitent entamer une grève de la faim. Cela suppose de vérifier que les personnes qui souhaitent jeûner ne présentent pas de troubles mentaux qui pourraient les empêcher de prendre des décisions éclairées au sujet de leur santé. Les personnes dont les capacités mentales sont gravement compromises pourraient ne pas être à même d’évaluer les conséquences de leurs actes si elles entamaient une grève de la faim. Les personnes dont les troubles mentaux sont curables devraient être aiguillées vers les soins nécessaires et recevoir un traitement adapté. Les personnes dont les troubles sont incurables, y compris une grave incapacité à apprendre ou une démence avancée doivent recevoir un traitement et un appui qui leur permette de prendre des décisions compatibles avec leurs aptitudes.

11.    Dès que possible, les médecins doivent obtenir un historique médical détaillé de la personne qui prévoit de jeûner. Les implications médicales de toute pathologie existante doivent être expliquées à la personne. Les médecins doivent s’assurer que les grévistes de la faim comprennent les conséquences possibles du jeûne sur leur santé et les prévenir en langage clair des inconvénients. Les médecins doivent également expliquer comment réduire ou différer les risques pour leur santé, par exemple en absorbant davantage de liquide et de vitamine B1 (thiamine). La personne pouvant changer d’avis au sujet de sa grève de la faim, il est essentiel d’assurer qu’elle est bien informée des conséquences médicales d’un jeûne. Conformément aux bonnes pratiques relatives au consentement dans les soins de santé, le médecin doit s’assurer que le patient comprend bien les informations qui lui sont données en les lui faisant répéter.

12.    Il convient de pratiquer un examen approfondi du gréviste de la faim au début de son jeûne et notamment de le peser. Il convient également de discuter de la gestion de futurs symptômes, y compris ceux qui ne sont pas liés au jeûne. De même, le médecin doit prendre note des valeurs et des souhaits concernant le traitement médical en cas de jeûne prolongé. Si le gréviste de la faim y consent, un examen médical devrait être pratiqué régulièrement afin de décider des traitements nécessaires. L’environnement physique doit être évalué pour élaborer des recommandations visant à prévenir les effets négatifs.

13.    Il est essentiel de maintenir la communication entre le médecin et les grévistes de la faim. Les médecins devraient vérifier quotidiennement si les individus souhaitent poursuivre leur grève de la faim et les interroger sur ce qu’ils souhaitent voir fait lorsqu’ils ne seront plus en mesure de communiquer d’une manière compréhensible. Le médecin doit s’efforcer d’identifier si la personne souhaite, si ses demandes ne sont pas satisfaites, continuer le jeûne jusqu’à sa mort. Ces indications doivent être consignées de manière adéquate.

14.    Parfois, les grévistes de la faim acceptent une transfusion de solution saline ou d’autres formes de traitement médical. Un refus d’accepter certaines interventions ne doit pas nuire à d’autres formes de soins, comme le traitement d’une infection ou de douleurs.

15.    Les médecins doivent s’entretenir en privé avec les grévistes de la faim et sans être entendus des autres, y compris des autres détenus. Il est essentiel d’entretenir une communication claire et au besoin on peut faire appel à des interprètes sans lien de dépendance avec les autorités compétentes, qui seront eux aussi tenus de préserver la confidentialité des échanges.

16.    Les médecins ont besoin d’être certains que le refus de nourriture ou de traitement est le propre choix de la personne. Les grévistes de la faim doivent être à l’abri de toute contrainte. Les médecins peuvent souvent y contribuer et doivent savoir que la coercition peut être exercée par des pairs, des autorités ou d’autres personnes telles que les membres de la famille. Les médecins et les autres soignants ne sauraient faire pression sur les grévistes de la faim pour les faire interrompre leur grève. Les traitements et soins ne sauraient être conditionnés à l’arrêt de leur grève de la faim. Toute restriction ou pression telle que la pose de menottes, l’isolement, le fait d’attacher le gréviste à son lit ou toute autre sorte de contrainte physique sanctionnant la grève de la faim est intolérable.

17.    Si un médecin est incapable pour des raisons de conscience d’accepter le refus de traitement ou d’alimentation artificielle d’un gréviste de la faim, il doit le faire savoir clairement et assurer que le gréviste de la faim est orienté vers un autre médecin qui cautionnera son refus.

18.    Lorsqu’un médecin prend en charge le gréviste de la faim, ce dernier peut déjà avoir perdu ses facultés mentales et être dans l’impossibilité d’exprimer clairement ses souhaits concernant une intervention médicale visant à lui sauver la vie. Il convient d’examiner et de respecter les instructions données à l’avance par le gréviste de la faim. Les refus préalables de traitement doivent être respectés s’ils reflètent la volonté de la personne lorsqu’elle était apte à l’indiquer. Dans les lieux de privation de liberté, l’éventualité que les instructions anticipées aient été données sous la contrainte doit être envisagée. Lorsque les médecins ont de sérieux doutes sur les intentions de la personne, ses instructions doivent être prises en compte avec la plus grande prudence. Si ces instructions sont éclairées et volontaires en revanche, elles ne peuvent généralement être ignorées que parce que l’évolution de la situation les a rendues caduques après que la personne a perdu ses facultés.

19.    S’il est impossible de discuter avec la personne, qu’elle n’a pas donné d’instructions à l’avance et qu’aucun indice ne figure dans son dossier médical, les médecins doivent agir selon ce qu’ils considèrent être l’intérêt de la personne. Cela signifie tenir compte des souhaits exprimés précédemment par le gréviste de la faim, de ses valeurs personnelles et culturelles et de son état de santé. En l’absence de toute preuve de la volonté de la personne en grève, les médecins doivent décider, sans être influencés par des tiers, de l’opportunité d’alimenter ou non la personne.

20.    Dans certains cas rares et exceptionnels, les médecins peuvent ignorer les instructions préalables de refus de traitement, par exemple s’ils pensent que ce refus a été obtenu par contrainte. Si après réanimation et récupération de ses facultés mentales le gréviste de la faim réitère son intention de jeûner, sa décision doit être respectée. Il est conforme à l’éthique de laisser un gréviste de la faim déterminé mourir avec dignité plutôt que de le soumettre à des interventions répétées contre sa volonté. Les médecins qui interviennent en dépit d’un refus préalable de traitement doivent se préparer à répondre de leurs actes devant les autorités compétentes, y compris les autorités professionnelles.

21.    L’alimentation artificielle peut se justifier sur le plan éthique si le gréviste de la faim l’accepte en son âme et conscience. Cependant, conformément à la déclaration de Tokyo de l’AMM, si un prisonnier refuse toute nourriture tout en étant considéré par les médecins comme capable d’exprimer un jugement rationnel et non altéré sur les conséquences de sa décision, il ne doit pas être nourri de manière artificielle. L’alimentation artificielle peut être acceptée si des personnes incapables n’ont pas laissé d’instructions opposées à l’alimentation, afin de préserver leur vie ou pour éviter de graves séquelles irréversibles. L’hydratation rectale ne saurait être utilisée comme thérapie pour la ré-hydratation ou le soutien nutritionnel de patients en période de jeûne.

22.    Lorsqu’un patient est physiquement capable de commencer à se nourrir oralement, toutes les précautions doivent être prises pour assurer la mise en œuvre des lignes directrices les plus récentes au sujet de la ré-alimentation.

23.    Tous les types d’intervention visant l’alimentation entérale et parentérale d’un gréviste qui dispose de ses facultés mentales contre sa volonté sont considérés comme de l’alimentation forcée. L’alimentation forcée est toujours contraire à l’éthique. Même dans un but charitable, l’alimentation accompagnée de menaces, de coercition, de l’usage de la force ou de la contrainte physique sont une forme de traitement inhumain et dégradant. Tout aussi inacceptable est l’alimentation forcée de certains détenus afin d’intimider ou de contraindre d’autres grévistes de la faim de mettre fin à leur jeûne.

RÔLES DES ASSOCIATIONS MÉDICALES NATIONALES ET DE L’AMM

24.    Les associations médicales nationales (AMN) devraient organiser et fournir des programmes éducatifs mettant en valeur les dimensions éthiques des grèves de la faim, des approches, des traitements et des interventions médicaux appropriés Elles devraient s’efforcer de renforcer les compétences et les connaissances des médecins.

Les AMN doivent travailler à proposer des mécanismes d’appui aux médecins travaillant dans les prisons, les établissements pénitentiaires et les centres de rétention des immigrés, qui peuvent se trouver en situation de conflit de loyauté et, comme il est précisé dans la déclaration d’Hambourg de l’AMM, doivent soutenir les médecins qui subissent des pressions pour transiger sur leurs principes.

Il incombe aux AMN de s’efforcer d’empêcher les pratiques contraires à l’éthique, de prendre position, d’enquêter sur les violations des principes éthiques et de les dénoncer.

25.    L’Association médicale mondiale soutiendra les médecins et les AMN qui sont confrontés à des pressions politiques parce qu’ils défendent une position éthiquement fondée, comme elle le proclame dans sa déclaration d’Hambourg.

Portuguais

 

Adoptée par la 42e Assemblée Médicale Mondiale Rancho Mirage, Californie, États-Unis, Octobre 1990
et révisée par la 57e Assemblée Générale de l’AMM, Pilanesberg, Afrique du Sud, Octobre 2006
et par la 67e Assemblée générale de l’AMM, Taipei, Taiwan, Octobre 2016

 

Les accidents constituent la principale cause de décès et d’invalidité chez les enfants et les jeunes adultes. Ils détruisent la santé, les moyens de subsistance et la vie de millions de personnes chaque année. Les accidents sont dus entre autres à des actes de violence commis contre soi-même ou sur les autres, aux accidents de la route, aux intoxications, aux noyades et aux brûlures.  Il est cependant possible de prévenir de nombreux accidents. Le contrôle des accidents doit être reconnu comme une priorité de santé publique demandant une coordination entre les services de transport sanitaire et les centres de services sociaux dans chaque pays. Afin d’assurer le succès de tels programmes de contrôle des accidents, la participation des médecins et un leadership via la médecine, l’éducation et la sensibilisation s’avèrent nécessaires.

Comme le dit l’Association Médicale Mondiale dans Blessures et Violence:  Les faits, le degré d’accidents est loin d’être identique partout dans le monde. En effet, 90% des morts par accident se produisent dans pays à faibles et moyens revenus. Au sein des pays, le degree varie aussi en fonction de la classe sociale.  Les pauvres sont confrontés à une existence et à des conditions de vie plus dangereuses que les mieux lotis. Par exemple, les immeubles dans les communautés plus pauvres ont tendance à être plus anciens et en demande de reparation. Les communautés pauvres sont également affectées par des taux d’homicide plus élevés. Qui plus est, les personnes vivant dans la pauvreté ont aussi moins accès  à des soins d’urgence de qualité et à des services de reeducation. Il faut accorder advantage d’attention à ces  causes profondes d’accidents.

L’Association Médicale Mondiale exhorte les Associations Médicales Nationales à coopérer avec les agences publiques et privées correspondantes afin de développer et de mettre en oeuvre des programmes de contrôle pour prévenir et traiter les accidents. Ces programmes doivent également tenter d’améliorer le traitement médical et la rééducation des patients accidentés. Il faut accroître la recherche et l’éducation sur le contrôle des accidents et la coopération internationale est une composante vitale et nécessaire pour la réussite de ces programmes.

Les Associations Médicales Nationales devraient  recommander l’intégration des éléments de base suivants dans les programmes nationaux:

EPIDEMIOLOGIE

Pour de tels programmes, il faut au départ acquérir davantage de données qui serviront de base aux priorités de base, aux interventions et à la recherche. Un système efficace de surveillance des accidents devrait  être établi dans chaque pays pour recueillir et intégrer les informations. Les hôpitaux et les agences sanitaires devraient   instaurer un système complet et précis pour codifier les accidents. La gravité  des accidents devrait être codifiée de manière uniforme partout dans le monde.

PREVENTION

La prévention des accidents nécessite une éducation et une formation pour éduquer et persuader les gens de changer leur comportement afin de réduire les risques d’accidents. Les lois et les règlementations reposant sur des méthodes scientifiquement avalisées de prévention des accidents peuvent s’avérer judicieuses pour modifier les comportements (par ex. l’utilisation de ceintures de sécurité et de casques de protection). Ces lois doivent à leur  tour être strictes.  Un système de surveillance efficace comme indiqué précédemment contribuera à définir comment cibler d’autres tentatives de prévention. La plannification urbaine et de la circulation devraient assurer aux résidents un environment sécurisé.

BIOMECANIQUE

Une meilleure compréhension de  la biomécanique des accidents et des invalidités pourrait contribuer au développement de meilleures normes de sécurité et réglementations sur les produits et leur conception.

TRAITEMENT

Pour  améliorer la prise en charge de l’accident là où il a lieu, il faudrait  un système de communication efficace entre les premiers intervenants et les professionnels de santé dans les hôpitaux afin de faciliter la prise de décision.    Il faudrait  assurer un transport à l’hôpital rapide et sûr. Une équipe de traumatologues devrait  être disponible à l’hôpital. Des équipements et des fournitures adaptés devraient aussi petre disponibles pour soigner les accidentés, y compris l’accès immédiat à une banque du sang. L’éducation et la formation des traumatologues doivent être encouragées afin d’assurer à tous moments la mise en œuvre de techniques parfaites par un nombre approprié de médecins.

REEDUCATION

Les victimes de traumatismes nécessitent des soins continus axés non seulement sur la survie mais aussi sur l’identification et la préservation de leurs fonctions résiduelles. Il faut effectuer une rééducation visant  à rétablir les fonctions biologiques, psychologiques et sociales afin de  permettre aux personnes accidentées d’avoir un maximum d’autonomie personnelle et un mode de vie indépendant. Lorsqu’elle est possible, l’intégration dans la communauté est un objectif souhaitable  pour les personnes handicapées par un accident. La rééducation peut aussi nécessiter des changements dans l’environnement physique et social du patient.

Adoptée par la 40e Assemblée Médicale Mondiale Vienne (Autriche), Septembre 1988
révisée par la 57e Assemblée Générale de l’AMM, Pilanesberg, Afrique du Sud, Octobre 2006
et par la 68e Assemblée générale de l’AMM, Chicago, Etats-Unis, Octobre 2017

 

PRÉAMBULE

1.      La santé n’est pas simplement l’absence de maladie. Elle est également un état d’épanouissement physique, psychologique et social et englobe la capacité des individus à s’adapter à l’adversité physique, sociale et mentale. La santé dépend de nombreux facteurs, notamment l’accès aux soins de santé, et les déterminants sociaux de la santé (DSS). Recouvrer la santé relève aussi de plusieurs facteurs. Il incombe à la société de mettre à la disposition de tous ses membres, indépendamment de leur capacité de les payer, des soins de santé de qualité.

2.      Les professionnels de santé doivent régulièrement analyser les effets du faible accès à des soins sur les inégalités en matière de santé et il leur incombe de partager les résultats de leurs travaux avec les gouvernements au niveau local, régional et national pour assurer que ces derniers comprennent les déterminants sociaux de la santé et intègrent dans toutes leurs politiques la réduction des facteurs d’inégalités dans le domaine de la santé. Les politiques relatives aux soins de santé devraient comporter des pistes pour éliminer les inégalités en la matière.

3.      L’accès aux soins de santé est important pour réduire les conséquences à court, moyen et long terme des problèmes de santé dus à des conditions sociales difficiles. L’accès lui-même est pluridimensionnel et dépend de facteurs comme les ressources humaines, la formation, les finances, les transports, la disponibilité géographique, la liberté de choix, l’éducation de la population, l’assurance qualité et la technologie, dans le secteur de la santé.

LIGNES DIRECTRICES

Professionnels de santé

4.      La prestation de soins de santé dépend largement de la disponibilité de professionnels de santé compétents. Leur formation doit leur apporter des compétences médicosociales et insister notamment sur la manière dont les déterminants sociaux de la santé influent sur l’état de santé des personnes.

Comme le montre la démographie de la plupart des pays, la population vieillissante constitue un énorme de défi pour les années à venir. Or le personnel soignant est inégalement réparti au niveau mondial. Alors que tous les pays forment des professionnels de santé, les déplacements de population des pays les plus pauvres vers les pays les plus développés conduisent à des pénuries permanentes. L’élaboration de codes de recrutement éthiques pourrait aider à limiter les pratiques injustes des États. Ces codes de recrutement éthiques devraient également s’imposer aux agences commerciales de recrutement.

5.      Il convient d’étudier comment combiner au mieux les différents professionnels de santé dans des environnements cliniques variés pour répondre aux besoins des patients. La mauvaise répartition à l’intérieur des pays devrait être combattue en incitant les professionnels de santé à travailler dans les zones rurales, isolées ou mal desservies, au moins pendant une partie de leur carrière. Il conviendrait d’explorer des pistes innovantes pour rendre attractifs les postes dans des régions mal desservies, sans utiliser de méthodes de recrutement punitives ou coercitives. Le recrutement d’étudiants venant de déserts médicaux et exprimant le désir de s’installer dans leur région d’origine pourrait contribuer à résoudre ce problème.

Formation

6.      La formation initiale des professionnels de santé doit être adaptée, accessible et de bonne qualité. La formation du personnel de santé est donc coûteuse, et ce coût est supporté par le pays d’origine du médecin. Les soignants doivent ensuite aller plus loin pour se former davantage ou se spécialiser et également pour mieux gagner leur vie, parfois pour envoyer de l’argent chez eux pour soutenir leur famille et leur communauté.

7.      Le souhait de se perfectionner est légitime et les efforts pour retenir les professionnels de santé dans leur région d’origine devraient encourager leur retour au pays par l’utilisation de nouvelles compétences et connaissances visant à améliorer l’accès aux soins de santé.

8.      Les États ne devraient pas recruter activement les médecins d’autres pays. Même lorsqu’ils le font de manière passive, ce recrutement devrait répondre à des normes éthiques et à la Prise de position de l’AMM sur les directices éthiques pour le recrutement des médecins au niveau international.

Finances

9.      L’accès aux soins est essentiel pour toute la population. Les méthodes de financement des soins sont à la discrétion de chaque pays et dépendent de leurs ressources, de leurs priorités sanitaires et sociales et des besoins de santé. Les pays doivent mettre au point des systèmes fiscaux qui réduisent les paiements directs des patients et les assurances de santé privées qui accroissent les inégalités entre les groupes de population.

10.    Aucun système de financement n’étant idéal pour tous les pays, l’équilibre convenable doit être décidé au niveau local. Lorsqu’ils prennent les décisions relatives aux systèmes de financement, les gouvernements doivent être conscients que les soins médicaux sont essentiels, de la nécessité absolue que ces soins soient à la portée de tous, qu’ils soient fondés sur les besoins médicaux et non sur la capacité de payer et qu’ils ne sauraient dépendre d’inquiétudes financières. L’éligibilité aux soins ne signifie pas l’accès, notamment si des systèmes de co-paiement excluent les personnes les plus démunies.

11.    Il convient de recourir à des méthodes innovantes pour assurer des soins de santé complets, telles que des partenariats avec des prestataires privés et des entités commerciales, qui pourraient assurer des éléments de soins spécialisés. Les États doivent néanmoins assurer que cette politique, qui ne doit pas être considérée comme une préférence pour un système de soins privé ne limite pas les soins spécialisés à la frange la plus riche de la population.

12.    Les décisions de limiter l’accès à des éléments des soins de santé doivent être prises en fonction d’informations objectives, des données scientifiques les plus fiables relatives à l’efficacité et à la sécurité des services de soins de santé. Il convient que ces décisions fassent l’objet d’un débat public et que les concepts associés à ces politiques soient acceptés par la population. Aucune mesure ne saurait être introduite avec l’effet de discriminer une population vulnérable ou âgée.

13.    La population devrait avoir accès à des informations claires au sujet des ressources mises à leur disposition en matière de soins de santé et de la manière d’en bénéficier. Il convient de créer des processus précis pour assurer que la pauvreté ou l’illettrisme ne soient pas des obstacles à l’accès aux soins.

Personnes vulnérables et difficiles à atteindre

14.    Dans tous les pays il est difficile de faire parvenir des messages de santé à certains groupes de personnes. Ce sont des personnes qui ont souvent recours tardivement aux soins de santé lorsqu’ils sont malades.

15.    Il convient d’utiliser des méthodes variées, notamment des méthodes visant à rassurer et à éliminer les obstacles d’autre nature, pour assurer que les personnes difficiles à atteindre sont conscientes qu’elles peuvent bénéficier de soins de santé sans frais directs, incluant des méthodes pour réduire la peur et les autres barrières à l’accès aux soins.

16.    Lorsque des vulnérabilités spécifiques comme l’illettrisme ou une déficience sensorielle semblent jouer un rôle, les solutions devraient comprendre l’identification de ces vulnérabilités et leur prise en compte.

17.    Les professionnels de santé ont le devoir d’assurer des soins exempts de toute forme de discrimination.

Transports

18.    Les établissements de santé devraient être faciles d’accès. Il peut être nécessaire de travailler avec les services de transport public pour assurer que des itinéraires de transports publics passent à côté des établissements de santé. Il conviendrait d’envisager de faire mieux desservir les établissements de soins par les transports publics. Les patients peuvent avoir à parcourir des distances considérables pour se faire soigner, notamment dans les zones rurales ou isolées.

19.    Il convient d’assurer le transport des patients qui doivent être orientés vers des spécialistes ou des soins secondaires. Les personnes qui ont besoin d’aide pour avoir accès aux soins de base devraient également être assistées. Il conviendrait d’offrir le transport aux patients vivant dans des zones isolées qui doivent être soignés dans des établissements qui se trouvent dans des grandes villes. La télémédecine pourrait remplacer adéquatement le transport des patients dans certains cas.

Disponibilité géographique

20.    Il pourrait être utile de travailler avec d’autres prestataires de soins, comme les sages-femmes traditionnelles, qui devraient être intégrées au système de soins de santé, recevoir une formation et être assistées pour prodiguer des soins sûrs et efficaces et aiguiller les patients vers d’autres professionnels si besoin. Cette mesure ne saurait s’étendre au financement par le système de santé public de pratiques non scientifiques, notamment les thérapies dites complémentaires ou alternatives.

Liberté de choix

21.    La liberté de choix en matière de prestataire de soins et de solutions proposées est essentielle dans tous les systèmes. Elle requiert la capacité de comprendre ce choix et la liberté de choisir un prestataire parmi plusieurs solutions différentes.

22.    Les obstacles à la liberté de choix peuvent être d’ordre financier ou provenir d’une incompréhension des différentes solutions ou de facteurs culturels ou géographiques, entre autres. Il est essentiel que les personnes puissent librement s’informer des solutions disponibles pour faire un choix éclairé.

23.    Les autorités de santé devraient veiller à ce que toutes les populations comprennent comment accéder aux soins et obtiennent des informations objectives sur les différents prestataires de soins.

24.    Une fois que les patients sont reçus par un prestataire ou un médecin, ils devraient pouvoir étudier les options médicales ; la disponibilité des informations est essentielle pour permettre le choix.

Éducation de la population

25.    L’éducation générale est un déterminant de la santé ; plus une personne est instruite, plus il est probable qu’elle soit en bonne santé. En cas de problèmes de santé, une éducation préalable peut être déterminante pour la vitesse à laquelle la personne ira se faire soigner. L’éducation aide aussi les personnes à faire des choix sur les solutions thérapeutiques auxquelles elles ont accès.

26.    Une éducation axée sur les questions de santé peut s’avérer importante pour prévoir son mode de vie. L’éducation seule ne suffit pas, par exemple à cesser de fumer ou de consommer des drogues ou de l’alcool, mais peut aider à prendre des décisions relatives aux comportements à risques.

27.    Un niveau général de connaissances en matière de santé aide les patients à choisir entre différentes options thérapeutiques et à se conformer aux prescriptions. Les soins personnels seront également améliorés tout comme la capacité du patient à s’orienter vers un service de santé.

28.    Il conviendrait de mettre en place des programmes éducatifs aidant les personnes à faire des choix éclairés sur leur santé personnelle et sur la bonne utilisation à la fois des soins personnels et des soins effectués par les professionnels. Ces programmes devraient comprendre des informations sur les coûts et bénéfices associés à d’autres traitements de médecine moderne, le recours à des services professionnels permettant une détection, un traitement ou une prévention précoces des maladies ; les responsabilités personnelles quant à la prévention des maladies, et l’utilisation efficace du système de soins. Les médecins devraient participer activement, le cas échéant, à ces efforts éducatifs et recevoir les ressources nécessaires pour prendre ces tâches en charge.

29.    L’éducation de la population aide également les gouvernements à mieux faire comprendre les mesures de santé publique comme les taxes sur le tabac, l’interdiction de consommation de certains produits par les humains et les restrictions en matière de liberté individuelle pour des raisons sanitaires. Lorsque les gouvernements décident de mesures législatives ou règlementaires, elles doivent être accompagnées d’une campagne d’information de la population pour que les mesures soient comprises et respectées.

Assurance qualité

30.    L’assurance qualité devrait faire partie de tous les systèmes de soins. Les médecins partagent la responsabilité d’assurer la qualité des soins de santé et ne doivent pas permettre que d’autres considérations mettent en péril la qualité des soins fournis.

Technologie

31.    La technologie joue un rôle de plus en plus important dans les services de santé. Les prix d’achat des biens en immobilisation sont élevés en raison du besoin de services logistiques spécifiques, avec des techniciens formés et la mise à disposition de locaux adéquats. Les technologies avancées ne sont pas disponibles partout ; leur accès doit être bien planifié afin que l’ensemble des patients dans le besoin en bénéficient, pas uniquement ceux proches des centres technologiques avancés.

Circonstances exceptionnelles

32.    Dans des circonstances exceptionnelles comme les conflits armés et les catastrophes naturelles majeures telles que les séismes, les médecins ont le devoir de veiller à ce que les décideurs politiques protègent l’accès aux soins, notamment pour les plus vulnérables et les moins capables de rejoindre les zones plus sûres.

RECOMMANDATIONS

33.    Les déterminants sociaux de la santé influent largement sur l’accès aux soins et donc sur la santé. Les médecins devraient travailler avec les gouvernements pour s’assurer que ces derniers agissent efficacement sur les DSS.

34.    L’accès aux soins requiert une vigilance systématique, pour assurer que les conditions appropriées soient remplies, notamment les suivantes.

34.1  Il convient que chacun dispose d’un système de santé adapté, universel, solidaire et équitable, comprenant des établissements bien équipés, disponibles dans tout un pays, qui assure aux centres de soins et aux soignants des financements suffisants et durables et dans lequel les personnes sont soignées selon leurs besoins et non leur capacité financière.

34.2  Le choix devrait inclure la facilité d’accès et les prestataires.

34.3  L’accès aux informations adéquates pour tous est capital pour choisir et coopérer avec les prestataires de soins.

34.4  L’éducation est à la fois un déterminant social et un facteur clé de l’adhésion au traitement qui favorise la responsabilité personnelle avec un soutien accessible.

34.5  Les professionnels de santé devraient pouvoir se déplacer librement dans le monde, notamment pour accéder aux possibilités de formation et d’exercice de leur profession. Cette mobilité ne doit pas entraver la disponibilité des ressources, notamment dans les pays à faibles moyens.

34.6  Il convient de fournir aux médecins des critères éthiques transparents et efficaces pour travailler dans des zones surpeuplées ou mal desservies.

34.7  La délivrance de soins nécessite une action des gouvernements à tous les niveaux, y compris le travail avec les populations afin d’assurer qu’elles comprennent l’intérêt de tels soins et puissent y avoir accès.

34.8  Les médecins ont un rôle important à jouer pour que la planification des soins soit logique sur le plan médical, soit communiquée correctement à la population concernée et que les patients ne soient pas mis en danger en raison de ressources inadéquates, ou d’une planification ou d’un système défaillants.

34.9  Les médecins sont conscients du système de santé existant, ce qui les oblige à jouer un rôle socialement responsable et à être conscients des déterminants sociaux de la santé qui conditionnent l’accès à leurs services ou à ceux de leur association médicale.

34.10   Les associations médicales devraient coopérer avec leurs membres pour promouvoir l’accès aux systèmes de santé répondant équitablement aux besoins des populations.

Adoptée par la 29e Assemblée Médicale Mondiale Tokyo (Japon), Octobre 1975
et révisée par la 170e Session du Conseil, Divonne-les-Bains, France, Mai 2005
par la 173e Session du Conseil, Divonne-les-Bains, France, Mai 2006
et la 67e Assemblée générale de l’AMM, Taipei, Taiwan, Octobre 2016

 

PREAMBULE

Le médecin a le privilège d’exercer son art pour servir l’humanité. Il doit conserver et rétablir la santé physique et mentale pour tous, sans discrimination, consoler et soulager ses patients. Le médecin doit garder le respect absolu de la vie humaine dès la conception, même sous la menace et ne devra pas faire usage de ses connaissances médicales contre les lois de l’humanité.

Dans cette Déclaration, la torture est définie comme les souffrances physiques ou mentales infligées à un certain degré, délibérément, systématiquement ou sans motif apparent, par une ou plusieurs personnes agissant de leur propre chef ou sous l’ordre d’une autorité pour obtenir par la force des informations, une confession ou pour toute autre raison.

DECLARATION

  1. Le médecin ne devra jamais assister, participer ou admettre les actes de torture ou autres formes de traitements cruels, inhumains ou dégradants, quels que soient la faute commise, l’accusation, les croyances ou les motifs de la victime, dans toutes situations, ainsi qu’en cas de conflit civil ou armé.
  2. Le médecin ne devra jamais fournir les locaux, instruments, substances, ou faire état de ses connaissances pour faciliter l’emploi de la torture ou autre procédé cruel, inhumain ou dégradant ou affaiblir la résistance de la victime à ces traitements.
  3. Dans le cadre de l’assistance médicale qu’ils fournissent aux détenus ou aux prisonniers qui sont ou pourraient ultérieurement être soumis à des interrogatoires, les médecins doivent tout particulièrement veiller à la confidentialité de toutes les informations médicales personnelles. Toute infraction à la Convention de Genève doit être systématiquement signalée par le médecin aux autorités compétentes.
  4. Comme l’indique la Résolution de l’AMM sur la responsabilité des médecins dans la documentation et la dénonciation des actes de torture ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants et en tant qu’exception à la confidentialité professionnelle, les médecins ont l’obligation éthique de signaler les abus, si possible avec le consentement du sujet, mais dans certaines circonstances lorsque la victime est dans l’incapacité de s’exprimer librement, sans consentement explicite.
  5.  Dans toute la mesure du possible, le médecin ne devra pas utiliser ni permettre que soient utilisées ses connaissances ou compétences médicales ou des informations de santé spécifiques aux personnes, pour faciliter ou sinon contribuer à un interrogatoire, légal ou illégal, de ces personnes.
  6. Le médecin ne devra jamais être présent lorsque le détenu est menacé ou soumis à la torture ou à toute autre forme de traitement cruel, inhumain ou dégradant.
  7. Le médecin doit avoir une indépendance clinique totale pour décider des soins à donner à une personne placée sous sa responsabilité médicale. Le rôle fondamental du médecin est de soulager les souffrances de ses semblables et aucun motif d’ordre personnel collectif ou politique ne pourra prévaloir contre ce noble objectif.
  8. Lorsqu’un prisonnier refuse toute nourriture et que le médecin estime que celui-ci est en état de formuler un jugement conscient et rationnel quant aux conséquences qu’entraînerait son refus de se nourrir, il ne devra pas être alimenté artificiellement, tel que le stipule la Déclaration de Malte de l’AMM sur les grévistes de la faim. La décision en ce qui concerne la capacité du prisonnier à exprimer un tel jugement devra être confirmée par au moins un deuxième médecin indépendant. Le médecin devra expliquer au prisonnier les conséquences que sa décision de ne pas se nourrir pourraient avoir sur sa santé.
  9. Rappelant la Déclaration d’Hambourg concernant le soutien des médecins refusant de participer ou de fermer les yeux sur  l’usage de la torture ou d’autres formes de traitement cruel, inhumain ou dégradant,  L’Association Médicale Mondiale soutient et encourage la communauté internationale, les Associations Médicales Nationales et tous les médecins à soutenir le médecin et sa famille qui feraient l’objet de représailles ou menaces pour avoir refusé d’accepter que des moyens de torture ou autres formes de traitements cruels, inhumains ou dégradants soient employés.
  10. L’Association Médicale Mondiale lance un appel aux Associations Médicales Nationales pour encourager les médecins à poursuivre leur formation professionnelle et leur éducation sur les droits humains.

Adoptée par la 41e Assemblée Médicale Mondiale Hong Kong, Septembre 1989,
révisée par la 126e Session du Conseil Jérusalem, Israël, Mai 1990
et par la 170e Session du Conseil, Divonne-les-Bains, France, Mai 2005,

réaffirmée par la 200ème Session du Conseil, Oslo, Norvège, Avril 2015,
et, avec des révisions mineures, par le 227ème Conseil de l’AMM, Helsinki, Finlande, octobre 2024

 

PRÉAMBULE

Les personnes âgées peuvent souffrir de problèmes pathologiques comme les troubles moteurs et psychiques et les difficultés d’orientation. Il résulte de ces problèmes que les personnes âgées peuvent avoir besoin d’une assistance dans leurs activités quotidiennes qui les place en état de dépendance. Une telle situation peut alors amener la famille et la collectivité à les considérer comme une charge et en conséquence à réduire les soins et les services dont ils bénéficient ou à ne pas les assurer.

Les mauvais traitements ou la négligence vis-à-vis des personnes âgées peuvent se manifester de multiples manières, sur le plan physique, psychologique, émotionnel, financier et/ou matériel et médical. Les mauvais traitements envers les personnes âgées donnant lieu à de multiples définitions, il est difficile de comparer les conclusions sur la nature et les causes du problème. Un certain nombre d’hypothèses préliminaires ont été proposées concernant l’étiologie des mauvais traitements des personnes âgées, dont notamment: la dépendance envers autrui en matière de prestation de services ; le manque de liens familiaux étroits ; la violence dans la famille ; le manque de ressources financières ; la psychopathologie de l’auteur de mauvais traitements ; le manque de protection sociale ; et les facteurs institutionnels tels que les bas salaires et les mauvaises conditions de travail qui contribuent au mécontentement des soignants.

Les mauvais traitements des personnes âgées est un fait de plus en plus reconnu par les institutions médicales et les organismes sociaux. La première étape en faveur de la prévention des mauvais traitements et de l’isolement des personnes âgées consiste à élargir la conscience et la connaissance des médecins et autres professionnels de santé. Une fois identifiées les familles et les personnes à haut risque, les médecins peuvent participer à une prévention élémentaire en signalant les mauvais traitements au centre de service social ou communautaire approprié. Ils peuvent également aider et informer directement les patients et leur famille sur les situations à haut risque. Simultanément, les médecins devraient faire faire preuve d’attention et de sensibilité pour conserver la confiance du patient et sa vie privée, notamment dans le cas de patients compétents.

Par conséquent, l’Association médicale mondiale adopte les principes suivants concernant les mauvais traitements envers les personnes âgées.

Principes généraux

  1. Les personnes âgées ont les mêmes droits aux soins, au bien-être et au respect que les autres êtres humains.
  2. Les médecins ont la responsabilité de veiller à prévenir toutes les formes de mauvais traitements des personnes âgées.
  3. Les médecins, appelés par l’aîné directement, par la maison de retraite ou de soins, ou par la famille, veillent à ce que le patient reçoive les meilleurs soins possibles.
  4. Les médecins qui, selon les termes de la présente déclaration, constatent ou suspectent des mauvais traitements, devront discuter de la situation avec les responsables, qu’il s’agisse de la maison de retraite ou de la famille. S’ils constatent un cas de mauvais traitements ou s’ils considèrent un décès comme suspect, ils en informent les autorités compétentes.
  5. Afin de garantir la protection des personnes âgées dans leur environnement, il ne doit pas y avoir de restriction quant au droit de choisir librement son médecin. Les associations médicales devraient faire tout leur possible pour s’assurer que ce libre choix est garanti dans le système médico-social.
  6. L’Association médicale mondiale formule également les recommandations suivantes pour les médecins traitant des personnes âgées et invite ses membres constituants à faire connaître la présente déclaration à leurs membres et au public.

 

RECOMMANDATIONS

Les médecins traitant des personnes âgées devraient :

  1. tenter encore davantage d’établir un climat de confiance avec leurs patients afin de les encourager à se faire soigner lorsque cela est nécessaire et à se sentir à l’aise dans leur relation avec le médecin ;
  2. examiner et traiter les blessures par suite de mauvais traitements et/ou de négligences ;
  3. essayer d’établir ou de maintenir un lien thérapeutique avec la famille (le médecin est souvent le seul professionnel qui maintienne des relations à long terme avec le patient et la famille) tout en préservant dans toute la mesure du possible la vie privée du patient ;
  4. signaler tous les cas suspects de mauvais traitements et/ou de négligences de personnes âgées conformément à la législation locale ;
  5. faire appel, quand cela est possible, à une équipe multidisciplinaire de responsables issus des professions médicales, sociales, psychiatriques et juridiques ;
  6. encourager le développement et l’utilisation de ressources communautaires de soutien dispensant des soins à domicile, assurant une trêve des soins et réduisant les tensions pour les familles à haut risque.

 

Adoptée par la 34e Assemblée Médicale Mondiale Lisbonne, Portugal, Septembre/Octobre 1981
amendée par la 47e Assemblée générale, Bali, Indonésie, Septembre 1995
révisée par la 171e Session du Conseil, Santiago, Chili, Octobre 2005
et réaffirmée par la 200e Session du Conseil de l’AMM, Oslo, Norvège, Avril 2015 

 

PREAMBULE

La relation médecin-patient-société a ces derniers temps connu des changements importants. Si le médecin doit continuer à agir selon sa conscience et dans le meilleur intérêt du patient, il devra également faire son possible pour garantir autonomie et justice au patient. La déclaration suivante présente quelques-uns des droits de principes du patient que la profession médicale approuve et soutient. Les médecins et autres personnes ou organismes concernés par la prestation des soins de santé ont la responsabilité conjointe de reconnaître et de défendre ces droits. Lorsqu’une législation, une mesure gouvernementale, une administration ou une institution prive les patients de ces droits, les médecins doivent rechercher les moyens appropriés de les garantir ou de les recouvrer.

PRINCIPES

  1. Le droit à des soins médicaux de qualité
    1. Toute personne a le droit de recevoir, sans aucune discrimination, des soins médicaux appropriés.
    2. Le patient a le droit d’être traité par un médecin dont il sait qu’il peut porter un jugement clinique et éthique sans pression extérieure.
    3. Le patient sera toujours traité dans le respect de son meilleur intérêt. L’application du traitement sera conforme aux principes médicaux généralement approuvés.
    4. La garantie de la qualité doit toujours faire partie intégrante des soins de santé. Les médecins, en particulier, devraient accepter la responsabilité d’être les dépositaires de cette qualité.
    5. Lorsque les circonstances demandent de sélectionner des patients potentiels pour un traitement dont la prestation est limitée, ces patients ont droit à ce que la procédure de sélection utilisée soit régulière. Ce choix doit se faire sur la base de critères médicaux et sans discrimination.
    6. Le patient a droit à un suivi des soins. Le médecin a l’obligation de coopérer à la coordination des prescriptions médicales avec les autres pourvoyeurs de santé traitant le patient. Le médecin ne doit pas interrompre le traitement du patient, tant qu’il existe une prescription médicale qui demande de le poursuivre, sans lui donner l’assistance et les informations nécessaires qui lui permettent d’envisager d’autres soins.
  2. Le droit à la liberté de choix
    1. Le patient a le droit de choisir et de changer librement de médecin, d’hôpital ou d’établissement de soins de santé, sans se préoccuper de savoir s’ils appartiennent au secteur public ou au secteur privé.
    2. Le patient a le droit de demander à tout moment l’avis d’un autre médecin.
  3. Le droit de décision
    1. Le patient a le droit de prendre librement des décisions le concernant. Le médecin l’informera des conséquences de ses décisions.
    2. Tout adulte compétent a le droit de donner ou de refuser de donner son consentement à une méthode diagnostique ou thérapeutique. Il a droit à l’information nécessaire pour prendre ses décisions. Il doit pouvoir clairement comprendre l’objet d’un examen ou d’un traitement, les effets de leurs résultats et les conséquences d’un refus de consentement.
    3. Le patient a le droit de refuser de participer à la recherche ou l’enseignement de la médecine.
  4. Le patient inconscient
    1. Si le patient est inconscient ou incapable d’exprimer sa volonté, le consentement éclairé doit être obtenu d’un représentant légal.
    2. Si en l’absence du représentant légal, il y a nécessité urgente d’intervention médicale, le consentement du patient sera présumé, à moins que sur la base d’une conviction ou ferme déclaration préalable, il ne soit évident et indéniable qu’il aurait, dans pareil cas, refusé l’intervention.
    3. Cependant, les médecins doivent toujours essayer de sauver la vie du patient inconscient à la suite d’une tentative de suicide.
  5. Le patient légalement incapable
    1. Si le patient n’a pas encore atteint l’âge de la majorité ou s’il est légalement incapable, il est nécessaire d’avoir le consentement du représentant légal dans certaines juridictions. Néanmoins, le patient devra, dans toute la mesure du possible, prendre part aux décisions.
    2. Lorsque le patient légalement incapable peut prendre des décisions rationnelles, celles-ci doivent être respectées, et il a le droit d’empêcher la révélation d’informations à son représentant légal.
    3. Lorsque le représentant légal ou la personne autorisée par le patient refuse un traitement qui, de l’avis du médecin, s’avère être dans le meilleur intérêt du patient, le médecin devrait contester cette décision devant une institution légale ou autre appropriée. En cas d’urgence, le médecin agira dans le meilleur intérêt du patient.
  6. L’emploi de méthodes contraires à la volonté du patient
    Les méthodes de diagnostic ou de traitement contraires à la volonté du patient ne peuvent être employées qu’à titre exceptionnel, si elles sont expressément autorisées par la loi et si elles sont conformes aux principes d’éthique médicale.
  7. Le droit à l’information
    1. Le patient a le droit de recevoir l’information le concernant contenue dans le dossier médical et d’être pleinement informé sur son état de santé, y compris des données médicales se rapportant à son état. Cependant, les informations confidentielles concernant un tiers ne seront pas révélées sans le consentement de ce dernier.
    2. Exceptionnellement, l’information pourra ne pas être communiquée au patient lorsqu’il y a de bonnes raisons de croire qu’elle constitue un danger pour sa vie ou sa santé.
    3. L’information doit être donnée de manière à respecter la culture du patient et à être comprise par le patient.
    4. Le patient a, sur sa demande expresse, le droit de ne pas être informé, à moins que la protection de la vie d’une autre personne ne l’exige.
    5. Le patient a, le cas échéant, le droit de choisir la personne qui devra être informée sur son sujet.
  8. Le droit au secret professionnel
    1. Toute information identifiable concernant l’état de santé, les circonstances médicales, le diagnostic, le pronostic, le traitement du patient et toute autre information le concernant en propre, doit rester confidentielle, même après sa mort. Exceptionnellement, les descendants peuvent avoir un droit d’accès aux informations susceptibles de révéler les risques qu’ils encourent pour leur santé.
    2. L’information confidentielle ne peut être divulguée qu’à la condition expresse que le patient en donne le consentement ou qu’à condition que la loi l’autorise expressément. Elle ne peut être divulguée aux autres pourvoyeurs de santé que sur la base du « besoin de savoir » à moins que la patient n’en donne son consentement explicite.
    3. Toutes les données identifiables concernant le patient doivent être protégées. Cette protection doit correspondre à leur forme de stockage. Les substances humaines à partir desquelles ces données sont identifiables doivent être également protégées.
  9. Le droit à l’information sur l’éducation de la santé
    Toute personne a droit à une éducation sanitaire lui permettant de prendre une décision éclairée sur sa santé et les services de santé disponibles. Cet enseignement devra notamment apporter des informations sur les différents modes de vie saine et sur les moyens de prévention et de dépistage précoce des maladies. La responsabilité de chacun envers sa santé devra aussi être soulignée. Les médecins ont l’obligation de prendre part aux actions éducatives.
  10. Le droit à la dignité
    1. La dignité et le droit à la vie privée du patient, en matière de soins comme d’enseignement, seront à tout moment respectés.
    2. Le patient a droit à ce que le mode d’apaisement de ses souffrances soit conforme à l’état actuel des connaissances.
    3. Le patient en phase terminale a le droit d’être traité avec humanité et de recevoir toute l’aide disponible pour que sa mort soit aussi digne et confortable que possible.
  11. Le droit à l’assistance religieuse
    Le patient a le droit de recevoir ou de refuser une aide spirituelle et morale, y compris celle d’un ministre représentant la religion de son choix.

Portuguais

Adoptée par la 164ème Session du Conseil de l’AMM à Divonne les Bains, France, mai 2003 et adoptée par la 70ème Assemblée Générale, Tbilissi, Georgie, octobre 2019

 

Si valeurs éthiques et principes juridiques sont étroitement liés, les devoirs éthiques l’emportent par définition sur les obligations juridiques. Il peut arriver que la loi prescrive une conduite contraire à l’éthique. Le fait que le médecin respecte la loi ne prouve pas nécessairement la valeur éthique de son comportement.

Lorsque la loi contredit l’éthique médicale, le médecin doit s’efforcer de faire modifier la loi. En pareil cas, les devoirs éthiques priment les obligations légales.

Adoptée par la 39e Assemblée Générale de l’AMM, Madrid, Espagne, Octobre 1987
et réaffirmée par la 170e Session du Conseil, Divonne-les-Bains, France, Mai 2005
et réaffirmée par la 200e Session du Conseil de l’AMM, Oslo, Norvège, Avril 2015
et supprimée par la 70e Assemblée générale de l’AMM, Tbilissi, Géorgie, Octobre 2019
*Ce document a été remplacé et totalement remanié par la « Déclaration sur l’euthanasie et le suicide médicalement assisté » (2019)

L’euthanasie, c’est-à-dire mettre fin à la vie d’un patient par un acte délibéré, même à sa demande ou à celle de ses proches, est contraire à l’éthique. Cela n’interdit pas au médecin de respecter la volonté du patient de laisser le processus naturel de la mort suivre son cours dans la phase terminale de la maladie.

Adoptée par la 53ème Assemblée générale de l’AMM, Washington 2002
modifications de formes apportées lors de la 164ème session du Conseil de mai 2003
réaffirmée par la 191ème session du Conseil, Prague, République Tchèque, avril 2012
révisée par la 74ème Assemblée générale de l’AMM, Kigali, Rwanda, octobre 2023

 

PREAMBULE

Les progrès rapides de la microbiologie, de la biologie moléculaire et du génie génétique ont créé des possibilités extraordinaires pour la recherche biomédicale et promettent des améliorations importantes de la santé humaine et de la qualité de vie. Toutefois, la prolifération de ces technologies donne aussi la possibilité de créer de nouveaux pathogènes, de nouvelles maladies, tout en simplifiant les méthodes de production d’armes biologiques. Les technologies nécessaires sont relativement bon marché et comme les outils de production sont similaires à ceux utilisés dans les laboratoires comme pour la fabrication de vaccins, elles sont faciles à obtenir. La possibilité de produire et de disperser efficacement des armes biologiques existe donc partout dans le monde, menaçant les gouvernements et mettant en danger les populations de la planète.

Les conséquences d’une attaque biologique seraient à la fois insidieuses et dévastatrices. Elles pourraient se poursuivre par la transmission secondaire et tertiaire de l’agent pathogène des semaines, des mois ou des années après l’épidémie initiale. Compte tenu de la facilité de déplacement et de la mondialisation toujours plus poussée des échanges, une flambée quelque part dans le monde pourrait menacer l’ensemble des pays. De nombreuses maladies aiguës graves survenant sur une courte période pourraient submerger les capacités des systèmes de santé mondiaux.

Les médecins et les autres personnels de santé, qui sont aux avant-postes de la lutte contre les souffrances humaines causées par des épidémies, seraient les premiers responsables de la prise en charge des victimes d’armes biologiques.

Les acteurs de la recherche biomédicale ont l’obligation morale et éthique d’envisager les implications de toute utilisation malveillante de leurs conclusions. La modification génétique délibérée ou involontaire de microorganismes pourrait créer des organismes plus virulents, résistants aux antibiotiques ou très stables dans l’environnement. La modification génétique de micro-organismes pourrait altérer leur immunogénicité, leur permettant ainsi d’échapper à l’immunité naturelle ou augmentée par un vaccin. Les progrès du génie génétique et des thérapies géniques peuvent permettre de modifier le système immunitaire de la population cible pour accroître ou réduire la sensibilité à un pathogène ou perturber le fonctionnement normal des gènes de l’hôte.

La lutte contre la prolifération et les mesures de maîtrise de l’armement peuvent réduire mais elles ne peuvent éliminer totalement la menace des armes biologiques. Il y a donc un besoin de créer et d’adhérer à un éthos mondialement accepté qui rejette la mise au point, la production, la possession et l’utilisation d’armes biologiques. La collaboration internationale est essentielle à l’obtention d’un tel consensus universel.

La Convention des Nations unies sur l’interdiction des armes biologiques (CABT) proscrit la mise au point, la production, l’acquisition, le transfert, l’accumulation et l’utilisation des armes biologiques ou à toxines. Ayant atteint une adhésion quasi universelle, la CABT constitue un élément central des efforts de la communauté internationale pour lutter contre la prolifération des armes de destruction massive et a établi une norme robuste contre les armes biologiques.

Il incombe entre autres aux associations médicales et aux médecins de sensibiliser la population et les décideurs aux implications des armes biologiques et de rallier un soutien universel à la condamnation de la recherche, du développement ou de l’emploi de telles armes comme moralement et éthiquement inacceptable. Ils ont un rôle sociétal et éthique important à jouer pour plein exiger le respect de la CABT, réprouver l’utilisation d’armes biologiques, mettre en garde contre la recherche illicite ou contraire à l’éthique et atténuer les effets de l’emploi d’armes biologiques.

 

RECOMMANDATIONS

Reconnaissant la menace croissante que font peser les armes biologiques, l’AMM et ses membres constituants condamnent la mise au point, la production et l’utilisation de toxines et d’agents biologiques à des fins étrangères à la prophylaxie, à la protection et à la thérapie ou pour d’autres motifs pacifiques et formule les recommandations suivantes :

Renforcement de la préparation et des interventions en cas d’urgence sanitaire

Les gouvernements et les autorités nationales de santé devraient :

  1. élaborer une stratégie pour l’accès en temps utile et efficacement coordonné aux mesures de protection vitale contre de nouveaux pathogènes, quelle que soit leur origine pour toutes les populations à risque. Cette stratégie devrait comporter une capacité d’intensification pour assurer des soins de masse.
  2. conformément à la prise de position de l’AMM sur les épidémies et les pandémies, satisfaire les besoins essentiels, et notamment :
  • des investissements dans les systèmes de santé publics, y compris les ressources et les fournitures pour accroître la capacité à dépister, rechercher et contenir les flambées de maladies rares ou inhabituelles ;
  • un programme fonctionnel mondial de veille pour améliorer la réaction aux maladies infectieuses survenant naturellement et pour permettre leur détection précoce et la caractérisation des maladies nouvelles ou émergentes ;
  1. fournir à l’OMS les moyens appropriés de remplir son rôle de direction en vue d’une coopération internationale adaptée et la coordination de la veille et de la réaction face aux maladies infectieuses émergentes ;
  2. soutenir l’élaboration d’un instrument légalement contraignant pour l’OMS aux fins de la prévention, de la préparation et de l’intervention face aux pandémies qui intègre les principes d’équité et des droits humains ;
  3. mettre en place des formations adéquates et ciblées pour les professionnels de santé, les chefs de file dans la société civile et la population au sens large, ainsi que des programmes collaboratifs de recherche pour améliorer le diagnostic, la prévention et le traitement des maladies ;
  4. élaborer des stratégies de communication pour informer les professionnels de santé et le grand public d’actes de bioterrorisme et de flambées de maladies infectieuses, mais aussi des services médicaux disponibles à l’échelon local ;
  5. financer la recherche et développement pour contrer les armes biologiques, notamment :
  • pour améliorer la compréhension de l’épidémiologie, de la parthénogénèse et le traitement des pathologies causées par de potentiels agents issus d’armes chimiques et la réaction immunitaire à ces agents ;
  • pour parvenir à de nouveaux vaccins, médicaments et antidotes plus efficaces contre les armes biologiques ;
  • pour améliorer les capacités de détection des agents biologiques et de lutte contre ces agents.

Les médecins, les associations médicales et les autres entités de santé devraient :

  1. participer aux côtés des autorités sanitaires locales, nationales et internationales à l’élaboration et à la mise en œuvre des protocoles de préparation et d’intervention en cas d’actes de bioterrorisme et de flambées de maladies infectieuses. Ces protocoles devraient être utilisés comme base pour la sensibilisation des médecins et du grand public ;
  2. soutenir et permettre aux médecins de jouer leur rôle essentiel de dépistage précoce de foyers inhabituels de maladies ou de symptômes, qui pourraient résulter de l’utilisation d’armes biologiques de manière à pouvoir le signaler rapidement aux institutions compétentes.
  3. Les médecins des spécialités concernées devraient :
  • être vigilants quant à l’occurrence de maladies ou de décès inexpliqués au sein d’une communauté ;
  • posséder des connaissances en matière de capacités de veille épidémiologique et de lutte contre des foyers inhabituels de maladies, symptômes ou détections ;
  • être familiers des manifestations cliniques, des techniques de diagnostic, des précautions d’isolement, des protocoles de décontamination et des prophylaxies/thérapies contre les agents biologiques susceptibles d’être utilisés dans une attaque ;
  • utiliser les procédures appropriées pour éviter de s’exposer ou que d’autres soient exposés ;
  • comprendre les bases de la communication des risques pour pouvoir communiquer clairement et de manière non menaçante sur des questions telles que les risques d’exposition et les potentielles mesures de prévention.

Lutte contre la recherche d’armes biologiques

Les gouvernements et les autorités nationales de santé devraient :

  1. élaborer et mettre en œuvre des stratégies nationales et mondiales de sensibilisation au développement potentiel d’armes biologiques parmi les chercheurs et les praticiens, comprenant une information complète sur le système de signalement à utiliser le cas échéant ;
  2. renforcer les mécanismes de supervision, afin de la rendre transparente et responsable et la règlementation des travaux des laboratoires biologiques et travaillant sur des toxines qui pourraient être appliqués à la fabrication d’armes.

Les médecins devraient :

  1. reconnaître la responsabilité sociétale des médecins en tant que scientifiques et humanitaires, pour dénoncer la recherche scientifique pour le développement et l’utilisation d’armes biologiques et pour plaider contre l’utilisation des biotechnologies et des technologies de l’information à des fins potentiellement dangereuses.

Les chercheurs devraient :

  1. se pencher sur les implications et les applications possibles de leur travail et comparer soigneusement l’intérêt de la recherche scientifique et leurs responsabilités éthiques vis-à-vis de la société.

Encourager les mécanismes mondiaux de veille de la menace d’armes biologiques

Les gouvernements devraient :

  1. prendre les mesures nécessaires pour garantir le respect et la mise en œuvre de la CABT et renforcer sa mise en œuvre par les moyens appropriés, en assurant leur transparence et en mettant en place des mécanisme adéquats de reddition de comptes pour les États membres.

Les médecins, les associations médicales et les autres entités de santé devraient :

  1. défendre, en coopération avec les Nations unies, y compris l’OMS et les autres entités compétentes pour renforcer l’Unité d’appui à l’application de la CABT, notamment les personnalités de la médecine et de la santé publique pour effectuer le suivi de la menace que présentent les armes biologiques, pour identifier les actions susceptibles de prévenir la prolifération des armes biologiques et pour mettre en place un plan coordonné visant à détecter l’émergence de maladies infectieuses dans le monde entier. Un tel plan devrait notamment couvrir :
  • la création de systèmes internationaux de suivi et de signalement, afin d’améliorer la veille et la lutte contre les flambées de maladies infectieuses dans le monde ;
  • l’élaboration d’un protocole de vérification efficace relevant de la CABT ;
  • la sensibilisation des médecins et du personnel de santé publique aux maladies infectieuses émergentes et aux armes biologiques potentielles ;
  • le renforcement des capacités des laboratoire pour identifier les pathogènes biologiques ;
  • la disponibilité des vaccins et des produits pharmaceutiques appropriés et
  • les besoins financiers, techniques et de recherche qui permettraient de réduire les risques d’utilisation d’armes biologiques et d’autres menaces majeures de maladies infectieuses.

 

Adoptée par la 53ème Assemblée générale de l’AMM, Washington, octobre 2002
Réaffirmée par la 191ème session du Conseil, Prague, République Tchèque, avril 2012
et révisée par la 73ème Assemblée générale de l’AMM, Berlin, Allemagne, octobre 2022

 

PRÉAMBULE

Les médecins s’efforcent de prodiguer aux patients des soins médicaux sûrs et de haute qualité.

Les progrès réalisés en médecine et dans les sciences et technologies connexes ont transformé la manière dont les soins médicaux sont assurés dans les systèmes de santé avancés et complexes.

Les risques inhérents à la médecine clinique n’ont cependant pas disparu. Les progrès de la médecine moderne réduisent souvent les risques, mais ils peuvent également les accroître ou en introduire de nouveaux, certains évitables d’autres non.

Les médecins et les organisations de soins de santé devraient essayer de prévoir ces risques et de les prendre en charge dans la mesure de leurs possibilités.

De nombreux services de santé sont aux prises avec une demande qui dépasse leurs capacités, une infrastructure inadaptée due au sous-investissement des gouvernements ou d’autres prestataires de soins de santé. La sécurité des patients est en danger lorsque les médecins travaillent dans des systèmes sous pression.

La sécurité du patient dépend également de la culture de travail dans laquelle évoluent les médecins. Dans de nombreux systèmes de santé prévaut une culture du blâme, dans laquelle on cible des personnes plutôt que d’examiner les causes organisationnelles plus larges des erreurs (comme les ressources limitées, les pénuries de main-d’œuvre ou les défaillances systémiques).

Par conséquent, de nombreux médecins craignent d’être injustement critiqués en cas d’erreur médicale pouvant avoir été causée ou aggravée par des facteurs systémiques et sont réticents à être honnêtes ou à exprimer leurs préoccupations.

Une culture de l’apprentissage sur le lieu de travail assure et améliore la sécurité du patient. L’adoption d’une approche culturelle juste et apprenante pourrait être un antidote aux cultures du blâme et de la peur.

Dans une culture d’apprentissage juste, le sujet de préoccupation est de savoir ce qui a provoqué l’incident qui a compromis la sécurité du patient, plutôt que de chercher à déterminer qui est l’éventuel responsable.

La régulation médicale et la peur des poursuites judiciaires peuvent également ébranler la capacité des médecins à parler librement de l’erreur médicale. Un système dans lequel les médecins ne se sentent pas encouragés à prendre la parole par peur d’être personnellement mis en cause compromet l’identification précoce des causes systémiques d’erreurs médicales ou de soins de piètre qualité et empêche la prise de mesures pour améliorer la sécurité du patient.

Le fait de travailler dans un système sous pression dans lequel prévaut une culture de la peur et du blâme peut éroder le bien-être des médecins. La qualité du travail de ces médecins peut s’en ressentir, voire conduire à l’erreur ou à des perspectives diminuées pour les patients.

L’amélioration du bien-être des médecins se répercute de manière significative sur la productivité, la qualité des soins, la sécurité des patients et la pérennité des services de santé.

La promotion de cultures positives sur les lieux de travail est essentielle pour réduire l’erreur médicale, améliorer le bien-être du médecin et assurer la sécurité du patient.

PRINCIPES

  1. Les médecins s’assurent que la sécurité du patient est toujours prise en compte dans leur décision médicale.
  2. Les personnes et les protocoles sont rarement les seuls responsables d’erreurs. Le plus probable est que des éléments séparés se combinent et créent ensemble une situation à haut risque. Il devrait donc exister une culture non punitive pour le signalement confidentiel d’erreurs médicales, qui se concentre sur la prévention et la correction des défaillances du système plutôt que sur la culpabilité de la personne ou de l’organisation.
  3. Une compréhension réaliste des risques inhérents à la médecine moderne exige que les médecins coopèrent avec toutes les parties prenantes, y compris les patients, pour adopter une approche proactive de la sécurité des patients.
  4. Pour créer une telle approche, les médecins doivent en permanence absorber une large gamme de connaissances scientifiques et s’efforcer d’améliorer continûment leur pratique de la médecine.
  5. Toutes les informations qui concernent la sécurité des patients doivent être communiquées aux patients et à l’ensemble des parties prenantes. Il n’en demeure pas moins que la vie privée des patients doive être strictement protégée.
  6. Les enquêtes sur les erreurs médicales et les incidents mettant en jeu la sécurité du patient devraient toujours commencer par un examen exhaustif de l’environnement de travail du médecin et par l’identification des facteurs et pressions systémiques qui pourraient avoir contribué à l’erreur ou à l’incident.
  7. Lorsque des facteurs systémiques se révèlent être en tout ou partie l’origine d’une erreur médicale, le jugement du ou des régulateurs ne devrait pas disculper le prestataire de soins.
  8. Les régulateurs des organisations prestataires de soins de santé doivent promouvoir et assurer la prévalence de cultures positives, justes et apprenantes sur les lieux de travail, au sein desquelles les médecins comme les patients se sentent soutenus et en mesure d’apprendre des évènements défavorables qui pourraient survenir.
  9. Il incombe également en partie à ces régulateurs d’identifier les contraintes systémiques et contextuelles qui pèsent sur la sécurité du patient, y compris le manque de ressources et d’infrastructures.

 

RECOMMANDATIONS

Reconnaissant l’importance des pressions systémiques, de la culture sur le lieu de travail, du bien-être du médecin et de la régulation des soins de santé pour la sécurité du patient, l’Association médicale mondiale recommande à ses membres constituants :

  1. de promouvoir des politiques relatives à la sécurité du patient auprès de tous les médecins de leur pays ;
  2. d’encourager les médecins, les autres professionnels de santé, les patients et les autres acteurs et organisations à travailler ensemble à la création de systèmes permettant d’assurer la sécurité du patient ;
  3. d’encourager l’élaboration de modèles efficaces afin de promouvoir la sécurité des patients par la formation médicale continue et le perfectionnement professionnel ;
  4. de coopérer les uns avec les autres et d’échanger des informations sur les évènements négatifs, notamment les erreurs, leurs solutions et les enseignements qu’ils ont pu en tirer afin d’améliorer la sécurité du patient ;
  5. d’exiger que les enquêtes relatives aux erreurs médicales et aux incidents mettant en jeu la sécurité du patient tiennent toujours compte des facteurs contextuels et systémiques ;
  6. d’exiger que les organisations prestataires de soins de santé favorisent une culture de l’apprentissage, du soutien et de l’amélioration propice à la sécurité du patient ;
  7. de travailler à instaurer un nouveau paradigme de régulation de la profession médicale pour encourager et favoriser la sécurité du patient ;
  8. de soutenir une régulation qui ait pour objectif d’éviter les erreurs médicales et de promouvoir les bonnes pratiques et l’apprentissage parmi les personnes et les organisations prestataires de soins ;
  9. de travailler à assurer que les établissements de soins disposent des ressources, des infrastructures et des effectifs nécessaires pour assurer la sécurité du patient.

 

Adoptée par la 52ème Assemblée générale de l’AMM, Édimbourg, Ecosse, octobre 2000
Révisée par la 62ème Assemblée générale de l’AMM, Montevideo, Uruguay, octobre 2011
et par la 73ème Assemblée générale de l’AMM, Berlin, Allemagne, octobre 2022

 

PRÉAMBULE

La déclaration de Lisbonne de l’AMM sur les droits du patient proclame que « toute personne a le droit de recevoir, sans aucune discrimination, des soins médicaux appropriés ».

La constitution de l’Organisation mondiale de la santé dispose que « la possession du meilleur état de santé qu’il est capable d’atteindre constitue l’un des droits fondamentaux de tout être humain, quelles que soient sa race, sa religion, ses opinions politiques, sa condition économique ou sociale ».

Les personnes privées de liberté (« les détenus ») devraient recevoir des soins de santé de même qualité que les personnes en liberté, puisqu’elles ont les mêmes droits que les autres personnes. Cela suppose le droit à un traitement humain et à des soins médicaux appropriés. Les normes de traitement des détenus font l’objet d’un grand nombre de déclarations et de directives des Nations unies, en particulier l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus, dites les règles Nelson Mandela, lesquelles, dans leur version de 2015 sont complétées par les règles de Bangkok des Nations unies concernant le traitement des détenues.

Le terme « personnes privées de liberté » désigne toutes les personnes détenues quel que soit leur statut, des personnes placées en détention provisoire en attendant leur jugement aux personnes condamnées à une peine de prison.

Il incombe aux États de garantir le droit à la vie et à la santé des personnes privées de liberté. Cela suppose d’assurer aux détenus les soins nécessaires pour que la prison ne devienne pas un facteur déterminant des maladies transmissibles.

Les mêmes principes éthiques s’appliquent à la relation entre le médecin et les personnes privées de liberté qu’à la relation entre un médecin et tout autre patient. Cependant le cadre particulier de la prison peut mettre la relation médecin-patient relation sous tension, le médecin pouvant subir la pression des autorités, le médecin y étant hiérarchiquement subordonné à son employeur, à savoir l’autorité pénitentiaire et en raison de l’attitude générale de la société envers les personnes privées de liberté.

Au-delà de la responsabilité des États de traiter toutes les personnes privées de liberté avec le respect dû à leur dignité et à leur valeur en tant qu’êtres humains, la mise en œuvre adéquate des règles Nelson Mandela se justifie par d’importantes raisons de santé publique. La forte incidence de la tuberculose et d’autres maladies transmissibles parmi les détenus d’un grand nombre de pays prescrit de placer la santé publique parmi les priorités lors de la définition de nouveaux régimes carcéraux et de la réforme des systèmes pénaux et carcéraux existants.

Les personnes qui risquent l’emprisonnement font souvent partie des couches les plus vulnérables de la société. Elles peuvent avoir manqué de soins de santé avant leur placement en détention, voire se trouver dans un état de santé plus mauvais que de nombreux autres citoyens et présenter un fort risque d’intégrer la prison avec des problèmes de santé non dépistés, non diagnostiqués et non traités.

La surpopulation, le confinement de longue durée dans des espaces restreints, faiblement éclairés, mal chauffés et par conséquent mal ventilés et souvent humides sont fréquent dans les lieux de détention. Or toutes ces caractéristiques contribuent à la propagation des troubles de la santé et des maladies transmissibles.  Lorsqu’à ces facteurs s’ajoutent le manque d’hygiène, une alimentation inadéquate et un accès limité à des soins de santé adaptés, les lieux de détention peuvent représenter un problème épineux de santé publique.

Maintenir des personnes privées de liberté dans des conditions qui les exposent à des risques médicaux substantiels constitue un grave écueil humanitaire. La manière la plus efficace et efficiente de réduire le risque de transmission des maladies est d’améliorer l’environnement carcéral.

Il incombe aux États d’allouer des ressources suffisantes pour assurer des conditions de détention dignes, assurer que les soins de santé en milieu carcéral soient adaptés à la taille et aux besoins de la population privée de liberté et de définir et mettre en place des stratégies de santé durables pour prévenir la transmission des maladies. L’organisation des soins de santé dans les prisons requiert une équipe de personnel soignant adéquate, capable, dans le cadre de sa mission essentielle de soin et de traitement des personnes placées en détention, de dépister et de traiter les maladies transmissibles.

La propagation de la tuberculose active au sein des populations carcérales et le développement de formes de tuberculose résistantes aux médicaments (tuberculoses multirésistante et ultrarésistante) souligné par l’Association médicale mondiale dans sa résolution sur la tuberculose, atteint une très forte prévalence et des taux d’incidence très élevés dans les prisons de certaines régions du monde. De même, la pandémie de Covid-19 a gravement touché les lieux de détention et des flambées ont été signalées dans le monde entier. D’autres pathologies, comme l’hépatite C et le sida, présentent des risques de transmission par le sang ou par l’échange de fluides corporels. La surpopulation carcérale est en outre propice à la propagation de maladies sexuellement transmissibles, tandis que l’usage de drogues injectables contribue à la propagation du sida et des hépatites B et C.

 

RECOMMANDATIONS

Rappelant sa déclaration de Lisbonne sur les droits du patient, l’Association médicale mondiale appelle tous les acteurs concernés à prendre les mesures nécessaires pour garantir aux personnes privées de liberté le meilleur état de santé qu’elles sont capables d’atteindre, et notamment :

les gouvernements et les autorités pénitentiaires et sanitaires

  1. à protéger les droits des personnes privées de liberté conformément aux différents instruments des Nations unies relatifs aux conditions de détention, en particulier les règles Nelson Mandela pour le traitement des détenus ;
  2. à allouer les ressources nécessaires aux soins de santé dans les lieux de détention, qui doivent être adaptés au nombre et aux besoins des personnes privées de liberté, y compris en finançant adéquatement des personnels de santé en effectifs suffisants ;
  3. à définir et à mettre en œuvre des stratégies sanitaires solides afin de créer un environnement carcéral sûr et sain, y compris par la vaccination, l’hygiène, le suivi et d’autres mesures de prévention de la propagation des maladies transmissibles ;
  4. à garantir que les personnes privées de liberté porteuses d’une maladies infectieuse soient traitées avec dignité et que leurs droits à des soins de santé soient respectés. En particulier, leur état de santé ne saurait justifier leur isolement sans un accès adéquat aux soins de santé et au traitement médical appropriés ;
  5. à assurer que les conditions de détention, à tout moment de la procédure judiciaire, de l’arrestation au rendu du jugement ou une fois la peine de prison prononcée, ne contribuent pas au développement, à l’aggravation ou à la transmission de maladies ;
  6. à assurer que le diagnostic et le traitement des maladies chroniques non transmissibles et des pathologies aiguës non transmissibles ou des blessures soit raisonnable et approprié, afin de ne pas ajouter un fardeau indu au personnel de santé ou de ne pas accroître le risque de propagation des maladies transmissibles par des détenus souffrant d’une maladie décompensée ou d’une blessure.
  7. à assurer que la planification et le suivi des soins font partie intégrante de la prestation de soins de santé en prison, en particulier en coordonnant les services de santé dans et hors les murs de la prison pour faciliter la continuité des soins et le suivi épidémiologique des patients lors de leur remise en liberté ;
  8. à assurer que l’état de santé des personnes soit examiné dans les 24 heures suivant leur entrée ou leur transfert dans un autre lieu de détention pour assurer la continuité des soins ;
  9. à éviter l’interruption des soins au sein de l’institution, notamment lorsque le détenu reçoit un traitement de substitution aux opiacés, en poursuivant le traitement prescrit.
  10. L’infection ou le risque de transmission ne saurait justifier un placement en détention. L’emprisonnement ne saurait constituer une manière efficace de prévenir la transmission de maladies infectieuses : au contraire, il favorise, par la peur, la dissimulation du diagnostic et par suite, la propagation de la maladie.
  11. à respecter l’autonomie et les responsabilités des médecins qui travaillent dans les prisons, qui doivent observer des principes d’éthique médicale pour protéger la santé des personnes privées de liberté ;
  12. à mener des enquêtes indépendantes et transparentes dans les établissements pénitentiaires pour éviter le refus de soins de santé aux détenus.

les Membres constituants de l’AMM et l’ensemble de la profession médicale

  1. à travailler avec les autorités locales et nationales, les autorités sanitaires et pénitentiaires pour faire de la santé, y compris la santé mentale, et des soins de santé en prison une priorité et adopter des stratégies permettant de créer un environnement carcéral sûr et sain ;
  2. conformément aux principes éthiques de la profession médicale, à encourager les médecins à signaler et à consigner toutes les défaillances de la prestation de soins de santé conduisant au mauvais traitement des personnes privées de liberté ;
  3. à soutenir et à protéger les médecins qui rencontrent des difficultés en raison de tentatives de dénoncer des défaillances de soins de santé dans des prisons ;
  4. à soutenir l’amélioration des conditions de détention et des systèmes pénitentiaires sur le plan de la santé des personnes privées de liberté.

les médecins travaillant en milieu carcéral

  1. à signaler aux autorités de santé et aux organisations professionnelles de leur pays toute défaillance dans la prestation des soins de santé, y compris de santé mentale, aux personnes privées de liberté et toute situation présentant un risque épidémiologique grave;
  2. à se conformer aux directives de santé publique nationales lorsqu’elles sont solides d’un point de vue déontologique, notamment en matière de signalement obligatoire des maladies infectieuses et transmissibles.

Adoptée par la 34e Assemblée Médicale Mondiale Lisbonne (Portugal), Septembre/Octobre 1981,
modifiée par les 39e Assemblée Médicale Mondiale Madrid (Espagne), Octobre 1987;
45e Assemblée Médicale Mondiale Budapest (Hongrie), Octobre 1993
et 51e Assemblée générale Tel Aviv (Israël), Octobre 1999,
réaffirmée par la 185e Session du Conseil de l’AMM, Evian les Bains, France, Mai 2010,
et modifiée par la 72e Assemblée générale de l’AMM (en ligne), Londres, Royaume-Uni, Octobre 2021

 

PREAMBULE

Les médecins du sport sont des médecins chargés de la prévention et du traitement de blessures ou de troubles associés à la pratique d’un sport. Dans certains pays, les médecins du sport sont reconnus comme spécialistes. Ils sont formés à s’occuper de questions associées à la nutrition, à la psychologie du sport, à la consommation de produits stupéfiants et ils peuvent également conseiller les athlètes en matière de prévention des blessures.

Consciente du rôle des médecins en médecine du sport, l’Association médicale mondiale (AMM), reconnaissant les circonstances particulières dans lesquelles les soins et les conseils sont donnés, recommande les directives éthiques suivantes afin d’aider les médecins du sport à répondre aux besoins des athlètes.

Anabolisants et méthodes et produits dopants

L’emploi, par des athlètes, de substances anabolisantes, analgésiques, ainsi que de méthodes et de produits dopants, est contraire aux règles et aux principes éthiques de la compétition, tels que définis par la plupart des autorités du sport. Les produits et les méthodes dopants provoquent des effets indésirables sur la santé.

Le médecin du sport doit être conscient que les méthodes, les produits et les interventions modifiant de manière artificielle les composants, la biochimie, la séquence génomique, l’expression des gènes ou les niveaux d’hormone du sang sans bénéfice pour la santé du patient, enfreignent les principes fondamentaux énoncés dans la déclaration de Genève de l’AMM, qui proclame : « Je considérerai la santé et le bien-être de mon patient comme ma priorité ».

L’AMM estime que l’emploi de substances anabolisantes et de méthodes et produits dopants constitue un risque pour la santé des athlètes et contrevient aux principes de l’éthique médicale. Le médecin doit donc refuser d’administrer ou de cautionner ces pratiques ou méthodes contraires à l’éthique professionnelle ou susceptibles de porter préjudice à l’athlète. Le médecin doit également informer l’athlète de tout risque potentiel pour sa santé.

Ces méthodes et produits comprennent, sans s’y limiter :

  • l’emploi de médicaments ou d’autres substances, quelles qu’en soient la nature et la voie d’administration, y compris les médicaments qui stimulent ou ralentissent l’activité fonctionnelle du système nerveux central et les méthodes qui modifient artificiellement les réflexes, altèrent l’impression de bien-être, voire l’état mental général ;
  • les protocoles ou thérapies visant à dissimuler la douleur ou toute autre réaction symptomatique protectrice afin de permettre à l’athlète de participer à des épreuves malgré la présence de signes cliniques venant contre-indiquer cette participation. Cela comprend l’autorisation de participer à une activité sportive alors qu’elle pourrait se révéler dangereuse pour l’athlète ;
  • les protocoles ou les thérapies utilisées pour masquer la présence d’autres substances susceptibles d’améliorer les performances ou de provoquer une perte rapide d’eau ou de poids ;
  • les mesures visant à améliorer ou à maintenir artificiellement l’endurance ou la capacité d’oxygénation du sang pendant une compétition. Cela comprend la manipulation du sang ou des composants sanguins, définie comme l’administration ou la réintroduction de sang ou de produits des globules rouges de toute origine dans le système circulatoire, améliorant artificiellement la prise, le transport ou la délivrance d’oxygène par l’utilisation de produits chimiques comme l’érythropoïétine ou d’autres formes de manipulation intravasculaire afin d’accroître artificiellement la masse des globules rouges, à moins qu’une telle manipulation soit indiquée pour le traitement d’une maladie ou d’un état de santé connu. Le dopage du sang expose également l’athlète à des risques potentiellement graves pour sa santé ;
  • l’utilisation de substances anabolisantes, notamment des stéroïdes, qui sont indétectables par les méthodes de test utilisées ordinairement ;
  • l’utilisation de précurseurs des stéroïdes anabolisants, y compris des compléments alimentaires vendus comme des substituts sûrs aux stéroïdes mais qui se métabolisent dans le corps sous la forme de stéroïdes anabolisants ;
  • l’utilisation de substances non agréées, qui ne disposent d’aucun agrément pour un usage thérapeutique chez les humains délivré par une autorité gouvernementale de santé, comme les médicaments en cours d’essai clinique et préclinique, les médicaments retirés du marché, les drogues de synthèse ou les substances agréées pour le seul usage vétérinaire.
  • l’utilisation d’hormones peptidiques, de facteurs de croissance et de substances associées visant à accroître le nombre de globules rouges, l’oxygénation du sang ou sa capacité de transporter l’oxygène ;
  • l’utilisation de modulateurs hormonaux et métaboliques, c’est-à-dire de substances qui modifient l’activité hormonale en bloquant l’action ou en accroissant l’activité d’une hormone.

L’emploi de substances anabolisantes ou de précurseurs de stéroïdes par les adolescents est spécialement préoccupant. Les jeunes utilisateurs sont considérés comme particulièrement susceptibles de développer de graves problèmes de santé au cours de cette période de vulnérabilité physique et émotionnelle, alors que leur propre cycle hormonal est en pleine évolution. Chez les femmes, on a constaté de nombreux effets indésirables associés aux substances anabolisantes, dont certains peuvent devenir permanents, même après l’arrêt de la prise de substance. Les médecins devraient fermement décourager l’emploi de tels produits.

Règles de World Athletics[1] relatives à l’admissibilité des athlètes féminines dans les compétitions

 Les règles de World Athletics sur les conditions d’admissibilité des athlètes féminines[2] adoptées en 2018 imposent un plafond de production hormonale aux athlètes souhaitant concourir dans certaines disciplines des compétitions internationales d’athlétisme dans la catégorie féminine.

L’AMM s’oppose aux règles de World Athletics qui imposent aux athlètes féminines présentant un trouble de la différenciation sexuelle (TDS) qu’elles réduisent par des moyens médicaux le taux de testostérone naturellement présent dans leur sang pour être autorisées à se présenter à une compétition. La simple existence d’un état causé par une différence de développement sexuel, chez une personne qui n’a pas exprimé le désir de modifier cet état, ne saurait constituer une indication médicale en faveur d’un traitement. Tout traitement médical destiné à la seule amélioration des performances de l’athlète est contraire à l’éthique.

 

RECOMMANDATIONS

  1. Les médecins du sport ont l’obligation et le devoir moral de respecter les normes déontologiques de la profession médicale.
  2. Le médecin chargé de la surveillance médicale des athlètes a le devoir déontologique de tenir compte des exigences particulières à la fois physiques et mentales qui sont imposées à ces athlètes de par leur participation à des activités sportives. Le devoir du médecin n’est pas seulement d’aider l’athlète à accroître ses performances, mais d’abord de préserver la santé physique et mentale de l’athlète.
  3. Lorsqu’il s’agit d’un athlète professionnel, qui vit de cette activité, le médecin doit porter une attention particulière aux directives de médecine du travail qui pourraient s’appliquer.
  4. Le médecin du sport doit donner objectivement, clairement et précisément son avis sur l’aptitude de l’athlète et ne laisser aucun doute sur ses conclusions.
  5. Pour toutes les compétitions et les évènements sportifs, il incombe au médecin de décider si l’athlète est médicalement en état de concourir ou de participer. Cette décision ne saurait être déléguée à d’autres professionnels qui ne sont pas médecins.
  6. Pour qu’il puisse exercer ses obligations déontologiques, l’autorité du médecin du sport doit être pleinement reconnue et respectée, notamment lorsqu’il s’agit de la santé et de la sécurité de l’athlète. Le souci de la santé et de la sécurité de l’athlète doit primer sur les intérêts de tout tiers.
  7. Les médecins du sport ont l’obligation de respecter les principes éthiques de la profession médicale. Cela comprend le droit à la vie privée et le respect de la nature confidentielle de la relation entre médecin et patient. Ces principes et obligations devraient être étayés par un accord entre le médecin du sport et l’organisation d’athlétisme concernée.
  8. Le médecin du sport doit donc refuser d’administrer une substance ou de cautionner des pratiques ou méthodes de traitement contraires à l’éthique médicale ou susceptibles de porter préjudice à l’athlète. Le médecin doit également informer l’athlète de tout risque potentiel pour sa santé.
  9. Le médecin du sport devrait être invité à participer à la conception et à la modification des règles et règlement relatifs à un sport afin de protéger la santé et la sécurité des athlètes.
  10. Le médecin du sport devrait, avec l’accord de son patient, travailler en coopération avec le médecin traitant du patient et l’informer pleinement de l’état actuel de ce dernier.
  11. Tous les médecins devraient être conscients que le désir d’améliorer ses performances, son apparence ou son bien-être n’est pas propre aux athlètes de haut niveau. Les athlètes amateurs, de même que les adolescents peuvent également faire l’objet de pressions socioculturelles en faveur de la consommation d’anabolisants et de produits ou de méthodes de dopage. Il est recommandé d’adopter une approche de réduction des risques, comprenant des entretiens centrés sur les risques, l’atténuation des conséquences, les stratégies de prévention et la promotion de la santé.

 

 

[1] Anciennement connue sous le nom d’Association internationale des fédérations d’athlétisme (IAAF).
[2] Notamment le point 2.3 du Règlement régissant la qualification dans la catégorie féminine.