Adoptée par la 64ème Assemblée Générale de l’AMM, Fortaleza, Brésil, octobre 2013, et
réaffirmée avec des révisions mineures par le 224ème Conseil de l’AMM, Kigali, Rwanda, octobre 2023

 

PRÉAMBULE

La Résolution de l’AMM sur la participation des médecins à la peine capitale stipule qu’il est contraire à l’éthique pour les médecins de prendre part à la peine capitale et la Déclaration de Genève exige des médecins le plus grand respect de la vie humaine.

L’AMM reconnaît que l’opinion prévalant dans certains pays dont font partie certains de ses membres empêche ces derniers de s’opposer inconditionnellement à la peine de mort.

L’AMM soutient donc la suspension de l’utilisation de la peine de mort via un moratoire mondial.

L’AMM a depuis longtemps reconnu qu’elle ne peut pas tenir ses membres constituants responsables des actions et politiques de leurs gouvernements respectifs.

 

RECOMMANDATIONS

L’Association médicale mondiale soutient le moratoire des Nations Unies sur l’application de la peine de mort.

Adoptée par la 64ème Assemblée Générale de l’AMM, Fortaleza, Brésil, Octobre 2013, et
révisée par la 74ème Assemblée générale de l’AMM, Kigali, Rwanda, Octobre 2023

 

PRÉAMBULE

Les personnes qui s’identifient comme LGBTQIA+ (lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres, queers, asexuelles et autres) représentent un spectre large et fluide d’orientations sexuelles, d’identités de genre, d’expressions de genre ou de caractéristiques sexuelles naturelles. Bien que les personnes LGBTQIA+ peuvent partagent des expériences culturelles et sociales communes et des objectifs communs de justice et d’équité face aux traitements discriminatoires, préjudiciables, voire à la violence, il s’agit de communautés diverses confrontées à des enjeux distincts et ayant des besoins spécifiques en matière de soins de santé et au-delà.

La présente prise de position porte spécifiquement sur les personnes lesbiennes, gays et bisexuelles.

Dans le cadre de leur travail, les professionnels de santé rencontrent de nombreux aspects de la diversité humaine, y compris les différentes orientations naturelles de la sexualité humaine.

Un important corpus de la recherche scientifique montre que le fait d’être lesbienne, gay ou bisexuel s’inscrit dans les orientations naturelles de la sexualité humaine et n’a en soi aucun effet néfaste sur la santé. Ils ne constituent pas un trouble ou une maladie qui requerrait un traitement ou une guérison et tout effort en ce sens serait contraire à une pratique éthique de la médecine.

Par conséquent, l’homosexualité et la bisexualité ne figurent pas dans la classification internationale des maladies (CIM) de l’OMS.

Il n’en demeure pas moins que la discrimination, directe ou indirecte, sur le plan interpersonnel comme institutionnel, les législations réprimant l’homosexualité ou la bisexualité, les violations des droits humains, la stigmatisation, la pénalisation des relations intimes entre personnes de même sexe, le rejet par les pairs et l’intimidation continuent d’avoir de graves conséquences sur la santé psychologique et physique des lesbiennes, des gays et des personnes bisexuelles. Ces atteintes se perpétuent en raison du manque d’éducation sur les différentes orientations naturelles de la sexualité humaine dans la société. Elles conduisent à une moins bonne santé, qui se traduit par une prévalence accrue de dépression, d’anxiété, de consommation de stupéfiants, d’idées suicidaires et de tentatives de suicide. Ainsi, les taux de suicide chez les adolescents et les jeunes adultes bisexuels, lesbiennes et gays sont considérablement plus élevés que chez les adolescents et jeunes adultes hétérosexuels.

Ces effets délétères sur l’état de santé peuvent être aggravés par d’autres facteurs intersectionnels, parmi lesquels l’origine nationale ou ethnique, le sexe, l’âge, la religion, l’identité de genre, la classe sociale ou le handicap.

La pathologisation erronée et sans fondement des identités lesbienne, gay et bisexuelle fait courir aux personnes concernées le risque d’être soumises à des procédures dites « de conversion » ou « réparatrices », ou encore « pratiques de réorientation sexuelle et de genre (PRSG) », qui ne sont que des pratiques dangereuses et contraires à l’éthique visant à effacer ou modifier l’orientation sexuelle naturelle ou l’identité de genre d’une personne. Ces méthodes sont dépourvues de base médicale, ne reposent sur aucune preuve d’efficacité et constituent une grave menace pour la santé et les droits fondamentaux des personnes qui y sont soumises. Elles peuvent générer de l’anxiété, une faible estime de soi, conduire à la dépression, à la consommation de stupéfiants, à des difficultés sur le plan de l’intimité, voire au suicide.

Des expériences négatives dans le cadre de soins de santé peuvent nuire à la relation entre médecin et patient et conduire les lesbiennes, les gays et les personnes bisexuelles à ne pas recourir à des soins pourtant disponibles. Ces personnes peuvent aussi cacher leur orientation sexuelle à leur médecin, de crainte de ne pas recevoir le traitement adéquat, ou de ne pouvoir compter sur un environnement de soins sûr et respectueux de leur vie privée. Or sans cette information, il peut se révéler plus difficile pour les médecins d’offrir des soins ciblés qui tiennent compte des besoins de santé spécifiques des patients gays, lesbiennes ou bisexuels.

Les médecins, les étudiants en médecine et les autres professionnels de santé gays, lesbiennes ou bisexuels sont également confrontés à la discrimination, à la marginalisation et à l’intimidation ou peuvent être désavantagés, sur leur lieu de travail, dans les facultés, les organisations professionnelles et ailleurs. Les environnements de travail et d’enseignement nocifs peuvent générer du stress et conduire au burn-out, notamment chez les personnes marginalisées.

 

RECOMMANDATIONS

  1. L’AMM affirme fermement que le fait d’être lesbienne, gay ou bisexuel ne constitue pas une maladie, mais une orientation naturelle de la sexualité humaine.
  2. L’AMM condamne toute forme de stigmatisation, de criminalisation et de discrimination à l’encontre de personnes sur la base de leur orientation sexuelle.
  3. L’AMM affirme que tout soutien psychiatrique ou psychologique qui serait nécessaire ne doit pas porter sur l’orientation sexuelle elle-même, mais sur les conflits entre cette orientation et les normes et préjugés religieux et sociaux intériorisés ainsi que sur les besoins de santé de chaque patient.
  4. L’AMM condamne sans ambiguïté les méthodes dites « de conversion » ou « réparatrices », lesquelles constituent une violation des droits humains et des pratiques injustifiables, qui doivent être dénoncées et sanctionnées. Il est contraire à l’éthique qu’un médecin prenne part à de tels protocoles, à quelque étape que ce soit.
  1. L’AMM appelle tous les médecins :
    • à classer les maladies physiques et psychologiques sur la base de symptômes cliniques pertinents selon les critères de la CIM-11, sans égard pour l’orientation sexuelle et à proposer des traitements et protocoles de qualité, fondés sur des preuves et reconnus au niveau international, dans le respect des principes énoncés dans le Code international d’éthique médicale de l’AMM ;
    • à offrir un environnement de soins sûr, respectueux et inclusif pour les patients gays, lesbiennes et bisexuels ;
    • à favoriser un environnement de travail et d’apprentissage sûr, respectueux et inclusif pour les médecins, les étudiants en médecine et les autres professionnels de santé ;
    • à recourir à la formation continue et au perfectionnement professionnel pour mieux comprendre les besoins de santé spécifiques des patients gays, lesbiennes et bisexuels et les bénéfices que ces derniers peuvent attendre de certains traitements ;
    • lorsque cela est opportun, à associer le partenaire de même sexe ou les parents de même sexe de leur patient aux discussions relatives aux préférences de leur patient dans le respect du consentement et de la vie privée de celui-ci ;
    • à dénoncer les législations et les pratiques qui portent atteinte aux droits fondamentaux des lesbiennes, des gays et des bisexuels, lesquelles peuvent également avoir des conséquences néfastes sur l’ensemble du système de santé ;
    • à rejeter et à refuser de participer, dans quelque mesure que ce soit, à des méthodes dites de « conversion » ou « réparatrices ».
  1. L’AMM appelle ses membres constituants et les associations professionnelles :
    • à plaider pour un environnement de travail et d’apprentissage sûr, respectueux et inclusif pour les médecins, les étudiants en médecine et les autres professionnels de santé ;
    • à instaurer et à appliquer des politiques de lutte contre la discrimination conformes à la prise de position de l’AMM sur la non-discrimination vis-à-vis des médecins en matière d’affiliation et d’activités professionnelles ;
    • à créer des directives à l’attention des médecins expliquant les difficultés spécifiques des patientes lesbiennes et des patients gays et bisexuels en matière de santé physique et mentale le cas échéant ;
    • à promouvoir dans la mesure du possible une évolution de l’enseignement de la médecine, de la formation en spécialité et du cursus de formation continue/perfectionnement pour que ces cursus informent et sensibilisent aux besoins de santé spécifiques des lesbiennes, des gays et des bisexuels ;
    • à créer des canaux permettant aux médecins lesbiennes, gays ou bisexuels de signaler les actes de discrimination ou les biais qui leur font du tort, à eux ou à des patients gays, lesbiennes ou bisexuels ;
    • dans les environnements où sont garanties la confidentialité et la sécurité du patient et où les données ne peuvent être utilisées à des fins étrangères au service, à encourager le recueil volontaire de données pour connaître et rendre compte des résultats cliniques des groupes de patients gays, lesbiennes et bisexuels, en prenant en compte l’intersectionnalité afin d’assurer et d’améliorer la prestation de soins à ces groupes ;
    • à condamner activement les méthodes dites « de conversion » ou « réparatrices ».
  1. L’AMM appelle les gouvernements :
    • à rejeter et à abroger les législations portant atteinte aux droits des lesbiennes, des gays et des bisexuels ;
    • à condamner et à interdire les méthodes dites « de conversion » ou « réparatrices » ;
    • à promouvoir des politiques visant à corriger toutes les iniquités, de santé et autres, causées par toute discrimination ouverte ou implicite contre les personnes lesbiennes, gays ou bisexuelles ;
    • à encourager l’éducation aux différentes orientations naturelles de la sexualité humaine dès le plus jeune âge afin d’en favoriser l’acceptation pour parvenir à une meilleure santé physique et mentale de toutes et tous.

 

 

Adoptée par la 64ème Assemblée Générale de l’AMM, Fortaleza, octobre 2013 et
réaffirmée avec des révisions mineures par le 224ème Conseil de l’AMM, Kigali, Rwanda, octobre 2023

 

PRÉAMBULE

L’Association médicale mondiale observe avec une grande inquiétude la persistance du recours à la torture dans de nombreux pays à travers le monde.

L’AMM réaffirme sa condamnation totale de toute forme de torture et de tout autre peine ou traitement cruel, inhumain ou dégradant tels que définis par la Convention des Nations unies contre la torture (CAT, 1984). La torture est l’une des violations les plus graves du droit international des droits humains, dont les conséquences sont dévastatrices pour les victimes, leurs familles et la société dans son ensemble. La torture cause de graves dommages physiques et psychologiques et constitue un crime absolument prohibé par le droit international.

L’AMM réaffirme ses politiques précédemment adoptées, à savoir :

L’évaluation médicale est un facteur essentiel dans la documentation de la torture et la réparation des victimes de torture. Les médecins ont un rôle décisif à jouer dans la collecte d’informations sur la torture, l’apport de preuves de torture à des fins judiciaires ainsi que dans le soutien et la réadaptation des victimes.

L’AMM note l’adoption en décembre 2012 par le Comité des Nations unies contre la torture de l’Observation générale no 3 sur l’application par les États parties de l’article 14 de la Convention contre la torture, ayant trait au droit des victimes de torture à réparation. L’Observation générale met l’accent sur le droit à la réadaptation en tant qu’obligation des États et précise la portée de ces services. L’AMM salue notamment :

  • l’obligation des États parties d’adopter une « approche à long terme et intégrée et faire en sorte que des services spécialisés dans la prise en charge des victimes d’actes de torture ou de mauvais traitements soient disponibles, appropriés et facilement accessibles », sans que l’accès à ces services soit subordonné à une action en justice engagée par la victime [1] ;
  • la reconnaissance du droit des victimes à choisir le prestataire de services de réadaptation, qu’il s’agisse d’un établissement de l’État ou d’un prestataire de services non gouvernemental financé par l’État ;
  • la confirmation que les États parties devraient assurer aux victimes de torture un accès aux programmes de réadaptation dès que possible après évaluation par des professionnels de la médecine qualifiés et indépendants ;
  • les références concernant les mesures visant à protéger les professionnels de la santé et de la justice, à mettre au point une formation spécifique sur le Protocole d’Istanbul pour les professionnels de santé et à promouvoir le respect des normes internationales et des codes de conduite internationaux destinés aux fonctionnaires y compris le personnel médical, les psychologues et le personnel des services sociaux [2].

L’AMM prend note que depuis l’adoption de l’Observation générale sur l’application de l’article 14 par les États parties, d’importantes évolutions ont eu lieu en matière de pratiques de réadaptation et de contrôle du respect de leurs obligations par les États :

 

RECOMMANDATIONS

  1. L’AMM souligne le rôle vital de la réparation pour les victimes de torture et leurs familles, laquelle contribue à leur capacité à reconstruire leur vie et à se rétablir, ainsi que le rôle des médecins dans la réadaptation.
  2. L’AMM encourage ses associations membres à travailler avec les agences concernées, gouvernementales ou non, participant à la réparation des victimes de torture, notamment dans les domaines de la documentation, de la réadaptation et de la prévention et ce faisant, à utiliser le Protocole d’Istanbul révisé et les normes mondiales en matière de réadaptation.
  3. L’AMM encourage ses membres à soutenir les agences menacées ou sujettes à des mesures de rétorsion de la part d’États parties en raison de leur implication dans la recherche d’information sur des actes de torture et dans la réadaptation et la réparation des victimes de torture.
  4. L’AMM appelle ses membres à mettre à profit leur expérience médicale pour soutenir les victimes de la torture conformément à l’article 14 de la Convention des Nations unies contre la torture, y compris en les aidant à devenir actrices de leur processus de réadaptation à travers des programmes officiels destinés aux survivants.
  5. L’AMM appelle ses associations membres à soutenir et à faciliter le recueil de données au niveau national, en utilisant les indicateurs établis pour le droit à la réadaptation pour contrôler la mise en œuvre, par les États, de leur obligation de fournir des services de réadaptation.

 

[1] Paragraphe 13 de l’Observation générale
[2] Paragraphe 18 de l’Observation générale
[3] Global Impact Data — IRCT

Adoptée par la 64ème Assemblée Médicale Mondiale, Fortaleza, Brésil, octobre 2013,
et réaffirmée avec des révisions mineures par le 224ème Conseil de l’AMM, Kigali, Rwanda, octobre 2023

 

PRÉAMBULE

Selon la liste des agents pathogènes fongiques prioritaires pour l’OMS (WHO Fungal Priority Pathogens List), les pathogènes fongiques constituent une menace majeure pour la santé publique : ils deviennent en effet de plus en plus courants et résistants aux traitements. En outre, les données actuelles laissent penser que le réchauffement climatique et l’augmentation des voyages et du commerce internationaux contribuent à l’expansion des maladies fongiques dans le monde, à la fois sur le plan de l’incidence et de l’aire d’extension géographique.

On estime que les maladies fongiques invasives et chroniques entraînent des taux de morbidité annuelle similaires à ceux provoqués par les problèmes de santé communément reconnus dans le monde comme le paludisme et la tuberculose. En plus des décès, ces maladies fongiques conduisent souvent à une mauvaise santé chronique, causant par exemple la cécité avec kératite, la détresse respiratoire avec une aspergillose bronchopulmonaire allergique (ABPA), l’asthme sévère avec une sensibilisation fongique (SAFS) ou encore l’aspergillose pulmonaire chronique (CPA), une perte de poids et une déficience nutritionnelle avec candidose œsophagienne et une CPA ou une incapacité à avoir une vie sexuelle saine du fait d’une candidose vulvo-vaginale.

Les graves maladies fongiques sont souvent opportunistes, se manifestent à la suite d’autres maladies affaiblissant le système immunitaire telles que l’asthme, le SIDA, le cancer, les médicaments antirejets immunosuppresseurs et les corticothérapies.

Bien que de nombreuses maladies fongiques soient assez aisément curables, dans de nombreux cas ces maladies ne donnent lieu à aucun traitement. Les infections fongiques seules ne sont souvent pas suffisamment identifiables pour permettre un diagnostic clinique. De même, les cultures étant souvent faussement négatives, il est fréquent de passer à côté du diagnostic. De plus, la fenêtre diagnostique étant relativement étroite, le diagnostic n’est pas établi assez vite pour soigner les patients, avec pour résultat de longs et couteux séjours en hôpital, et fréquemment une issue fatale. Enfin, les médicaments efficaces pour traiter les infections fongiques ne sont souvent pas disponibles au moment et à l’endroit où ils sont nécessaires.

L’OMS souligne qu’en dépit d’une inquiétude croissante, les infections fongiques ne reçoivent pas l’attention et les ressources qu’elles exigent. C’est pourquoi nous manquons de données fiables sur la distribution des maladies fongiques et les modèles de résistance aux traitements antifongiques. Par conséquent, « nous ne connaissons pas le fardeau exact que représentent les maladies fongiques et la résistance antifongique et nous peinons à mener une lutte efficace contre elles [1] ».

 

RECOMMANDATIONS

  1. Conformément à la liste des agents pathogènes fongiques prioritaires établie par l’OMS, l’AMM recommande la poursuite de stratégies visant à produire des données probantes et à améliorer la lutte contre les pathogènes fongiques, notamment pour la prévention de la résistance aux médicaments antifongiques et en particulier, elle demande instamment aux gouvernements et aux acteurs concernés :
    • de veiller à ce que des tests diagnostiques et des thérapies antifongiques soient disponibles pour leurs populations ;
    • en fonction de la prévalence des maladies fongiques et de leurs maladies sous-jacentes, de garantir la fourniture de tests antigènes spécifiques ou de la microscopie et de la culture ;
    • d’assurer la disponibilité de ces tests, et du personnel de santé formé à leur réalisation et à leur interprétation dans tous les pays où on observe des infections fongiques systémiques ;
    • d’envisager de créer au moins un centre de diagnostic d’excellence avec un personnel de santé suffisant et formé convenablement au diagnostic des infections fongiques ;
    • d’assurer le suivi de la toxicité des antifongiques ;
    • de soutenir les associations médicales dans l’élaboration de cours médicaux appropriés afin de garantir une approche diagnostique efficace des infections fongiques.
  1. L’AMM encourage ses membres constituants à entreprendre et à soutenir des études épidémiologiques sur le fléau des maladies fongiques dans leur pays et à informer leur gouvernement des résultats.

 

[1] L’OMS publie la toute première liste d’agents pathogènes fongiques.

Adoptée par la 63ème Assemblée Générale de l’AMM, Bangkok, Thaïlande, octobre 2012
et réaffirmée par la 212ème session du Conseil de l’AMM, Santiago, Chili, avril 2019

 

PREAMBULE

L’utilisation de la vaccination afin de prévenir une maladie remonte à 1796 lorsque Jenner utilisa avec succès la vache pour vacciner contre la variole. Depuis, la vaccination et l’immunisation ont été reconnues  comme une stratégie efficace de prévention de plusieurs maladies transmissibles et sont à présent développées pour lutter contre certaines maladies non transmissibles.

Le développement de la vaccination et sa mise en œuvre constituent quelques unes des mesures les plus importantes des temps modernes pour la santé mondiale. On estime que l’immunisation évite actuellement environ 2,5 millions de morts par an en protégeant contre des maladies telles que la diphtérie, le tétanos, la coqueluche et la rougeole. Environ 109 millions d’enfants de moins d’un an sont totalement protégés par un seul vaccin contre la diphtérie-tétanos-coqueluche (DTP3).

La plupart du temps, le but ultime de l’immunisation est l’éradication totale d’une maladie transmissible. Tel fut le cas en 1980 pour la variole et on peut raisonnablement envisager l’éradication de la polio dans les prochaines années.

La ‘vaccination dans le monde: vision et stratégie (GIVS) 2006-2015′ était une stratégie élaborée par l’OMS et l’UNICEF dans l’espoir d’atteindre les populations cibles qui actuellement n’ont pas de services d’immunisation ou un niveau de couverture adéquat.

Les quatre stratégies promues dans cette vision sont les suivantes :

  • Protéger davantage d’individus dans un monde en mutation
  • Introduire de nouveaux vaccins et des technologies
  • Intégrer l’immunisation, d’autres interventions sanitaires apparentées et une surveillance dans les systèmes de soins
  • Immuniser dans le contexte de l’interdépendance mondiale [1]

La recherche sur les vaccins met constamment à jour de nouvelles possibilités pour protéger les populations contre les graves menaces sanitaires. De plus, de nouvelles souches de maladie font leur apparition, ce qui nécessite l’adaptation des vaccins afin d’assurer la protection.

Le processus d’immunisation requiert un environnement bénéficiant de ressources et de personnels de santé appropriés afin de garantir une vaccination efficace et sûre. Souvent la vaccination demande des injections et il faut toujours respecter des procédures sûres pour ces injections.

Les calendriers d’immunisation peuvent varier en fonction du vaccin, certains demandant plusieurs injections pour être efficaces. Il est capital que le calendrier soit suivi dans son intégralité, afin de ne pas compromettre l’efficacité du vaccin.

Les bénéfices de l’immunisation ont eu un impact majeur sur les populations, non seulement en termes de prévention d’une mauvaise santé mais aussi en permettant les ressources précédemment mobilisées pour soigner les maladies, d’être redirigées sur d’autres priorités sanitaires. Des populations en meilleure santé sont économiquement profitables aux pays et peuvent davantage apporter à la société.

Réduire la mortalité de l’enfant est le quatrième des Objectifs du millénaire pour le développement, l’immunisation des enfants ayant un impact majeur sur le taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans. Selon l’OMS, plus de 19 millions d’enfants n’ont pas reçu le vaccin DTP3. De plus, il convient de mettre en place des services de santé de base pour la santé maternelle avec du personnel de santé qualifié.

L’immunisation des adultes face à des maladies telles que la grippe et les infections à pneumocoque a prouvé son efficacité, non seulement en diminuant le nombre de cas parmi ceux ayant été immunisés mais aussi en réduisant le fléau des maladies dans la société.

La profession médicale dénonce toute prise de position non fondée et inexacte sur les possibles dangers de la vaccination. De telles prises de position ont fait baisser le taux d’immunisation dans certains pays. Il en est résulte une augmentation du taux de maladies à prévenir avec de graves conséquences pour un certain nombre de personnes.

Les pays n’ont pas tous  les mêmes priorités en termes d’immunisation, la prévalence et le risque de maladies variant entre les populations. Tous les pays n’ont pas le même taux de couverture ni les mêmes ressources pour acquérir, coordonner, distribuer ou bien administrer efficacement les vaccins à leurs populations, comptant souvent sur les organisations non gouvernementales pour soutenir les programmes d’immunisation. Ces dernières à leur tour s’appuient souvent sur des fonds extérieurs qui ne sont pas toujours sûrs. Dans cette période de crise financière mondiale, le financement de tels programmes est soumis à des pressions considérables.

Le risque de complications provoquées par des maladies évitables par la vaccination est maximum chez ceux confrontés à des obstacles pour accéder aux services d’immunisation. Ces obstacles peuvent être le facteur coûts, la localisation, la méconnaissance des services d’immunisation et de leurs bénéfices pour la santé ou bien d’autres facteurs restrictifs.

Les individus souffrant de maladies chroniques, ou ayant des problèmes de santé ou d’autres facteurs de risques, tel que l’âge, sont particulièrement exposés à de graves complications face à des maladies que l’on peut prévenir par la vaccination. Ils devraient donc être ciblés pour assurer une immunisation adéquate.

Les chaînes d’approvisionnement peuvent s’avérer difficiles à sécuriser, notamment dans des pays manquant de coordination ou de soutien au niveau de leurs programmes d’immunisation. Sécuriser les ressources appropriées par exemple avec des professionnels de santé qualifiés, des équipements et un soutien administratif peut être un défi majeur.

La collecte des données sur le taux d’administration de vaccination, sur les effets secondaires des vaccins et la surveillance des maladies sont souvent  difficiles à effectuer, particulièrement dans les zones isolées et en manque de ressources. Néanmoins, signaler les incidents et contrôler la propagation des maladies sont des outils essentiels pour lutter contre les menaces sanitaires mondiales.

 

RECOMMANDATIONS

L’AMM soutient les recommandations de Vaccination dans le monde : vision et stratégie (GIVS) 2006-2015 et lance un appel à la communauté internationale pour :

  • Encourager les gouvernements à allouer des ressources aux programmes d’immunisation visant à répondre aux besoins spécifiques de leurs pays.
  • Reconnaître l’importance de la vaccination/immunisation en soutenant et en adoptant toujours les mesures visant à atteindre des objectifs de vaccination au niveau mondial et à satisfaire aux Objectifs du millénaire pour le développement, notamment le quatrième (réduire la mortalité infantile), le cinquième (améliorer la santé maternelle) et le sixième (lutter contre le VIH/SIDA, la malaria et d’autres maladies).
  • Reconnaître la responsabilité mondiale de l’immunisation face aux maladies que l’on peut éviter et soutenir le travail dans les pays ayant des difficultés à atteindre les objectifs 2012 de l’Initiative Mondiale d’éradication de la polio [2].
  • Soutenir les gouvernements nationaux ayant des populations vulnérables  courant le risque de maladies qui peuvent être prévenues par la vaccination ainsi que les agences locales œuvrant à fournir des services d’immunisation et travailler avec elles pour lever les obstacles empêchant l’accès aux services.
  • Soutenir  la recherche sur les vaccins et leur mise au point et s’impliquer via un financement adéquat dans la recherche sur les vaccins.
  • Promouvoir la vaccination et les bénéfices de l’immunisation, notamment en ciblant les populations à risques et celles qui sont difficiles d’accès.
  • Adhérer aux actions de suivi entreprises par l’OMS et d’autres autorités sanitaires.
  • Promouvoir de hautes normes dans la recherche, le développement et l’administration des vaccins afin de garantir la sécurité des patients. Les vaccins doivent être soigneusement testés avant leur mise en œuvre à grande échelle et contrôlés ensuite afin de prévenir de possibles complications et des effets secondaires indésirables. Pour leur succès, les programmes d’immunisation doivent recueillir la confiance du public, ce qui dépend de la sécurité qui y est rattachée.

Dans le cadre de la délivrance de programmes de vaccination, l’AMM recommande :

  • Un respect du calendrier complet d’immunisation pour garantir une couverture maximale. Une gestion et un suivi du  calendrier si possible par des personnes dûment formées afin d’assurer un service intégral et une prise en charge rapide et appropriée des effets secondaires des vaccins.
  • Le recours à des stratégies pour atteindre des populations pouvant être isolées, pour des raisons liées à leur localisation, leur race, leur religion, leur statut économique, leur marginalisation sociale, leur sexe et/ou leur âge.
  • S’assurer que des professionnels de santé qualifiés aient une formation complète pour assurer des vaccinations et immunisations sûres, et que ces dernières ciblent ceux en ayant le plus besoin.
  • L’éducation de la population sur les bénéfices de l’immunisation et sur la manière d’accéder à de tels services.
  • La tenue de dossiers médicaux bien à jour afin que les données pertinentes sur l’administration des vaccins et le taux de couverture soient disponibles, permettant ainsi aux politiques d’immunisation de s’appuyer sur des preuves véritables et fiables.
  • Les professionnels de santé devraient être considérés comme une population prioritaire pour bénéficier d’une immunisation compte tenu de leur exposition aux patients et aux maladies.

L’AMM appelle ses membres à agir sur les points suivants :

  • Sensibiliser davantage les populations aux calendriers nationaux d’immunisation ainsi qu’à leurs antécédents personnels (et ceux de leurs dépendants) en matière d’immunisation.
  • Travailler avec les gouvernements nationaux et locaux chargés d’alimenter et d’appliquer les programmes d’immunisation.
  • Veiller à ce que le personnel de santé chargé de vacciner et d’immuniser reçoive une formation théorique et pratique adéquate.
  • Promouvoir l’efficacité basée sur la preuve de la vaccination et sensibiliser davantage sur les bénéfices de l’immunisation aussi bien les médecins que le public.

 

Références

[1] World Health Organization and United Nations Children’s Fund. Global Immunisation Vision and Strategy, 2006-2015. Geneva, Switzerland: World Health Organization and United Nations Children’s Fund; 2005. Disponible à l’adresse: http://www.who.int/immunisation/givs/related_docs/en/index.html

[2] World Health Organization. Global Polio Eradication Initiative: Strategic Plan 2010-2012. Geneva, Switzerland: World Health Organization; 2010. Disponible à l’adresse: http://polioeradication.org/who-we-are/strategy/

Adoptée par la 63ème Assemblée Générale de l’AMM, Bangkok, Thaïlande, octobre 2012
et révisée par la 74ème Assemblée générale de l’AMM, Kigali, Rwanda, octobre 2023

 

PRÉAMBULE

Les cigarettes électroniques (e-cigarettes) et les autres inhalateurs électroniques de nicotine sont des produits destinés à fournir de la nicotine à un consommateur, sous la forme d’un aérosol. Ces produits se composent généralement d’un embout, d’un élément chauffant alimenté par une batterie rechargeable, d’une cartouche remplaçable contenant la nicotine sous forme liquide et/ou d’autres produits chimiques ainsi que d’un atomiseur qui, chauffé, transforme le contenu de la cartouche en aérosol. Cet aérosol est ensuite inhalé par le consommateur et expiré. Ces dispositifs ressemblent souvent à d’autres produits du tabac comme les cigarettes, les cigares et les pipes, ou encore à des jouets ou des appareils électroniques qui attirent les jeunes. Ils peuvent aussi ressembler à des objets de la vie courante comme des stylos ou des clés USB. Les risques que posent les inhalateurs électroniques de nicotine sont décrits en détail dans la prise de position de l’AMM sur les risques pour la santé du tabac et des produits dérivés du tabac.

La nicotine, quel que soit le mode d’exposition, peut nuire au développement du cerveau et conduire à une addiction ; Il n’existe pas de définition normalisée de la cigarette électronique et les fabricants peuvent en concevoir de types variés avec différents ingrédients. Les processus de contrôle de la qualité de la fabrication des e-cigarettes sont indigents ou inexistants et peu d’études ont été menées pour analyser la quantité de nicotine administrée au consommateur et la composition de l’aérosol ou de la vapeur produite. Le consommateur reçoit et absorbe ainsi des doses inconnues de nicotine, qui pourraient atteindre des niveaux toxiques dans son organisme, notamment chez les enfants, les adolescents et les jeunes adultes. Les e-cigarettes et les inhalateurs électroniques de nicotine peuvent également contenir d’autres ingrédients toxiques ou cancérogènes pour les êtres humains comme des solvants, du propylène glycol, du pulégone, du formaldéhyde, de l’acétaldéhyde, de l’acroléine et des métaux lourds comme du chrome, du cuivre, du zinc, de l’étain et du plomb.

Les fabricants et les vendeurs de cigarettes électroniques et d’inhalateurs de nicotine prétendent souvent que leurs produits ne présentent aucun danger ou qu’ils sont moins toxiques que le fait de fumer des cigarettes, en particulier parce que les cigarettes électroniques et les autres inhalateurs de nicotine ne produisent pas de fumée cancérogène. Aucune étude n’a cependant conclu que l’aérosol n’était pas toxique ou cancérogène. Il existe des preuves d’un risque cancérogène pour les voies respiratoires en raison de l’exposition cumulative et à long terme aux nitrosamines, à l’acétaldéhyde et au formaldéhyde. Comme pour les produits du tabac, le plus sûr reste de s’abstenir d’utiliser des cigarettes électroniques et des inhalateurs de nicotine.

Il existe déjà des preuves que les e-cigarettes et les inhalateurs de nicotine sont nocifs et dangereux. Les risques qu’ils présentent sont notamment :

  • l’appel aux enfants, aux adolescents et aux jeunes adultes, par les emballages et la publicités conçus pour attirer les personnes de ces âges, et en particulier lorsque le contenu des cartouches est aromatisé à la fraise ou au chocolat, par exemple. Ces facteurs peuvent accroître l’addiction à la nicotine chez des jeunes, et les conduire ensuite vers d’autres produits du tabac. Les emballages et les publicités conçus pour attirer les jeunes ont contribué à l’augmentation spectaculaire de l’utilisation des cigarettes électroniques et des inhalateurs électroniques de nicotine qui, dans certaines régions dépasse la consommation de cigarettes de tabac.
  • la croyance promue par les fabricants selon laquelle ces dispositifs sont des alternatives acceptables aux techniques scientifiquement prouvées de sevrage tabagique, alors que ni leur valeur en tant qu’aides thérapeutiques pour le sevrage tabagique, ni leur sécurité en tant que substituts de la cigarette ne sont établies. Les faits montrent que ces produits sont nocifs pour la santé et ne sont pas sûrs. En outre, les données relatives à l’utilisation des inhalateurs de nicotine comme moyen de réduire le tabagisme chez les adultes ne sont pas concluantes ;
  • l’opacité des doses, des processus de fabrication et des ingrédients, notamment la possibilité de détourner l’usage ou de manipuler le produit, en y ajoutant du cannabis, par exemple, et la consommation simultanée d’autres produits du tabac (double ou poly-utilisation) ;
  • le fort potentiel d’exposition toxique des enfants à la nicotine, par ingestion ou absorption dermique du contenu d’une cartouche de nicotine : les cartouches de nicotine et de liquide remplissage sont facilement accessibles sur internet et ne sont pas forcément conditionnés de manière à résister aux enfants ;
  • les issues médicales moins favorables que connaissent les utilisateurs de cigarettes électroniques atteints du SARS-CoV2.

 

RECOMMANDATIONS

  1. Les cigarettes électroniques et les inhalateurs électroniques de nicotine devraient être soumis à la convention cadre de l’OMS pour la lutte antitabac (CCLAT) et aux législations et règlementations des différentes juridictions.
  2. La fabrication et la vente de cigarettes électroniques et d’inhalateurs électroniques de nicotine devraient être soumises aux autorités de règlementation nationales soient comme nouvelle forme de produit du tabac, soit comme dispositif d’administration de stupéfiants. Au minimum, la règlementation devrait définir la teneur maximale en nicotine des liquides, la taille du réservoir des dispositifs d’inhalation, l’étiquetage des produits, et le conditionnement résistant aux enfants. Cette recommandation s’applique également aux dispositifs administrant de la nicotine de synthèse.
  3. Il conviendrait de mener des essais cliniques, des études sur de larges cohortes de population et des analyses complètes des ingrédients et des processus de fabrication des cigarettes électroniques afin de déterminer le niveau de risque qu’ils présentent, leur durabilité et leur efficacité comme aides à l’arrêt du tabac.
  4. Les cigarettes électroniques et les inhalateurs électroniques de tabac ne devraient jamais être commercialisés en tant que méthodes valables ou efficaces d’arrêt du tabac sans des recherches cliniques évaluées et validées par les organismes compétents. Dans tous les autres cas, il conviendrait que ces produits soient distribués dans un paquet neutre, conformément aux recommandations de la résolution de l’AMM sur l’emballage neutre des cigarettes, cigarettes électroniques et autres produits destinés aux fumeurs.
  5. La vente, la distribution et l’accessibilité des cigarettes et d’autres produits du tabac aux enfants et aux adolescents devraient être interdites.
  6. La production, la distribution et la vente de cartouches aromatisées pour e-cigarettes ou de bonbons qui représentent des produits du tabac ou qui y ressemblent devraient être interdites.
  7. La vente de cigarettes électroniques et d’inhalateurs électroniques de nicotine sur internet devrait être interdite afin d’empêcher les mineurs d’y avoir accès.
  8. Les médecins, notamment les praticiens en pédiatrie et les dentistes, devraient informer leurs patients des risques de l’utilisation de cigarettes électroniques et d’inhalateurs électroniques de nicotine, comme les risques d’addiction, de maladie cardiovasculaire, de maladie pulmonaire, d’effet de la nicotine sur le développement du cerveau, de dommages physiques, etc. même si les autorités compétentes n’ont pas pris position sur l’efficacité et l’innocuité de ces produits.
  9. L’AMM et ses membres devraient soutenir les recherches sur les effets nocifs des cigarettes électroniques et des inhalateurs électroniques de nicotine, notamment chez les enfants, les adolescents et les jeunes adultes.

 

Adoptée par la 63e Assemblée Générale, Bangkok, Thaïlande, Octobre 2012
et révisée
par la 68e Assemblée générale, Chicago, Etats-Unis, Octobre 2017

 

PRÉAMBULE

1.    Les progrès de la médecine, notamment des techniques chirurgicales, de la détermination des groupes tissulaires et des médicaments immunosuppresseurs ont permis d’augmenter de manière significative le taux de succès des transplantations d’organes et de tissus humains. Dans tous les pays, la pénurie de donneurs d’organes a toutefois pour conséquence que des décès ne peuvent être évités. Les Associations médicales nationales devraient encourager les tentatives visant à accroître le nombre de donneurs d’organes dans leurs pays tout en veillant à ce que les plus hautes normes éthiques soient préservées. L’Association médicale mondiale a conçu cette politique pour aider les associations médicales, les médecins, les autres prestataires de soins et les décideurs politiques à atteindre cet objectif.

Cette politique est basée sur un nombre de principes éthiques clés : altruisme, autonomie, bienfaisance, équité et justice. Ces principes devraient guider les personnes qui sont chargées d’élaborer des politiques nationales et celles qui en bénéficient aux fins de l’obtention d’organes et de la distribution et transplantation d’organes de donneurs. Tous les systèmes et procédés devraient être transparents et ouverts à un contrôle.

Cette prise de position s’applique au don d’organes et de tissus à la fois des personnes décédées et des donneurs en vie. Elle ne traite pas du don de sang.

SENSIBILISATION DU GRAND PUBLIC

2.    Il est important que les gens prennent conscience qu’ils ont la possibilité de faire un don et de choisir de donner ou non des organes ou des tissus avant ou après leur mort. La prise de conscience et le choix devraient être facilités via une approche coordonnée et multidimensionnelle, par toutes les parties intéressées et par des moyens dont la sensibilisation par les médias et des campagnes publiques. En élaborant de telles campagnes, il convient de prendre en compte toutes les sensibilités religieuses ou culturelles de l’audience ciblée.

3.    Par des campagnes de sensibilisation, la population devrait être informée des bénéfices de la transplantation, de l’impact sur la vie de ceux qui sont en attente d’une greffe et de la pénurie d’organes disponibles. Les gens devraient être encouragés à réfléchir à leurs propres souhaits en matière de don, à discuter de leurs souhaits avec leur famille et amis et à utiliser les mécanismes existants pour les consigner de manière formelle en choisissant d’être, ou non, donneur.

4.    L’AMM se déclare en faveur du choix éclairé du donneur. Dans des pays ayant adopté ou envisageant une politique de « consentement présumé », c’est-à-dire qui prévoit que sauf stipulation contraire, la personne est supposée volontaire pour faire un don, ou de « choix mandaté » c’est-à-dire lorsque toutes les personnes sont priées de déclarer si elles veulent faire un don, les Associations médicales nationales doivent faire tout ce qui est en leur pouvoir pour veiller à ce que de telles politiques soient rendues publiques et ne limitent pas le choix éclairé du donneur, y compris le droit du patient de ne pas donner.

5.    Il conviendrait de créer des registres nationaux de donneurs pour établir et maintenir une liste de citoyens qui ont choisi soit de donner, soit de ne pas donner leurs organes ou leurs tissus. Un tel registre doit protéger la vie privée et la possibilité pour chaque personne d’avoir un droit de regard sur la compilation, l’utilisation, la divulgation et l’accès à ses données de santé, à d’autres fins. Des dispositions doivent exister afin que la décision de s’enregistrer soit bien informée et que les personnes qui s’enregistrent puissent se retirer des listes facilement, rapidement et sans pénalité.

6.    Le don d’organes de son vivant est une composante de plus en plus importante des programmes de transplantation dans de nombreux pays. La plupart des dons de son vivant se font au bénéfice des proches ou de personnes dont on est émotionnellement proches et peu de gens donnent à des personnes qu’ils ne connaissent pas, mais leur nombre augmente malgré tout. Cela dit, le don d’organes de son vivant n’est pas sans risque pour la santé et des contrôles et des précautions sont de rigueur. Les informations visant à faire savoir qu’il est possible de faire un don d’organe de son vivant devraient être soigneusement rédigées afin de ne pas faire pression sur les éventuels donneurs et de réduire les risques de coercition, financière ou autre. Les donneurs potentiels devraient savoir où trouver des informations détaillées sur ce qu’implique le don, devraient être informés sur les risques y afférents et savoir qu’il existe des mesures de précaution pour protéger les donneurs.

PROTOCOLES APPLICABLES AU DON D’ORGANES ET DE TISSUS PRÉLEVÉS SUR DES DONNEURS DÉCÉDÉS

7.    L’AMM encourage ses membres à soutenir l’établissement de protocoles complets et coordonnés au niveau national pour l’obtention d’organes et de tissus, en consultation et en coopération avec toutes les parties intéressées. Les questions éthiques, culturelles et sociétales liées au don et à la transplantation devraient être réglées, si possible, via un processus ouvert impliquant un débat public étayé par des preuves solides.

8.    Les protocoles nationaux devraient fournir des informations détaillées sur l’identification, les références et la gestion des donneurs potentiels ainsi que sur la communication avec les proches des personnes décédées. Les protocoles devraient défendre les principes clés suivants :

  • La décision d’interrompre ou d’arrêter un traitement destiné à prolonger la vie devrait reposer sur une évaluation des bénéfices de ce traitement pour le patient. Une telle décision doit être totalement indépendante de toute décision de don et doit être considérée comme telle.
  • Le constat du décès devrait être établi selon les directives nationales et comme souligné dans la déclaration de Sydney de l’AMM sur la détermination de la mort et le prélèvement d’organes.
  • L’équipe soignante et l’équipe chargée de la greffe devraient être deux équipes bien distinctes. En particulier, le médecin qui constate ou certifie le décès d’un donneur potentiel ne devrait pas être impliqué dans la procédure de transplantation. Il ne devrait pas non plus avoir la responsabilité de soigner le receveur d’organe.
  • Les pays qui effectuent des dons après une mort cardiaque ou circulatoire devraient disposer de protocoles spécifiques et détaillés pour cette procédure.
  • Lorsqu’une personne a exprimé un souhait clair et déterminé de donner ses organes ou ses tissus après sa mort, des mesures devraient être prises pour faciliter cette volonté autant que possible. Cette responsabilité incombe à l’équipe traitant le patient mourant.
  • L’AMM considère que les souhaits du donneur potentiel sont prioritaires. Les parents et les proches du patient devraient être vivement encouragés à défendre le souhait exprimé avant sa mort de donner des organes ou des tissus. Lorsque cela est possible, il est souhaitable d’aborder ces sujets avant le décès du patient.
  • Les personnes chargées d’en parler avec le patient, les membres de la famille ou d’autres personnes désignées pour prendre des décisions sur le don d’organes et de tissus devraient avoir à la fois les connaissances, les compétences et la sensibilité requises pour prendre part à ce type d’entretien. Les étudiants en médecine et les médecins en exercice devraient s’efforcer de se former à cette tâche et les autorités appropriées devraient fournir les ressources nécessaires pour assurer une formation correcte.
  • Le don doit n’être soumis à aucune condition. Dans des cas exceptionnels, la demande de donneurs potentiels ou de personnes désignées pour décider à leur place souhaitant qu’un organe ou un tissu soit donné à un bénéficiaire particulier peut être prise en compte si la législation nationale le permet. Les donneurs cherchant à instaurer des conditions qui pourraient être discriminatoires vis-à-vis de certains groupes devraient être refusés.

9.    Les hôpitaux et les autres institutions où sont réalisés des dons devraient veiller à ce que les protocoles de don soient rendus publics auprès de ceux qui sont susceptibles de les utiliser et veiller à ce que les ressources soient disponibles pour leur application. Ils devraient également encourager une culture favorable au don, pour qu’au sein de l’institution, la vérification d’une éventuelle déclaration de don devienne une procédure habituelle plutôt qu’une exception lorsqu’un patient décède.

10. Les coordinateurs d’une transplantation ont un rôle capital à jouer dans le don d’organes. Ils sont les intermédiaires clés entre la famille en deuil et l’équipe chargée de la prise en charge du don. Habituellement, ils s’occupent de la logistique complexe qui permet que le don puisse avoir lieu. Leur rôle doit être reconnu et soutenu.

11. Le don d’un organe d’une personne décédée devrait être considéré comme un cadeau, librement et volontairement offert. Il devrait impliquer le consentement volontaire et sans contrainte, donné par la personne avant son décès (en se déclarant donneur ou non donneur, en fonction de la juridiction) ou sur l’autorisation volontaire des proches du patient décédé si les souhaits de la personne n’étaient pas connus. L’AMM s’oppose fermement à la commercialisation des dons et des transplantations.

12. Les donneurs potentiels ou les personnes qui peuvent prendre à leur place les décisions concernant leur santé devraient bénéficier d’informations suffisamment précises et pertinentes, y compris par l’intermédiaire de leurs médecins généralistes. Normalement, ces informations devraient comporter les éléments suivants :

  • les procédures et les définitions liées à la détermination du décès ;
  • les tests à effectuer pour déterminer la compatibilité des organes ou des tissus pour les greffes et les éventuels risques imprévisibles pour les donneurs potentiels et leurs familles ;
  • les mesures éventuellement nécessaires pour préserver la fonction des organes jusqu’à la mort et la greffe ;
  • le devenir du corps une fois le décès constaté ;
  • les organes et tissus qui peuvent être donnés ;
  • le protocole qui sera suivi dans l’éventualité d’un refus de don de la part de la famille ;
  • la possibilité de retirer son consentement et la marche à suivre pour ce faire.

13. Les donneurs potentiels ou les personnes habilitées à prendre à leur place les décisions qui les concernent en matière de santé devraient pouvoir poser des questions sur le don et devraient obtenir une réponse compréhensible et formulée avec tact.

14. Lorsqu’on compte prélever à la fois des organes et des tissus sur le donneur, il convient de donner les informations correspondantes et d’obtenir le consentement des proches de la personne décédée pour les deux à la fois, afin de réduire, autant que possible, leur détresse et leur trouble.

15. Dans certaines parties du monde, la famille du donneur reçoit une contribution pour les frais funéraires. Cela peut être vu soit comme une reconnaissance de leur acte altruiste soit comme une rémunération compromettant le caractère volontaire et altruiste du don. L’interprétation peut en partie dépendre de la façon dont le don est fait et géré. Si l’on envisage un tel système, il est nécessaire de veiller à ce que les principes clés de l’altruisme, de l’autonomie, de la bienfaisance, de l’équité et de la justice soient respectés.

16. La prise de décision libre et éclairée nécessite non seulement de disposer d’informations, mais également de ne pas subir de coercition. Tout soupçon de pression ou de contrainte doit être dissipé avant que ne soit prise la décision de donner ou non des organes ou des tissus.

17. Les détenus et les autres personnes qui sont incarcérées dans une quelconque institution devraient avoir la possibilité de faire un don d’organe après leur décès à condition que toutes les précautions aient été prises pour assurer que ce don est conforme à leur volonté préalable et non contrainte. Lorsque le détenu ou la personne incarcérée n’est pas en mesure de donner son consentement, il convient que l’autorisation soit donnée par un membre de sa famille ou une autre personne habilitée à prendre cette décision. Une telle autorisation ne saurait prévaloir sur un refus ou un retrait préalable du consentement.

18. Le décès doit être lié à une cause naturelle et vérifiable.

19. Dans les juridictions où la peine de mort est appliquée, les prisonniers exécutés ne doivent pas être considérés comme des donneurs d’organes et/ou de tissus. Il peut y avoir des cas particuliers où les prisonniers agissent volontairement et sans pression, mais il est impossible de mettre en place des précautions adéquates pour protéger systématiquement les détenus contre la coercition.

ATTRIBUTION D’ORGANES DE DONNEURS DÉCÉDÉS

20. L’AMM considère que des politiques explicites, accessibles au public, devraient exister sur tous les aspects du don et de la greffe d’organes et/ou de tissus, y compris la gestion des listes de malades en attente de greffe afin d’assurer une attribution juste et adaptée.

21. Les politiques de gestion des listes d’attente devraient être efficaces et loyales. Les critères à prendre en compte dans l’attribution d’organes ou de tissus comprennent :

  • la gravité et l’urgence des besoins médicaux ;
  • le temps de présence sur la liste ;
  • les chances médicales de réussite de la greffe, mesurées via des facteurs tels que le type de maladie, les améliorations probables de la qualité de vie, les autres complications et l’histocompatibilité.

22. Il ne saurait y avoir aucune discrimination basée sur le statut social, le mode de vie ou le comportement. Aucun critère non médical ne saurait être pris en compte.

PROTOCOLES APPLICABLES AU DON D’ORGANES ET DE TISSUS PRÉLEVÉS SUR DES DONNEURS VIVANTS

23. Le don de son vivant est de plus en plus fréquent, pour pallier la pénurie d’organes de donneurs décédés. Dans la plupart des cas, les donneurs fournissent des organes à un membre de leur famille ou à une personne dont ils sont émotionnellement proches. Un petit nombre de personnes choisissent de donner un organe par altruisme à un inconnu. Il existe également la possibilité du don croisé ou collectif : un ou plusieurs ensembles de donneurs/receveurs sont incompatibles entre eux, mais font un don à une personne et leur proche reçoit d’une autre personne (par exemple, le donneur A donne au receveur B, le donneur B donne au receveur C et le donneur C donne au receveur A).

24. Les donneurs potentiels devraient avoir des informations précises et à jour sur la procédure et les risques liés au don et devraient pouvoir en discuter en privé avec un membre de l’équipe soignante ou un conseiller. Normalement, ces informations comprennent :

  • les risques que suppose le fait d’être un donneur vivant ;
  • les tests menés pour évaluer la compatibilité du donneur et les problèmes de santé non anticipés ;
  • ce qui se passe avant, pendant et après le don ;
  • dans le cas d’organes solides, les conséquences à long terme d’une vie sans l’organe donné.

25. Les donneurs potentiels devraient pouvoir poser des questions sur le don et devraient obtenir une réponse à leurs questions qui soit compréhensible et formulée avec tact.

26. Des procédures supplémentaires devraient exister pour veiller à ce que de tels donneurs agissent librement, sans pression ni contrainte. Afin d’éviter que les donneurs soient payés et se fassent connaître, il conviendrait d’effectuer des contrôles indépendants et d’annuler le don si les preuves d’un don réel et anonyme ne sont pas réunies. De tels contrôles devraient être indépendants de l’équipe chargée de la greffe et de celle prenant en charge le receveur potentiel.

27. Les donneurs vulnérables devraient être protégés par des précautions supplémentaires, y compris, mais sans s’y limiter, les personnes considérées comme dépendantes (comme les mineurs capables donnant à un parent, à une sœur ou à un frère).

28. Les prisonniers devraient être autorisés à être des donneurs de leur vivant, mais seulement dans des circonstances exceptionnelles, aux membres de leur famille proche ou aux personnes dont ils sont émotionnellement proches. Il conviendrait de prouver la relation alléguée avant d’effectuer le don. Lorsque les prisonniers sont considérés comme des donneurs de leur vivant, des précautions ad hoc sont requises pour s’assurer que leur acte est volontaire et exempt de contrainte.

29. Ceux qui ne sont pas capables de donner leur consentement ne devraient pas être considérés comme des donneurs de leur vivant en raison de leur incapacité à comprendre et à décider de manière volontaire. Des exceptions sont éventuellement possibles dans des circonstances très exceptionnelles, et après une étude juridique et éthique.

30. Les donneurs ne doivent pas subir de perte financière liée à leur don et devraient donc être remboursés de leurs frais généraux et de leurs dépenses médicales ainsi que de toute perte de revenus.

31. Dans certaines parties du monde, des personnes sont rémunérées pour donner un rein même si dans presque tous les pays, la vente d’organes est illégale. L’AMM s’oppose fermement à un marché d’organes.

PROTOCOLES APPLICABLES AUX RECEVEURS

32. Les protocoles de prise de décision libre et éclairée devraient être respectés pour les receveurs d’organes ou de tissus. Normalement, ces informations comportent les éléments suivants :

  • les risques de la procédure ;
  • la survie probable à court, moyen et long terme, la morbidité et la qualité de vie prévisible ;
  • les solutions autres que la greffe ;
  • la manière dont les organes et les tissus sont obtenus.

33. Dans le cas d’un retard dans le diagnostic d’une infection, d’une maladie ou d’un cancer du donneur, on devrait pouvoir présumer sans risque de se tromper que le receveur sera informé de tout risque auquel il pourrait avoir été exposé. La décision individuelle de divulgation doit tenir compte des circonstances particulières, y compris le niveau et la gravité du risque. Dans la plupart des cas, il convient de signaler les risques encourus, de manière respectueuse et délicate.

COÛTS ET ORIGINE DES ORGANES ET DES TISSUS

34. Les organes ou les tissus suspectés d’avoir été obtenus par des transactions commerciales ne doivent pas être acceptés pour des greffes.

35. Les organes et les tissus ne doivent pas être vendus pour faire du profit. Dans le calcul du coût de la greffe, les frais liés à l’organe ou au tissu lui-même devraient se limiter aux coûts directement associés à son prélèvement, sa conservation, son attribution et sa transplantation.

36. Les chirurgiens effectuant les greffes devraient veiller à ce que les organes et les tissus qu’ils transplantent aient été obtenus conformément aux dispositions de cette politique et ne devraient pas greffer des organes et des tissus en sachant ou en soupçonnant qu’ils ont été obtenus d’une manière frauduleuse et non éthique.

TRANSPARENCE ET RESPONSABILITÉ

37. Les Associations médicales nationales devraient travailler avec le gouvernement dont elles dépendent et les institutions compétentes pour assurer qu’il existe des structures et des procédures adaptées et efficaces aux fins :

  • de soutenir les mesures de traçabilité et de suivi permettant de vérifier que tous les bénéficiaires d’une transplantation et les donneurs vivants, y compris ceux qui requièrent un suivi médical permanent, reçoivent les soins et le soutien dont ils ont besoin ;
  • de compiler les informations relatives au nombre de dons et de transplantations et aux résultats obtenus ;
  • d’évaluer les résultats à court et à long terme, la qualité, la sécurité et l’efficacité des activités de dons et de transplantation d’organes ;
  • d’évaluer l’adhésion aux protocoles éthiques et cliniques des activités de dons et de transplantation d’organes.

38. Les données relatives à ces activités doivent être publiques et contrôlables (sans préjudice d’une protection adéquate de la vie privée des donneurs et des receveurs).

OPTIONS FUTURES

39. Les mesures de santé publique visant à réduire les besoins de greffe d’organes devraient être considérées comme une priorité, de même que les initiatives visant une plus grande efficacité et meilleure réussite des systèmes de don d’organes.

40. Les nouvelles évolutions et possibilités comme la xénogreffe et l’utilisation de cellules souches pour réparer les organes endommagés devraient faire l’objet d’un suivi attentif. Avant leur application clinique, de telles technologies devraient être soumises à des études scientifiques et de stricts contrôles de sûreté ainsi qu’à une étude éthique. Lorsque, comme c’est le cas avec la xénotransplantation, il existe des risques potentiels qui s’étendent au-delà des receveurs, ce procédé doit faire l’objet d’un débat public.

Adoptée par la 63ème Assemblée Générale de l’AMM, Bangkok, Thaïlande, octobre 2012
Et révisée par la 73ème Assemblée Générale de l’AMM, Berlin, Allemagne, octobre 2022

PRÉAMBULE

La violence s’est considérablement accrue dans le secteur de la santé depuis le début du millénaire, et tout particulièrement pendant la pandémie de COVID-19. Toute personne a le droit de travailler dans un environnement sûr sans être menacée de violence. La violence sur le lieu de travail peut être physique ou non. Il peut également s’agir de violence psychologique, d’intimidation, de cyberharcèlement, entre autres.

Le cyber-harcèlement et le harcèlement sur les médias sociaux comprennent notamment les menaces et les intimidations en ligne à l’encontre des médecins qui prennent part à un débat public afin de donner des informations adéquates et de lutter contre la désinformation. Ces médecins sont de plus en plus confrontés, entre autres, à des messages malveillants sur les médias sociaux, à des menaces de mort et à des visites à domicile menaçantes.

Aux fins de la présente politique, nous utiliserons la définition de la violence de l’OMS : « la menace ou l’utilisation intentionnelle de la force physique ou du pouvoir contre soi-même, contre autrui ou contre un groupe ou une communauté qui entraîne ou risque fortement d’entraîner un traumatisme, un décès, des dommages psychologiques, un maldéveloppement, ou des privations ».

Outre les nombreuses conséquences sur la santé de la victime, les effets sociaux de la violence contre le personnel de santé peuvent être destructeurs, en ce qu’ils touchent l’ensemble du système de santé et compromettent la qualité de cet environnement de travail, dégradant in fine la qualité des soins aux patients. En outre, la violence peut mettre en péril la disponibilité des soins de santé, notamment dans les zones défavorisées.

Tandis que la violence sur le lieu de travail est sans nul doute un problème global, il convient de tenir compte de plusieurs différences culturelles entre les pays pour comprendre exactement le concept de violence à un niveau universel. Des différences significatives existent entre les caractéristiques de différents niveaux de violence et les formes spécifiques de violence sur le lieu de travail qui sont les plus susceptibles de se produire. Il peut s’ensuivre une tolérance à l’égard de certains niveaux de violence sur les lieux de travail. Il est toutefois reconnu que les menaces et les autres formes de violence psychologique sont plus courantes que la violence physique.

Les causes de la violence dans les établissements de soins de santé sont extrêmement complexes. Plusieurs études ont identifié des déclencheurs courants d’actes de violence commis par les patients ou leurs proches, parmi lesquels les retards d’administration d’un traitement, l’insatisfaction face au traitement délivré, un comportement agressif du patient en raison de son état de santé, des médicaments qu’il prend ou de sa consommation d’alcool ou d’autres drogues. En outre, des personnes peuvent menacer ou commettre des violences contre le personnel de santé parce qu’elles s’opposent à des pratiques médicales spécifiques en raison de croyances sociales, politiques ou religieuses. Des cas de violence commise par des témoins sont également signalés. Les violences commises par des collègues, comme des actes d’intimidation, y compris des « cérémonies d’initiation », des bizutages, des « plaisanteries » ou des actes de harcèlement constituent un autre aspect important de la violence sur le lieu de travail dans le domaine de la santé.

La résolution d’un tel problème exige la collaboration de plusieurs acteurs, notamment les gouvernements, les associations médicales, les hôpitaux, les services de santé généralistes, les directions d’établissements, les compagnies d’assurance, les formateurs, les enseignants, les chercheurs, les médias, la police et les autorités compétentes ainsi qu’une approche plurielle tenant compte de la législation, de la sécurité, du recueil de données, de l’enseignement et la formation, des facteurs environnementaux, de la sensibilisation du grand public et des incitations financières. En qualité de représentantes des médecins, les associations médicales devraient jouer un rôle proactif dans la lutte contre les violences dans le secteur de la santé et encourager les acteurs clés à agir pour à la fois protéger la qualité de l’environnement de travail pour le personnel de santé et la qualité des soins des patients.

 

RECOMMANDATIONS

L’AMM condamne fermement toute forme de violence contre le personnel et les établissements de santé, ce qui comprend les actes de violence commis par des collègues, les comportements agressifs de patients ou de membres de leur famille ainsi que les intentions malveillantes de toute personne et appelle ses membres constituants, les autorités de santé et toutes les autres parties intéressées à agir en adoptant une approche collaborative, coordonnée et efficace.

Élaboration de politiques

  1. L’État a l’obligation d’assurer la sécurité et la sûreté des patients, médecins et des autres personnels de santé. Cela passe par assurer un environnement adéquat.
  2. Les gouvernements devraient assurer un cadre qui permette de faire de la prévention et de l’élimination de la violence sur les lieux de travail dans le secteur de la santé un aspect essentiel des politiques nationales, régionales et locales de santé et de sécurité au travail, de la protection des droits humains, des normes de gestion des établissements de santé et de l’égalité entre les sexes.

Finances

  1. Les gouvernements devraient allouer des fonds suffisants et durables à la lutte contre la violence dans le secteur de la santé pour que celle-ci soit efficace.

Protocoles de lutte contre les situations de violence dans les établissements de santé

  1. Les établissements de santé devraient adopter une politique de tolérance zéro vis-à-vis de la violence sur le lieu de travail, en évitant qu’elle se normalise. Pour ce faire, ils devraient élaborer et mettre en œuvre des protocoles adéquats qui comprennent :
  • un programme prédéterminé pour maintenir la sécurité sur le lieu de travail, y compris en reconnaissant que la violence non physique constitue un facteur de risque de violence physique ;
  • un plan d’action conçu pour permettre au personnel de santé de réagir face à la violence ;
  • une stratégie renforcée de communication interne, qui implique le personnel dans les décisions qui concernent sa sécurité ;
  • un système de signalement et de recensement des actes de violence, qui pourrait comprendre également le signalement aux autorités judiciaires ou à la police ;
  • un moyen d’assurer que les employés qui signalent des actes de violence ne fassent pas l’objet de représailles.
  1. Afin que ces protocoles soient efficaces, la gestion et l’administration des établissements de santé devraient communiquer et prendre les mesures nécessaires pour assurer que l’ensemble du personnel connaît ces protocoles. Les cadres et les superviseurs devraient être poussés à afficher une politique de tolérance zéro contre la violence dans les établissements de santé.
  2. Les patients souffrant de troubles mentaux chroniques ou provoqués par une maladie ou un autre état de santé peuvent agir violemment vis-à-vis du personnel de santé : les personnes qui prennent en charge ces patients doivent être correctement protégées. Hormis dans les cas d’urgence, les médecins pourraient avoir le droit de refuser un patient. Dans une telle situation, il leur incomberait d’assurer que les autorités compétentes trouvent une solution pour poursuivre le traitement du patient et préserver sa santé.

Enseignement/formation

  1. Un personnel bien formé et vigilant soutenu par sa direction peut efficacement dissuader les actes de violence. Les membres constituants devraient travailler avec les établissements de formation initiale et continue pour assurer que le personnel de santé soit formé aux compétences suivantes : communication, empathie, gestion des personnes potentiellement violentes et des situations à haut risque en vue de prévenir les incidents violents.
  2. La formation continue devrait transmettre les principes éthiques des soins de santé et la culture de relations médecin-patient fondées sur le respect et la confiance mutuelle. Cela permettrait non seulement d’améliorer la qualité des soins aux patients, mais aussi de favoriser les sentiments de sécurité, ce qui se traduirait par une réduction du risque de violence.

Communication et sensibilisation

  1. Les associations médicales, les autorités de santé et les autres parties intéressées devraient travailler ensemble à sensibiliser le grand public à la violence dans le secteur de la santé en créant des réseaux spécialisés et d’information dans ce domaine. Le cas échéant, le personnel de santé et le grand public devraient être informés des actes de violence perpétrés.
  2. Les agences de diffusion, les journaux et les autres médias sont encouragés à vérifier soigneusement leurs sources afin de respecter les normes les plus exigeantes d’information et de journalisme professionnel. Les sociétés propriétaires des réseaux sociaux et les acteurs associés devraient également prendre des mesures actives pour créer un environnement exempt de cyberviolence pour leurs utilisateurs. Cela suppose de renforcer des politiques de protection des données des utilisateurs, de manière à rendre simple et accessible le signalement de ces violences et d’inciter les forces de l’ordre à agir lorsqu’elles sont sollicitées.

Sécurité

  1. Il convient de mettre en place des mesures de sécurité dans tous les établissements de santé et de faire des actes de violence une priorité majeure des forces de l’ordre. Il conviendrait de procéder à un audit du risque de violence « ordinaire » afin d’identifier les postes et les lieux qui sont les plus susceptibles de faire face à des violences, notamment là où de tels actes ont déjà eu lieu et d’identifier les faiblesses dans la sécurité des établissements. Parmi les zones à haut risque, on peut penser aux locaux de médecine généraliste, aux établissements de santé mentale et aux zones de forte affluence des hôpitaux comme les urgences.
  2. Le risque de violence peut être contenu par des moyens variés, qui comprennent le recours à du personnel de sécurité dans les zones à risque et à l’entrée des bâtiments, l’installation de caméras et d’alarmes à disposition du personnel de santé, l’utilisation d’éléments distinctifs pour identifier le personnel, le maintien d’un éclairage suffisant dans les zones de travail, qui contribuent à un environnement sûr et favorable à la vigilance. Il conviendrait d’envisager la mise en place d’un système de détection des armes sur les patients et les visiteurs à l’entrée de certaines zones, notamment les zones à risque.

Soutien aux victimes

  1. Il conviendrait d’assurer un soutien médical, psychologique et juridique adéquat aux victimes de violences. Un tel soutien devrait être gratuit pour l’ensemble du personnel de santé.

Enquête

  1. Tous les cas de violence devraient donner lieu à une enquête afin de mieux en comprendre les causes et d’aider à la prévention de violences futures. Les enquêtes pourraient mener à la poursuite des auteurs de violences par la voie civile ou pénale. La procédure devrait être menée par les personnes compétentes des forces de l’ordre et ne devrait pas exposer la victime à d’autres souffrances physiques ou psychologiques.

Recueil de données

  1. Il conviendrait de créer des systèmes de signalement appropriés pour permettre au personnel de santé de dénoncer les menaces et les incidents violents anonymement et sans risques de représailles. Un tel système devrait permettre d’évaluer le nombre, le type et la gravité des incidents violents au sein d’une institution et les dommages qui en résultent. Le système devrait être utilisé pour analyser l’efficacité des stratégies préventives. Les données agrégées et les analyses devraient être mises à la disposition des organisations des professionnels de santé et des autres parties intéressées.

Adoptée par la 10ème Assemblée Médicale Mondiale, La Havane, Cuba, octobre 1956
ratifiée par la 11ème Assemblée Médicale Mondiale, Istanbul, Turquie, octobre 1957
révisée par la 35ème Assemblée Médicale Mondiale, Venise, Italie, octobre 1983 et la 55ème Assemblée Générale de l’AMM, Tokyo, Japon, octobre 2004
rédaction révisée à la 173ème Session du Conseil, Divonne les Bains, France, mai 2006, et
révisée par la 63ème Assemblée Générale, Bangkok, Thaïlande, octobre 2012 et par la 74ème Assemblée générale de l’AMM, Kigali, Rwanda, octobre 2023*


* Les règles de l’AMM en temps de conflit armé et autres situations de violence adoptées en 1956 ont été requalifiées en ‘Prise de position’ par la 63ème Assemblée générale, Kigali, Rwanda, octobre 2023

 

PRÉAMBULE

La mission première de la profession médicale est de promouvoir la santé et de sauver des vies. Les médecins sont d’abord engagés vis-à-vis de leurs patients. Pour l’ensemble de leurs activités professionnelles, les médecins devraient adhérer aux conventions internationales relatives aux droits humains, au droit international humanitaire et à la Déclaration de Genève de l’AMM, au Code international d’éthique médicale et aux autres déclarations de l’AMM sur l’éthique médicale[1] comme aux principes éthiques applicables aux soins de santé en temps de conflit et autres situations d’urgence élaborés par des organisations de santé civiles et militaires, y compris l’AMM, à l’initiative du Comité international de la Croix-Rouge.

Dans les situations de conflit armé et les autres situations de violence, les gouvernements, les belligérants et les autres acteurs en position de pouvoir doivent se conformer à leurs obligations au titre du droit international, y compris, le cas échéant, Conventions de Genève (1949) et ses protocoles additionnels (1977, 2005).

Cette obligation suppose la protection des personnels et des établissements de santé (voir par exemple la Déclaration de l’AMM sur la protection et l’intégrité du personnel médical pendant les conflits armés et les autres situations de violence, 2022), y compris les moyens de transport de blessés et de malades, le personnel de santé et les équipements médicaux.

Cette obligation comprend également la condamnation de la prise pour cibles d’infrastructures et de personnels de santé et l’utilisation du refus de services médicaux, y compris comme tactique ou stratégie par l’une des parties au conflit, quand et où qu’elle ait lieu.

L’AMM promeut des mécanismes de compte rendu efficaces, sûrs et objectifs pourvus des ressources nécessaires suffisantes pour recueillir et diffuser les données relatives aux attaques commises contre des médecins et des personnels et des établissements de santé afin de fournir à l’OMS et aux autres agences compétentes le soutien nécessaire pour remplir leur rôle de recension des attaques perpétrées contre des personnels et des établissements de santé.

Les attaques contre le personnel de santé doivent faire l’objet d’une enquête et leurs auteurs doivent être traduits en justice, c’est pourquoi il convient d’utiliser ou, le cas échéant, d’élaborer des mécanismes de répression adéquats et de garantir les ressources nécessaires.

Les médecins doivent se voir accorder l’accès à toutes les personnes qui ont besoin de soins, y compris les personnes privées de liberté.

Il incombe aux médecins de faire pression sur les gouvernements et les autres autorités compétentes afin d’obtenir les infrastructures et les équipements nécessaires à la santé et aux soins de santé, notamment de l’eau potable, de l’alimentation et des abris adéquats, des infrastructures ad hoc, du matériel médical à disposition du personnel de santé et les équipements de protection personnelle (EPP) nécessaires.

Lorsqu’un conflit se révèle imminent et inévitable, il incombe aux autorités compétentes de garantir la protection des infrastructures de santé et de prévoir les réparations nécessaires dans la période suivant immédiatement le conflit.


Respect des règles éthiques professionnelles

En temps de conflit armé et d’autres situations de violence, les normes éthiques de la profession médicale s’appliquent de la même manière qu’en temps de paix. L’obligation professionnelle de traiter les gens avec humanité et respect s’applique à tous les patients. Un médecin doit toujours agir conformément à la neutralité médicale et dispenser les soins nécessaires en toute impartialité et sans discrimination.

Les médecins ne sauraient être persécutés pour avoir respecté leurs obligations éthiques et ne sauraient être forcés par des gouvernements, des forces armées ou tout autre autorité d’agir de manière contraire aux règles éthiques de la profession médicale.

La vie privée des personnes malades, blessées ou décédées doit toujours être respectée, de même que la confidentialité.

Les soins de santé dispensés aux malades et blessés, civils comme combattants ne sauraient être utilisés à des fins de publicité ou de propagande.

Les médecins ne sauraient propager de fausses informations ou manipuler des faits auprès du grand public, des médias ou des réseaux sociaux.

Les facultés de médecine et l’internat devraient comporter une formation éthique sur le traitement médical des prisonniers de guerre et des détenus.

 

RECOMMANDATIONS

Dans les situations de conflit et les autres situations de violence, le médecin s’engage :

Principes généraux

  1. à ne pas prendre part aux hostilités et à refuser tout ordre illégal ou contraire à l’éthique ;
  2. à s’abstenir de commettre ou de participer à des violations du droit international ;
  3. à ne pas abandonner une personne blessée ou malade, tout en tenant compte de la sécurité et des compétences du médecin et de la disponibilité d’autres possibilités de soins ;
  4. à promouvoir la neutralité médicale en défendant et en assurant des soins efficaces et impartiaux aux patients, sans discrimination et sans distinction entre les patients qui ne soit pas fondée sur des faits cliniques ;
  5. à porter une attention spéciale aux fractions les plus vulnérables ou marginalisées de la population ayant besoin de soins (par exemple les femmes, les enfants, les personnes âgées, les personnes présentant des besoins de soins spécifiques, les personnes déplacées) et à leurs besoins de santé particuliers tout en adhérant au principes applicables au tri des patients ;
  6. à respecter les personnes blessées ou malades, leur autonomie, leur confiance et leur dignité ;
  7. à respecter la confidentialité médicale, conformément à la Déclaration de Genève et au Code international d’éthique médicale;
  8. à examiner soigneusement tout conflit de loyauté ou tout conflit d’intérêts dans lequel le médecin pourrait se trouver ;

Détention

  1. à prodiguer des soins de santé à toute personne détenue ;
  2. à plaider pour des visites régulières des prisons et des prisonniers par les médecins ;
  3. à ne jamais cautionner, faciliter ou participer à un acte de torture ou à toute forme de traitement ou peine cruel, inhumain ou dégradant, ni à aucune forme de mauvais traitement, y compris l’alimentation forcée, la traite d’êtres humains ou le trafic d’organes ;
  4. conformément au Code international d’éthique médicale de l’AMM, à la déclaration de Tokyo de l’AMM, à la prise de position de l’AMM sur la responsabilité des médecins en matière de compte rendu et de dénonciation des actes de torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, au protocole d’Istanbul et aux règles minima des Nations unies pour le traitement des détenus (les règles Nelson Mandela), à dénoncer les actes de torture et les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Activités proscrites

  1. ne jamais utiliser la situation ou la vulnérabilité d’une personne malade ou blessée ;
  2. ne jamais utiliser les droits et installations relevant des soins de santé à d’autres fins que celles qui sont prévues;

Santé publique

  1. à signaler les besoins en matière de soins de santé aux autorités compétentes ;
  2. à respecter les obligations légales épidémiologiques de signalement aux autorités compétentes ;
  3. à respecter les déclarations de l’AMM d’Helsinki et de Taipei sur la recherche et la gestion des données ;
  4. à dénoncer toute pratique malhonnête telle que la distribution de médicaments et d’équipements de mauvaise qualité ou contrefaits et à intervenir en conséquence ;
  5. à tenir compte des traumatismes psychiques causés par la guerre dans les soins qu’il apporte aux patients, aux personnes déplacées à l’intérieur de leur pays et aux réfugiés.

 

[1] Déclaration de l’AMM sur la protection et l’intégrité du personnel médical dans les conflits armés et autres situations de violence / Prise de position de l’AMM sur les conflits armés

Adoptée par la 63ème Assemblée Générale de l’AMM, Bangkok, Thaïlande, octobre 2012
Et réaffirmée avec des révisions mineures par le 221ème Conseil de l’AMM, Berlin, Allemagne, octobre 2022

 

PRÉAMBULE

Ces dernières années, dans les pays où les médecins sont de moins en moins satisfaits de leurs conditions de travail, il est de plus en plus fréquent de les voir organiser des actions collectives pour en réclamer de meilleures.

Les médecins peuvent manifester, faire grève ou encore démissionner collectivement, afin d’améliorer leurs conditions de travail directes et indirectes, et garantir la sécurité et la résilience des systèmes de soins de santé. Les médecins doivent tenir compte non seulement de leur devoir vis-à-vis des patients, mais aussi de leur responsabilité quant à l’amélioration du système de santé afin que ce dernier réponde aux exigences d’accessibilité et de qualité des soins.

Au-delà de leurs obligations professionnelles, les médecins sont aussi souvent des employés. Les droits qui leur sont garantis en tant qu’employés se heurtent parfois à leur devoir de ne pas nuire. C’est pourquoi les grèves de médecins ou d’autres formes d’actions collectives donnent souvent lieu à des débats publics sur les enjeux éthiques et moraux. Cette prise de position tente de répondre à ces questions.

 

RECOMMANDATIONS

L’Association médicale mondiale recommande à ses Membres constituants d’adopter les directives suivantes pour les médecins en matière d’actions collectives.

  1. Les médecins qui participent à une action collective ne sont pas exemptés de leurs obligations éthiques ou professionnelles envers les patients.
  2. Même lorsque l’action menée n’est pas organisée par le Membre constituant ou associée à lui, ce dernier devrait s’assurer que le médecin est conscient de ses obligations éthiques et les respecte.
  3. Dans la mesure du possible, les médecins devraient faire pression pour des réformes par des manifestations publiques non violentes, par des actions de lobbying et par des campagnes d’information, ainsi que par des négociations ou des médiations, le cas échéant.
  4. Lorsqu’ils sont impliqués dans des actions collectives, les Membres constituants devraient faire en sorte de réduire au minimum la gêne occasionnée pour la population et veiller à ce que les services de santé indispensables, les urgences et la continuité des soins soient assurés pendant toute la période de grève. De plus, les Membres constituants devraient agir en faveur de mesures destinées au traitement des cas exceptionnels. Lorsqu’elles sont impliquées dans des actions collectives, les Membres constituants devraient fournir à leurs patients et au grand public des informations régulières et à jour sur les revendications liées au conflit et les actions menées. La population doit être informée en temps utile des actions de grève et des restrictions éventuelles des soins.

 

Adoptée par la 63ème Assemblée Générale, Bangkok, Thaïlande, octobre 2012, et
révisée par la 74ème Assemblée générale de l’AMM, Kigali, Rwanda, octobre 2023

 

PRÉAMBULE

Les Nations unies déclarent que la stérilisation contrainte ou forcée est une violation des droits humains fondamentaux, en particulier du droit à la santé, à l’information et à la vie privée, et à ne pas subir de torture ou toute peine ou tout traitement cruel, inhumain ou dégradant. Les Nations unies déclarent également que certaines populations sont disproportionnellement touchées par la stérilisation forcée ou contrainte, notamment les femmes, les femmes qui vivent avec le VIH, les femmes et les filles appartenant à des minorités ethniques et autochtones, les personnes atteintes d’un handicap et les personnes transgenres et intersexes.

L’AMM proclame qu’aucune personne, quels que soient son âge, sa pathologie ou son handicap, sa croyance, son origine ethnique, son sexe, son genre, sa nationalité, son affiliation politique, sa race, sa culture, son orientation sexuelle, son statut social ou tout autre facteur, ne devrait subir de stérilisation forcée ou contrainte.

Toute une série de solutions contraceptives, dont la stérilisation, devraient être accessibles et abordables pour chaque personne. L’Etat a un rôle à jouer, en veillant à ce que de telles solutions soient disponibles, de concert avec des organisations privées, caritatives et du secteur tertiaire.

Comme pour tout autre traitement médical, la stérilisation devrait avoir lieu uniquement sur un patient capable, après un choix éclairé et l’obtention d’un consentement libre et valable de la personne concernée. Dans le cas d’un patient reconnu incapable, le traitement doit faire l’objet d’une décision valable conforme à l’intérêt du patient et aux exigences légales pertinentes et aux normes éthiques de la profession médicale avant d’être effectué.

L’AMM condamne les pratiques par lesquelles un État ou tout autre acteur tente de contourner les exigences éthiques nécessaires à l’obtention d’un consentement libre et valable aux fins d’une stérilisation. Ainsi, le consentement :

  • doit être dégagé de toute contrainte matérielle ou sociale;
  • ne saurait être une condition pour bénéficier d’autres soins médicaux (y compris un avortement sûr), d’une assurance ou d’autres avantages;
  • doit être obtenu lorsque la personne n’est pas sous l’effet d’un stress qui pourrait limiter sa capacité de discernement, comme un placement en détention, une urgence médicale (à moins que la stérilisation soit cette urgence).

 

RECOMMANDATIONS

Rappelant les valeurs éthiques essentielles de la profession médicale telles qu’elles sont rappelées dans son Code international d’éthique médicale et sa Déclaration de Genève : le serment du médecin et son engagement indéfectible contre la torture et les autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, l’AMM condamne la stérilisation contrainte ou forcée et appelle :

ses membres constituants

  1. à plaider pour interdire ces pratiques contraires à la dignité humaine ;
  2. à soutenir la prestation de services ou d’interventions de stérilisation sûrs et éthiques, dans le respect de l’intégrité physique et psychologique des personnes, y compris en leur garantissant des choix autonomes en matière de procréation;

les médecins

  1. à rester vigilants pour identifier les situations et environnements où il existe un risque de stérilisation forcée ou contrainte, notamment pour des personnes vulnérables ou appartenant à un groupe particulièrement touché par ce phénomène, afin d’assurer que le consentement est toujours valable et librement donné et à s’opposer à toute forme de participation à la stérilisation forcée ou contrainte.

 

 

Adoptée par la 62ème Assemblée Générale de l’AMM, Montevideo, Uruguay, octobre 2011
Et révisée par la 73ème Assemblée générale de l’AMM, Berlin, Allemagne, octobre 2022

 

DÉFINITION

 Le terme « réseaux sociaux » désigne collectivement les différentes plateformes interactives, sites internet et applications qui permettent à leur utilisateur, personne ou organisation, d’échanger avec d’autres, de créer du contenu et de le partager en ligne.

Les objectifs de la présente politique sont les suivants :

  • étudier les enjeux professionnels et éthiques liés à l’usage croissant des réseaux sociaux par les médecins et les patients ;
  • établir un cadre pour la protection de leurs intérêts respectifs ;
  • préserver la confiance et la réputation de la profession en se conformant à de hautes normes professionnelles et éthiques ;
  • promouvoir la disponibilité d’informations de qualité à travers des réseaux sociaux ;
  • lutter contre les fausses informations et la désinformation sur les réseaux sociaux.

L’utilisation des réseaux sociaux fait partie du quotidien de milliards de personnes dans le monde dont des médecins, des étudiants en médecine et des patients.

Les outils de collaboration interactifs comme les wikis, les plateformes de réseaux sociaux, les chats et forums et les blogs ont transformé des consommateurs d’internet passifs en des internautes actifs. Ces outils visent à rassembler, partager et diffuser des informations, y compris des informations sur la santé et la science, à se faire des amis, à entrer en contact avec des amis, des parents et des professionnels, etc. Ils peuvent aussi servir à chercher des avis médicaux et les patients y font part de leurs expériences en matière de santé et de soins. Ils peuvent aussi servir à la recherche, à la santé publique et à l’éducation.

Ces aspects positifs des réseaux sociaux devraient leur valoir d’être reconnus comme un moyen de promouvoir un mode de vie sain, de diffuser les connaissances médicales dans la société et de réduire leur isolement.

Certains domaines pourraient toutefois exiger une attention particulière, parmi lesquels :

  • les contenus sensibles, les photographies, les vidéos ou d’autres éléments personnels mis en ligne sur des forums, qui sont souvent accessibles au public et peuvent demeurer sur internet de façon permanente. Les personnes peuvent ne pas avoir le contrôle sur la destination finale d’éléments mis en ligne ;
  • les portails de patients, les blogs et les sites de discussion, qui ne remplacent pas une consultation en tête à tête avec des médecins, mais peuvent permettre une implication plus active de certains groupes auprès des services de santé. Les « amitiés » en ligne avec des patients peuvent aussi altérer la relation entre médecin et patient et aboutir à ce que soient divulguées par le médecin et le patient des informations inutiles et éventuellement problématiques ;
  • la vie privée de chacune des parties, qui peut être compromise en l’absence de mesures de préservation de la vie privée ou par une utilisation inappropriée des données mises en ligne. Les paramètres de confidentialité ne sont pas sûrs, les entreprises qui gèrent les réseaux sociaux peuvent modifier les réglages par défaut concernant la protection de la vie privée de manière unilatérale, sans que l’utilisateur le sache. Les réseaux sociaux peuvent également mettre des communications à la disposition de tiers ;
  • les fausses informations et la désinformation, qui se propagent souvent plus rapidement par les réseaux sociaux que les informations exactes et factuelles. Cela peut porter atteinte à la santé de personnes, mais aussi plus généralement à la santé publique en jetant le doute et en créant la défiance vis-à-vis de professionnels qui ne cherchent qu’à promouvoir la vérité et une science fondée sur des preuves ;
  • les informations biographiques, qui devraient comporter les mises en garde appropriées (par exemple, « ces opinions n’engagent que moi », « ces contributions ne sont pas des avis médicaux personnalisés », etc.).

La diffusion de connaissances médicales, de bonnes pratiques et de possibilités de traitement sur les réseaux sociaux peut élargir et accélérer l’accès à des informations nouvelles et exactes entre professionnels de la médecine. Cependant, des personnes et des entreprises profitent de ces canaux de manière trompeuse, notamment pour promouvoir ou commercialiser leurs produits ou traitements médicaux.

 

Recommandations

L’AMM exhorte les associations médicales nationales à établir des directives relatives aux réseaux sociaux à destination des médecins pour les inviter à :

  1. respecter les limites qui s’imposent dans la relation entre médecin et patient conformément aux directives professionnelles et éthiques, tout comme ils le feraient dans n’importe quel autre contexte ;
  2. assurer qu’aucune information permettant d’identifier un patient n’est postée sur un réseau social par un médecin, en améliorant la compréhension des dispositions relatives à la protection de la vie privée et de leurs limites sur les sites des réseaux sociaux, tout en tenant compte du public cible et de la possibilité technique de restreindre l’accès au contenu à des personnes ou des groupes prédéfinis ;
  3. utiliser avec précaution les applications qui pourraient compromettre la sécurité des données, y compris pour la consultation de collègues ;
  4. promouvoir et appliquer les directives de l’AMM pour les interventions médiatiques promotionnelles des médecins à toutes leurs activités sur les réseaux sociaux ;
  5. contrôler régulièrement leur présence sur internet afin de s’assurer que les informations personnelles et professionnelles de leur propre site et, dans une certaine mesure, les contenus les concernant mis en ligne par d’autres soient exacts et appropriés ;
  6. éviter de se laisser distraire par des dispositifs technologiques lors d’une consultation avec un patient ;
  7. fournir des informations factuelles, concises et compréhensibles, déclarer tout conflit d’intérêts et adopter un ton sobre lors des discussions de nature professionnelle ;
  8. éviter tout usage inapproprié des réseaux sociaux, en particulier les attitudes insouciantes ou insensibles et les opinions irréfléchies sur des sujets médicaux ;
  9. attirer l’attention des médecins sur le fait que l’activité des professionnels de santé sur les réseaux sociaux pourrait contribuer à la perception de la profession par le grand public et devrait donc être conforme aux principes énoncés dans la déclaration de Genève et le Code international d’éthique médicale de l’AMM ;
  10. envisager l’intégration de programmes éducatifs sur l’utilisation des réseaux sociaux dans le cursus de médecine et la formation continue en médecine ;
  11. adopter sur les réseaux sociaux la même rigueur scientifique et la même approche qu’en consultation et à témoigner le même respect aux patients et aux collègues que dans la vie professionnelle ;
  12. créer des mécanismes de responsabilisation dans les environnements professionnels en cas de comportement inopportun sur les réseaux sociaux ;
  13. promouvoir les connaissances sur la santé parmi la population et en particulier les patients, en utilisant des messages objectifs et fondés sur des données scientifiques, conformément aux principes énoncés dans la déclaration de Genève, le Code international d’éthique médicale et la prise de position de l’AMM sur la nécessité pour tous de recevoir des informations de santé ;
  14. lutter contre les fausses informations, la désinformation et la promotion de pseudosciences et de pseudothérapies, qui peuvent porter atteinte à la santé des patients et de la société au sens large ;
  15. conseiller les autres médecins qui diffuseraient de fausses informations ou qui trahiraient la confiance de patients sur les réseaux sociaux et/ou dénoncer de tels agissements aux autorités compétentes ;
  1. sensibiliser les autres médecins et les étudiants en médecine à l’éventualité que des informations partagées sur les réseaux sociaux soient utilisées à mauvais escient par des personnes ou des entreprises.

 

 

 

Adoptée par la 62e Assemblée Générale de l’AMM, Montevideo, Uruguay, Octobre 2011,
e
t réaffirmée avec des révisions mineures par la 218ème session du Conseil (en ligne), Londres, Royaume-Uni, Octobre 2021

 

L’AMM réaffirme sa déclaration de Tokyo : directives à l’intention des médecins en ce qui concerne la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants en relation avec la détention ou l’emprisonnement, et recommande l’adoption d’un mécanisme de suivi et de rapport permettant de vérifier l’adhésion des États aux dispositions de ladite déclaration, notamment dans les cas ci-après : 

  1. Lorsque les médecins se trouvent, dans le cadre de leur travail, face à un conflit de loyauté, il convient de leur apporter un soutien afin d’assurer qu’ils ne soient pas placés en position d’enfreindre les fondements de leur éthique professionnelle, par un manquement effectif à l’éthique médicale ou par défaut de comportement éthique ou de respect des droits humains, comme le prévoit la déclaration de Tokyo. 
  2. Ses membres constituants devraient offrir leur assistance aux médecins placés dans des situations difficiles et si possible sans que ne soient mis en danger les patients ou les médecins, ainsi qu’aider les personnes à signaler les cas de violations des droits de santé des patients et de l’éthique professionnelle des médecins, dans les établissements pénitentiaires. Cette assistance doit être conforme aux principes énoncés dans la Résolution de l’AMM sur la responsabilité des médecins en matière de compte rendu et de dénonciation des actes de torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. 
  3. L’AMM devrait étudier les preuves disponibles sur des cas de violation, par des États, des codes relatifs aux droits humains ou de médecins contraints d’enfreindre la déclaration de Tokyo. L’AMM devrait transmettre de tels cas aux autorités nationales et internationales concernées. 
  4. L’AMM devrait encourager ses associations membres à enquêter sur les médecins accusés d’avoir participé à des tortures et d’autres violations des droits humains qui lui auront été signalés par des sources fiables. Elle devrait aussi encourager les associations à signaler notamment les médecins qui pourraient être en danger et avoir besoin d’aide.  
  5. L’AMM devrait aider ses membres constituants et leurs membres, les médecins, à résister à de telles violations et dans toute la mesure du possible, à ne pas déroger à leurs convictions éthiques. La profession médicale et les gouvernements devraient également protéger les médecins mis en danger parce qu’ils adhèrent à leurs obligations professionnelles et éthiques. 
  6. L’AMM encouragera et aidera ses associations membres qui demandent une enquête d’un rapporteur spécial des Nations unies ou de tout autre mécanisme de contrôle officiel et fiable lorsque sont soulevées des préoccupations légitimes. 

Adoptée par la 62ème Assemblée générale de l’AMM, Montevideo, Uruguay, octobre 2011
Et révisée par la 73ème Assemblée générale de l’AMM, Berlin, Allemagne, octobre 2022

 

PRÉAMBULE

Les maladies chroniques non transmissibles (MNT) sont la principale cause de mortalité et de handicap dans les pays développés et dans les pays en développement. Les quatre principales maladies non transmissibles sont le cancer, les maladies cardiovasculaires, les maladies respiratoires chroniques et le diabète (ci-après dénommées les « quatre MNT »). Elles sont la cause de sept décès sur dix à travers le monde. Quatre-vingts pour cent des décès dus à des maladies chroniques ont lieu dans des pays à revenu faible ou moyen (OMS).

Dans la charge de morbidité, les quatre MNT ne se substituent pas aux autres causes de maladie et de handicap, comme les maladies infectieuses ou les blessures, elles s’y ajoutent. Si tous les pays font aujourd’hui face au triple fardeau que constituent les maladies infectieuses, les blessures et traumatismes et les maladies chroniques, le problème est bien plus épineux pour les pays en développement. Cette charge de morbidité accrue pèse sur la capacité de nombreux pays à assurer des services de santé adéquats et à accroître l’espérance de vie.

Surtout, les maladies chroniques ne pèsent pas d’un poids égal partout, ce qui se traduit par des inégalités de santé accrues. Par exemple, les MNT touchent plus fréquemment les personnes défavorisées, d’un niveau socioéconomique faible, chez qui l’évolution de la maladie est en outre moins favorable. Par conséquent, l’espérance de vie, tout comme les autres indicateurs de santé sont significativement plus favorables dans les pays développés que dans les pays moins développés.

En outre, ce fléau sape les efforts de croissance économique de ces pays. Les MNT sont un obstacle au développement. Dans les pays à revenu faible et moyen, la pauvreté expose les gens à des comportements qui constituent des facteurs de risque de maladie non transmissible. Les MNT qui en résultent constituent à leur tour un facteur important de pauvreté. Les maladies chroniques et la pauvreté s’aggravent mutuellement dans un cercle vicieux et entravent le développement économique.

Les tendances à l’œuvre au niveau mondial laissent penser que le problème des maladies chroniques ne va que s’accroître : vieillissement de la population, urbanisation et aménagement inapproprié du territoire, modes de vie de plus en plus sédentaires, tension psychologique accrue, dérèglement climatique et coût exponentiel des technologies médicales permettant de traiter les MNT. La prévalence des maladies chroniques est étroitement liée au développement social et économique mondial, à la mondialisation et à la commercialisation de masse de nourriture industrielle et d’autres produits.

La prévalence et le coût de traitement de la charge de morbidité des maladies chroniques devraient donc, selon toute probabilité, augmenter dans les prochaines années. Outre les dépenses personnelles et publiques, les maladies chroniques constituent un lourd tribut économique en raison des effets mutuels des coûts de santé et de la perte de productivité causée par les décès et les handicaps. L’OMS estime que le fardeau mondial des maladies chroniques sera l’un des principaux défis du siècle à venir pour le secteur de la santé.

L’augmentation rapide de la prévalence des maladies chroniques représente un problème sanitaire majeur pour le développement mondial et exige la prise de mesures immédiates.

Quatre-vingts pour cent du fardeau mondial des maladies chroniques pèse sur les pays à revenu faible ou moyen, où vit la majeure partie de la population mondiale. L’impact de ce fléau dévastateur est en croissance constante. Les maladies chroniques et la pauvreté s’aggravent mutuellement dans un cercle vicieux et entravent le développement économique.

Solutions

Les quatre principales maladies non transmissibles méritent une attention mondiale. La première solution pour lutter contre ces maladies réside dans la prévention. La consommation de tabac, un régime alimentaire malsain, l’inactivité physique et l’abus d’alcool constituent les quatre facteurs les plus courants des MNT et il est possible d’y remédier. Les troubles de la santé mentale ont également été intégrés récemment parmi les facteurs de risque des maladies non transmissibles. Les politiques nationales qui permettent aux gens de parvenir à des modes de vie et des comportements sains sont au fondement de toutes les solutions possibles.

Un meilleur accès aux soins primaires combiné à des programmes abordables, bien conçus et réalistes de prévention et de lutte contre ces maladies, ainsi que de promotion de la santé peut grandement améliorer les soins de santé. Les partenariats entre ministères nationaux de la Santé et les institutions dans les pays développés peuvent permettre de surmonter de nombreux obstacles dans les environnements les plus pauvres. Dans l’ensemble, le fait de disposer d’une assurance santé améliore les perspectives de santé. À l’inverse, le manque d’assurance santé entrave les travaux de prévention et ceux des établissements de soins primaires, avec des conséquences sanitaires déplorables. Les personnes qui ne sont pas assurées reportent les soins dont elles ont besoin lorsqu’elles sont malades ou blessées. Elles sont plus susceptibles d’être hospitalisées pour des maladies chroniques comme le diabète ou l’hypertension. Les enfants qui ne sont pas assurés sont en outre moins susceptibles de se faire vacciner et de recevoir les soins primaires de base.

Les systèmes d’enseignement de la médecine devraient être socialement plus responsables. L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) définit la responsabilité sociale des facultés de médecine comme étant l’obligation d’axer leur enseignement, leurs recherches et leurs services sur les problèmes de santé prioritaires de la population, la région ou la nation qu’elles servent. Les problèmes de santé prioritaires doivent être identifiés collectivement par les gouvernements, les organisations de soins, les professionnels de santé et la population. Il est urgent d’adopter des normes, notamment d’accréditation qui favorisent la responsabilité sociale et l’engagement de la collectivité. La formation des médecins et des autres professionnels de santé à la prestation de soins correspondant aux besoins de la population et aux ressources du pays doit être à la base de toute réflexion. Dirigés par des médecins de soins primaires, les équipes de médecins, les infirmières et les agents de santé de proximité fourniront des soins basés sur des critères de qualité, d’équité, de pertinence et d’efficacité [voir la résolution de l’AMM sur la main-d’œuvre médicale].

L’allocation de fonds pour la santé devrait être fondée sur les besoins de tous les pays ciblés. Aucun pays ne saurait obtenir de résultats positifs sur les quatre principales MNT en ne s’attaquant qu’à une seule cause de décès.

Il est essentiel de renforcer les infrastructures sanitaires, notamment la formation des équipes chargées des soins de santé primaires, la veille des maladies chroniques, les campagnes de promotion de la santé publique, l’assurance qualité et les normes de soin nationales et locales pour prendre en charge le nombre croissant de personnes atteintes de l’une des quatre principales MNT. La plupart des décès causés par des maladies non transmissibles sont évitables mais dans la plupart des pays en développement les systèmes de santé ne sont pas adaptés, sont peu préparés et ne peuvent réagir face aux maladies non transmissibles.

Les ressources humaines constituent l’un des éléments essentiels d’une infrastructure sanitaire. Des professionnels de santé bien formés et motivés dirigés par des médecins de soins primaires sont essentiels au succès du système de santé. L’aide internationale et les programmes de développement doivent passer d’un « axe vertical » sur des maladies ou des objectifs uniques à un développement plus durable et plus efficace d’infrastructures sanitaires pour les soins primaires.

  

RECOMMANDATIONS

Rappelant sa prise de position sur l’hypertension et les maladies cardiovasculaires et sa déclaration d’Oslo sur les déterminants sociaux de la santé, l’AMM appelle : 

les gouvernements nationaux

  1. à reconnaître l’importance du développement socioéconomique pour la santé et à réduire les inégalités socioéconomiques en matière de revenu, d’éducation et de conditions de travail ;
  2. à encourager les stratégies mondiales d’immunisation ;
  3. à encourager les stratégies mondiales de lutte contre le tabac, l’alcool ainsi que les stratégies visant à faire face à d’autres formes d’addiction, notamment la consommation de drogue ;
  4. à promouvoir des modes de vie sains et à instaurer des politiques et des stratégies complètes et collaboratives à tous les niveaux et auprès de tous les services gouvernementaux compétents en faveur de la prévention et de comportements sains ;
  5. à allouer un pourcentage fixe du budget national au développement d’infrastructures sanitaires et à la promotion de modes de vie sains et à l’investissement dans une meilleure lutte contre les quatre principales maladies chroniques, qu’il s’agisse de leur dépistage, des soins ou de leur traitement ;
  6. à plaider pour des accords commerciaux qui protègent la santé publique au lieu de la saper ;
  7. à élaborer et à mettre en œuvre des stratégies nationales et mondiales d’atténuation des effets sanitaires du dérèglement climatique ;
  8. à promouvoir la recherche en matière de prévention et de traitement des quatre principales maladies non transmissibles, y compris sur les risques professionnels qui peuvent déboucher sur des maladies chroniques ;
  9. à promouvoir l’accès à des médicaments efficaces et de bonne qualité pour le traitement des maladies non transmissibles ;
  10. à déployer des systèmes de veille et de suivi des maladies non transmissibles ;
  11. à renforcer les soins de santé primaires, les ressources humaines et l’infrastructure.

ses Membres constituants

  1. à sensibiliser davantage les médecins, les ONG et le grand public aux meilleurs comportements de prévention des maladies ;
  2. à accroître les compétences et les capacités nécessaires pour la promotion d’une approche pluridisciplinaire, en équipe, en vue d’une gestion des maladies chroniques ;
  3. à plaider en faveur d’une intégration de la prévention des maladies chroniques non transmissibles ainsi que des stratégies de lutte aux politiques gouvernementales ;
  4. à favoriser les formations de qualité et les associations professionnelles pour augmenter le nombre de médecins de soins primaires et les répartir équitablement dans la population ;
  5. à plaider pour la mise à disposition de ressources accessibles et de haute qualité pour une formation médicale continue qui réponde aux besoins de la société ;
  6. à encourager l’instauration de normes basées sur la preuve pour soigner les maladies non transmissibles ;
  7. à promouvoir un environnement favorisant la continuité des soins délivrés pour les quatre principales maladies non transmissibles dont l’éducation des patients et l’autoprise en charge ;
  8. à soutenir de solides infrastructures sanitaires publiques ;
  9. à défendre et à appuyer l’idée que les déterminants sociaux de la santé font partie de la prévention et des soins de santé. 

les facultés de médecine

  1. à établir des cursus répondant aux besoins sociétaux actuels ;
  2. à créer des services de soins de santé primaires ;
  3. à offrir des possibilités de formation aux soins primaires de proximité qui permettent aux étudiants de devenir familiers des infrastructures sanitaires de base pour la prise en charge des maladies chroniques et la continuité des soins ;
  4. à promouvoir le recours à des méthodologies de formation interdisciplinaires, intersectorielles et d’autres méthodes collaboratives dans le cadre des programmes de formation initiale et continue ;
  5. à inclure l’enseignement de la prévention des maladies chroniques, y compris la nutrition et la promotion d’un mode de vie sain dans le cursus général.

les médecins

  1. à travailler à mettre en place des communautés promouvant des styles de vie sains et des comportements axés sur la prévention ;
  2. à proposer aux patients des méthodes de sevrage tabagique, de maîtrise du poids, des conseils sur la consommation de stupéfiants, un dépistage précoce, une éducation, une assistance pour l’autoprise en charge, des conseils diététiques et un suivi ;
  3. à informer les patients des dangers des remèdes ou des démarches « miracles » ou insuffisamment prouvés et des pratiques relevant des pseudosciences ;
  4. à promouvoir une approche pluridisciplinaire en équipe et fondée sur l’utilité pour la prise en charge des maladies chroniques ;
  5. à assurer la continuité des soins des patients souffrant d’une maladie chronique ;
  6. à montrer l’exemple en matière de mode de vie sain en se maintenant personnellement en bonne santé ;
  7. à se faire les avocats de la population qu’ils servent pour parvenir à améliorer les déterminants sociaux de la santé, l’équité dans les soins de santé et pour de meilleures méthodes de prévention ;
  8. à travailler avec les parents et la population pour veiller à ce que les parents disposent des meilleurs conseils pour préserver la santé de leurs enfants.

 

Adoptée par la 61e Assemblée Générale de l’AMM, Vancouver, Canada, Octobre 2010
et amendée par la 69e Assemblée Générale de l’AMM à Reykjavik, Islande, Octobre 2018

 

PRÉAMBULE

  1. La présente déclaration s’attache à un aspect essentiel de la dégradation de l’environnement : la pollution environnementale par des substances chimiques industrielles et domestiques. Elle met en lumière la manière dont les produits chimiques dangereux concourent à la dégradation de l’environnement et le rôle que peuvent jouer les médecins dans la gestion avisée de ces substances aux fins d’un développement durable, notamment dans le domaine des soins de santé.
  2. Une gestion inappropriée des produits chimiques peut avoir des conséquences nocives sur la santé humaine et les droits humains, notamment pour les populations les plus vulnérables.
  3. La plupart des produits chimiques auxquels les êtres humains sont exposés proviennent d’industries. Il peut s’agir de gaz toxiques, d’additifs alimentaires, de produits ménagers, de cosmétiques, d’intrants agricoles ou de substances utilisées à des fins thérapeutiques, comme des médicaments et des compléments alimentaires. L’attention du grand public s’est récemment concentrée sur les effets des produits chimiques artificiels (ou de synthèse) sur l’environnement, notamment certains produits industriels ou agrochimiques et sur les nouveaux modèles de répartition des substances naturelles induits par l’activité humaine. À mesure que les composés chimiques se multipliaient, les gouvernements et les organisations internationales ont commencé à adopter une approche plus exhaustive lors de l’élaboration de règlementations en matière de sécurité. La quantité croissante de déchets en plastique dans l’environnement est également très préoccupante et il est temps de prendre des mesures pour y remédier.
  4. Bien qu’il incombe prioritairement aux gouvernements d’établir un cadre de protection de la santé publique contre les risques chimiques, l’Association médicale mondiale, au nom de ses membres, insiste sur la nécessité d’exposer les risques que ces substances font peser sur la santé humaine et présente ci-après des recommandations.

CONTEXTE

Produits chimiques préoccupants

  1. Au cours des cinquante dernières années, l’utilisation des produits chimiques s’est massivement accrue, tant dans l’agriculture, avec les pesticides et les fertilisants, que dans l’industrie de production de biens (de consommation ou industriels) avec les produits de synthèse1.
  2. Les inquiétudes portent principalement sur les produits chimiques, qui persistent dans l’environnement, présentent un taux de dégradation faible, s’accumulent dans les tissus humains et animaux (et se concentrent au fil de la chaîne alimentaire) et qui ont de graves conséquences sur la santé humaine et l’environnement (notamment à de faibles concentrations). Certains métaux présents naturellement dans l’environnement comme le plomb, le mercure et le cadmium, utilisés dans l’industrie, suscitent également des préoccupations. Les progrès de la recherche en matière de santé environnementale, en particulier pour ce qui a trait aux méthodes d’échantillonnage environnemental et humain et aux techniques de mesure, ainsi qu’une meilleure information concernant les effets éventuels d’une faible dose sur la santé humaine, ont contribué à étayer les inquiétudes émergentes.
  3. Les effets des émissions de produits chimiques sur la santé peuvent être directs (immédiats) ou indirects. Les effets indirects des émissions de produits chimiques sur la santé sont dus à la dégradation de la qualité de l’eau, de l’air, de l’alimentation, ainsi qu’aux altérations des systèmes régionaux et mondiaux comme les marées rouges (pollution par phycotoxine paralysante) ou les atteintes à la couche d’ozone et au climat, auxquelles ces émissions peuvent contribuer.

Mesures nationales et internationales

  1. Le type de règlementation des produits chimiques varie amplement à la fois sur le territoire d’un même État et entre les pays et peuvent aller des contrôles volontaires à des lois statutaires. Il est essentiel que tous les pays s’acheminent vers une approche des contrôles règlementaires nationale, homogène, normalisée et fondée sur la loi. En outre, les règlementations internationales doivent être cohérentes de manière à ce que les pays en développement ne soient pas forcés par leur situation économique à accepter des niveaux d’exposition toxique élevés.
  2. Les produits chimiques de synthèse comprennent toutes les substances qui sont produites via des activités humaines ou qui en sont issues, comme les produits chimiques d’emploi industriel ou ménager, les engrais, les pesticides, les substances chimiques contenues dans les marchandises et les déchets, les médicaments disponibles sur prescription ou non et les compléments alimentaires et les sous-produits générés involontairement dans le cadre de processus industriels ou lors d’incinérations, comme les dioxines. En outre, les nanomatériaux peuvent exiger des règlementations particulières explicites qui transcendent les cadres actuels.

Approche stratégique de la gestion internationale des produits chimiques

  1. Les nombreux accords internationaux sur les substances chimiques n’ont pas permis de limiter la pollution de l’environnement mondial par les produits chimiques dangereux, il est donc nécessaire d’adopter une approche plus complète de ces produits. Les raisons pour lesquelles cette pollution perdure sont la résistance des entreprises, le manque absolu de contrôle dans certains pays, la faible sensibilisation aux risques potentiels, l’incapacité à appliquer le principe de précaution, la non-ratification des différents traités et conventions et le manque de volonté politique. L’Approche stratégique de la gestion internationale des produits chimiques (ASGIPC) a été adoptée à Dubaï le 6 février 2006 par les délégués de plus de cent gouvernements et des représentants de la société civile. Il s’agit d’un programme d’action mondial mais volontaire, visant à assurer une gestion avisée des produits chimiques tout au long de leur cycle de vie pour que d’ici 2020, ils soient produits et utilisés d’une façon qui limite leurs effets néfastes sur la santé humaine et l’environnement. L’ASGIPC concerne les produits chimiques agricoles comme industriels, qui se trouvent dans les marchandises comme dans les déchets, à tous les stades de leur cycle de vie : fabrication, utilisation et mise au rebut.

Déchets en plastique

  1. Le plastique est entré dans nos vies depuis plus de cent ans et il est régulièrement utilisé par tout un chacun, sous une forme ou une autre. Bien que des variétés biodégradables fassent aujourd’hui leur apparition, la plupart des plastiques se fragmentent très lentement, ce processus de décomposition pouvant durer des centaines d’années. Cela signifie que la plupart les plastiques qui ont été fabriqués depuis l’invention de cette matière sont encore sur la Terre, à moins qu’ils n’aient été brûlés, produisant ainsi une fumée empoisonnée qui pollue l’atmosphère.
  2. L’utilisation de plastique provoque l’accumulation de déchets dans les décharges et dans les espaces naturels terrestres ou marins, l’ingestion de plastique par des animaux, la fuite de substances chimiques contenues dans le plastique et l’éventuelle transmission de ces produits à la nature et aux êtres humains. Les animaux se retrouvent également souvent enchevêtrés et piégés dans des déchets en plastique. De nombreux plastiques utilisés aujourd’hui sont des halogénés ou contiennent d’autres additifs employés au cours du processus de fabrication, qui peuvent avoir des effets néfastes sur la santé (cancérigènes ou perturbateurs endocriniens).
  3. Notre utilisation actuelle du plastique n’est pas durable : en accumulant les déchets, nous contribuons à la dégradation de l’environnement et à la détérioration de la santé. Il est dès lors nécessaire que nous nous dotions de règlementations spécifiques pour lutter contre la contamination de l’environnement par les déchets en plastique à fragmentation lente et l’incinération de ces déchets, qui crée souvent des sous-produits toxiques.

RECOMMANDATIONS DE L’ASSOCIATION MÉDICALE MONDIALE (AMM)

  1. En dépit des initiatives nationales et internationales, la pollution de l’environnement due à une fabrication et à une utilisation non contrôlées des produits chimiques continue de mettre en danger la santé publique mondiale. Les preuves des liens entre certains produits et certains troubles de la santé sont solides mais nous sommes loin d’avoir testé les conséquences environnementales de tous les produits chimiques. Cela est particulièrement vrai des produits chimiques les plus récents et des nanomatériaux, notamment à faible dose et sur des longues durées. La pollution par le plastique de notre environnement naturel, y compris la mer, où le plastique se décompose en particules minuscules est également alarmante. Les médecins et le secteur de la santé doivent régulièrement prendre des décisions au sujet de patients et du grand public sur la base des données existantes. Les médecins reconnaissent donc le rôle significatif qu’ils ont à jouer pour combler l’écart entre l’élaboration de politiques, la gestion des produits chimiques et la réduction des risques pour la santé humaine.
  2. L’Association médicale mondiale réaffirme son engagement en faveur de l’environnement, de la protection de la santé et de la vie et formule les recommandations suivantes :

MOBILISATION

  1. Les associations médicales nationales devraient appeler à l’adoption d’une législation qui vise à réduire la pollution chimique, à mettre en lumière les responsabilités des fabricants de produits chimiques et l’exposition des êtres humains aux produits chimiques, à détecter et à réaliser le suivi des produits chimiques dangereux à la fois dans l’organisme humain et dans l’environnement et qui permette de réduire les effets sur la santé de l’exposition à des produits toxiques, en accordant une attention particulière à la fertilité des femmes et des hommes et à la vulnérabilité des êtres humains pendant la vie in utero et la petite enfance.
  2. Les associations médicales nationales devraient exhorter leurs gouvernements à soutenir les efforts internationaux visant à limiter la pollution chimique par une gestion et une élimination sensée des produits chimiques, ou leur remplacement lorsqu’il existe une alternative plus sûre (comme dans le cas de l’amiante), en veillant à ce que les pays développés aident les pays en développement à parvenir à un environnement sain et à assurer une bonne santé à l’ensemble de leur population.
  3. Les associations médicales nationales devraient s’efforcer d’améliorer la collaboration intersectorielle entre les ministères et les organismes chargés de l’environnement et de la santé publique.
  4. Les associations médicales nationales devraient sensibiliser le grand public aux risques associés aux produits chimiques, y compris les plastiques et aux mesures qui peuvent être prises à cet égard.
  5. Les méthodes modernes de diagnostic et de traitement reposent largement sur l’utilisation unique de matériel neuf ou stérile emballé comportant plusieurs composants en plastique, qu’il s’agisse de l’instrument ou de son conditionnement. Les associations médicales nationales devraient encourager la recherche et la diffusion de pratiques permettant de réduire ou d’éliminer l’emploi de ces éléments qui contribuent à la dégradation de l’environnement.
  6. Les médecins et les associations médicales nationales devraient plaider pour la protection de l’environnement, la communication de l’ensemble des composants des produits, un développement durable, un secteur de la chimie et des hôpitaux respectueux de l’environnement au niveau local, national et continental.
  7. Les médecins et les associations médicales nationales devraient appuyer l’élimination du mercure et des produits chimiques persistants, bioaccumulatifs et toxiques dans les équipements et les produits médicaux et l’arrêt de l’incinération des déchets de ces produits, qui pourrait causer une diffusion supplémentaire de substances toxiques.
  8. Les médecins et les associations médicales devraient soutenir l’adoption du système général harmonisé de classification et d’étiquetage des produits chimiques (SGH) et de lois visant à imposer une évaluation de l’impact environnemental et sanitaire de tout nouveau produit chimique avant son introduction sur le marché ou de toute nouvelle installation industrielle.
  9. Les médecins devraient encourager la publication des preuves des effets des différents produits chimiques et des plastiques, selon leurs doses, sur la santé humaine et sur l’environnement. Ces publications devraient être mises à la disposition des médias, des organisations non gouvernementales (ONG) et des citoyens, au niveau local comme international.
  10. Les médecins et les associations médicales devraient plaider pour le développement de systèmes efficaces et sûrs de collecte et d’élimination des produits pharmaceutiques non consommés. Ils devraient également encourager l’introduction de systèmes efficaces de collecte et de mise au rebut des déchets en plastique.
  11. Les médecins et les associations médicales devraient encourager les efforts visant à réduire la fabrication, l’utilisation des emballages et des sacs en plastique et leur remplacement par des matériaux écologiques et à stopper leur dissémination dans l’environnement. Ces efforts pourraient conduire à l’adoption de mesures encourageant le recyclage et de lois limitant l’utilisation d’emballages et de sacs en plastique.
  12. Les médecins et les associations médicales devraient appuyer les efforts de réhabilitation et de remise en état de zones où l’environnement a été dégradé sur les principes du pollueur-payeur et de précaution et militer pour que ces principes soient intégrés à la législation.
  13. L’AMM, les associations médicales nationales et les médecins devraient exhorter les différents services des gouvernements à collaborer pour assurer l’adoption de règlementations cohérentes.

INITIATIVE

L’AMM :

  1. soutient les objectifs de l’Approche stratégique de la gestion internationale des produits chimiques (ASGIPC), qui encourage les bonnes pratiques telles que le remplacement par une substance plus sûre, la réduction des déchets, la construction durable et non toxique, le recyclage, ainsi que la manipulation sûre et durable des déchets dans le secteur de la santé ;
  2. avertit que ces pratiques relatives aux produits chimiques doivent être combinées à des efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des soins de santé et d’autres sources pour éviter que ces émissions n’aggravent le réchauffement climatique ;
  3. invite instamment les médecins, les associations médicales nationales et les États à travailler ensemble à la création de systèmes d’alerte afin d’assurer que le personnel des systèmes de soins de santé et les médecins soient informés de tout accident industriel présentant des risques et reçoivent des informations exactes en temps utile sur la gestion de ces urgences ;
  4. exhorte les organisations locales, nationales et internationales à veiller à la production durable, au remplacement par des alternatives sûres, à la création d’emplois sûrs et respectueux de l’environnement et à la consultation du personnel de santé pour assurer que les effets néfastes du développement sur la santé soient anticipés et réduits au minimum ;
  5. souligne l’importance de l’élimination en toute sécurité des produits pharmaceutiques, qui fait partie des responsabilités du secteur des soins de santé et de la nécessité de collaborer à l’élaboration de modèles de bonnes pratiques afin de réduire la part de ce secteur dans le problème des déchets chimiques ;
  6. promeut la classification environnementale des produits pharmaceutiques afin d’encourager la prescription de produits pharmaceutiques moins dangereux pour l’environnement ;
  7. soutient les efforts locaux, nationaux et internationaux visant à réduire l’utilisation d’emballages et de sacs en plastique ;
  8. appuie les recherches en cours sur l’effet des règlementations et du suivi des produits chimiques sur la santé humaine et l’environnement.

L’AMM recommande aux médecins :

  1. de travailler à réduire la quantité de déchets médicaux toxiques dans leur environnement professionnel et l’exposition à ces déchets dans le cadre de la campagne pour des environnements favorables à la pratique des professionnels de la santé lancée par l’Alliance mondiale des professions de santé (AMPS) ;
  2. de travailler à fournir des informations sur les impacts sanitaires associés à l’exposition aux produits chimiques toxiques, sur les manières de réduire l’exposition des patients à des agents particuliers et d’encourager les comportements qui améliorent la santé de tous ;
  3. d’informer leur patientèle de l’importance d’une procédure sûre d’élimination des produits pharmaceutiques non consommés ;
  4. de travailler avec d’autres personnes à combler les lacunes de la recherche au sujet de l’environnement et de la santé (poids et évolution des pathologies imputables à la dégradation de l’environnement, effets des produits chimiques industriels sur les foyers et les communautés locales, effets, y compris sanitaires, de la présence de déchets en plastique dans notre environnement naturel, populations les plus vulnérables et protection de ces populations).

FORMATION PROFESSIONNELLE ET RENFORCEMENT DES CAPACITÉS

L’AMM recommande :

  1. aux médecins et aux associations professionnelles d’aider à sensibiliser les professionnels comme le grand public aux conséquences des polluants chimiques utilisés dans le monde ou présents dans l’environnement sur la santé des personnes ;
  2. la création d’outils permettant aux médecins d’évaluer les risques d’exposition de leurs patients à des produits chimiques ;
  3. aux médecins et à aux associations médicales de créer des formations continues adaptées aux situations locales sur les symptômes, les diagnostics, les traitements et la prévention des pathologies causées par la pollution chimique et aggravées par les changements climatiques ;
  4. que la santé environnementale et la médecine du travail deviennent des sujets centraux de la formation médicale ; que les facultés de médecine encouragent la formation de spécialistes en santé environnementale et en médecine du travail en nombre suffisant.

Adoptée par la 48e Assemblée générale Somerset West, Afrique du Sud, Octobre 1996,
modifiée par la 57e Assemblée Générale de l’AMM, Pilanesberg, Afrique du Sud, Octobre 2006,
par la 61eAssemblée générale de l’AMM, Vancouver, Canada, Octobre 2010
et par la 72e Assemblée générale de l’AMM (en ligne), Londres, Royaume-Uni, Octobre 2021

 

PRÉAMBULE

 La violence intrafamiliale constitue un grave problème de santé publique et de droits humains, universel, qui touche n’importe qui, quel que soit son âge, son genre, son orientation sexuelle, son origine ethnique, sa culture, sa religion, son statut socio-économique ou tout autre facteur.

Bien que les définitions de ce concept puissent varier, le terme « violence intrafamiliale » désigne la maltraitance physique, sexuelle, verbale, économique, spirituelle, psychologique ou émotionnelle ou la négligence d’une personne par une autre dans une relation avec laquelle la victime est physiquement, financièrement, émotionnellement ou socialement liée et/ou dépendante.

 Bien que les causes de la violence intrafamiliale soient complexes, un certain nombre de facteurs sont connus pour être déterminants, comme le manque d’instruction, la dépendance économique ou la pauvreté, des troubles psychiques sous-jacents ou non diagnostiqués, la consommation excessive de stupéfiants (en particulier l’alcool), le stress, les rôles sexués rigides, les faibles compétences parentales, les conflits interpersonnels au sein de la famille, le fait, pour l’auteur des violences, d’avoir subi de mauvais traitements ou d’avoir connu la violence intrafamiliale dans l’enfance, ainsi que l’isolement social de la famille.

 La violence intrafamiliale peut avoir des conséquences physiques, mentales, émotionnelles et psychosociales délétères sur la personne, ainsi que sur l’ensemble de la famille et sur son entourage social, mais aussi des conséquences socio-économiques. Ces conséquences funestes peuvent être immédiates ou à court terme, mais également chroniques ou à long terme. Parmi ces effets, on trouve les séquelles physiques, la mort, les effets sur la santé reproductive (y compris les fausses couches), les dysfonctionnements au sein de la famille, l’échec scolaire et universitaire, les maladies sexuellement transmissibles, la délinquance juvénile, l’échec professionnel et la perte d’emploi, l’exclusion sociale et le sans-abrisme, l’insomnie, l’anxiété, la dépression, le recours aux psychotropes ou le trafic de tels produits, le syndrome de stress post-traumatique, voire le suicide. Les victimes peuvent à leur tour devenir des auteurs de violences intrafamiliales et d’actes violents à l’encontre de personnes non-intimes (transmission intergénérationnelle de la violence).

L’Association médicale mondiale (AMM) condamne fermement toutes les formes de violence et réaffirme ses politiques sur la violence à l’encontre des femmes, sur les mauvais traitements et la négligence envers les enfants, sur les mauvais traitements contre les personnes âgées, sur la violence et la santé.

 

RECOMMANDATIONS

Gouvernements et autorités nationales de santé 

L’AMM invite instamment les gouvernements à :

  1. renforcer le sens des responsabilités sociales, élaborer et mettre en œuvre les politiques, cadres juridiques et programmes nationaux assortis d’un budget adéquat permettant de prévenir la violence intrafamiliale, de la faire cesser et de protéger les victimes et les témoins ;
  2. s’attaquer aux causes profondes de la violence, notamment aux déterminants sociaux de la santé et promouvoir l’équité en matière de santé, y compris en combattant les inégalités de genre et les pratiques sociales néfastes ;
  3. reconnaître que les périodes de stress intense, sur le plan individuel comme sur le plan national, accroissent le risque de violence intrafamiliale et assurer que durant de telles périodes, les ressources idoines soient mises à disposition et que la population en soit informée ;
  4. mettre en place des outils permettant de reconnaître, de prendre en charge et si nécessaire de signaler les cas de violences intrafamiliales;
  5. élaborer des systèmes de recueil de données holistiques sur la violence intrafamiliale comprenant les aspects essentiels du problème tels que la mortalité, la morbidité, les lésions, l’environnement familial ou social, les facteurs de risque, le coût des interventions, la perte de productivité, les frais de justice, entre autres ;
  6. mettre à disposition des mécanismes de signalement et des lieux privés et sûrs afin de protéger les personnes de tout sentiment de culpabilité ou de honte et pour éviter la stigmatisation et les représailles ;
  7. exiger des directives indiquant la marche à suivre en cas de soupçon de violence intrafamiliale et les types d’intervention possibles.Le médecin ne devrait procéder au signalement que lorsque de son point de vue, cela ne mettra pas en danger la victime de violence ;
  8. établir et promouvoir des programmes de recherche de haute qualité afin de fournir une base de données solide relative aux multiples facettes de la violence intrafamiliale : ampleur, profils de risque, facteurs sous-jacents et leur complexe articulation, comparaisons croisées entre les environnements, les pays et les régions ;
  9. créer et mettre à disposition des services à destination des personnes qui subissent des violences intrafamiliales, y compris un accompagnement juridique et administratif, un suivi, une défense en justice, un conseil, un logement sûr et la planification de la sécurité de la victime ;
  10. encourager une collaboration multipartite constructive entre les secteurs et les disciplines, ainsi qu’entre les organismes gouvernementaux et non gouvernementaux, y compris les institutions traditionnelles et religieuses afin de prévenir et de faire cesser la violence intrafamiliale.

Membres constituants de l’AMM et à l’ensemble de la profession médicale

Les membres constituants de l’AMM devraient :

  1. encourager la coordination des actions de lutte contre la violence intrafamiliale entre et au sein des composants du système de santé, du système judiciaire pénal, des forces de l’ordre, y compris des tribunaux des affaires familiales et des mineurs et des organisations d’aide aux victimes ;
  2. encourager et faciliter les recherches afin de mieux comprendre la prévalence, les facteurs de risque, les effets des violences intrafamiliales et les soins les plus adaptés aux victimes ;
  3. soutenir les actions de sensibilisation du grand public et des professionnels et les programmes d’information sur la violence intrafamiliale ;
  4. encourager les directeurs des établissements de santé publics et privés à fournir des supports d’information aux guichets de réception et dans les salles d’attente et des urgences afin de donner aux patients et à leur entourage les informations essentielles sur la violence intrafamiliale, ainsi qu’à les renseigner sur les services d’aide intégrés et professionnels locaux auxquels ils ont accès ;
  5. plaider pour l’ajout de cours sur la violence, y compris la violence intrafamiliale au cursus universitaire de formation à la médecine, en premier comme en dernier cycle ;
  6. promouvoir des sessions de renforcement des capacités et des programmes de formation continue sur la prévention de la violence intrafamiliale à destination des médecins ;
  7. militer pour la réadaptation, par le conseil et la thérapie, des auteurs de violences, des personnes qui les subissent et de celles qui y sont exposées, notamment les enfants traumatisés ;
  8. encourager l’intégration au premier cycle du cursus de médecine généraliste d’une formation aux dynamiques intrafamiliales, y compris aux aspects médicaux, sociologiques, psychologiques et préventifs de tous les types de violences intrafamiliales.

 

Médecins

Dans le cadre de leur obligation de promouvoir le bien-être des patients, les médecins ont l’obligation éthique de prendre les mesures adéquates pour détecter les patients victimes de violences et de mauvais traitements intrafamiliaux et leur prêter assistance.

Les médecins devraient :

  1. dans le cadre de leur pratique habituelle, être attentifs et sensibles aux signes indiquant la nécessité de rechercher d’éventuelles maltraitances dans le passé ou le présent d’un patient dans le cadre d’un examen général ou à la suite de constatations cliniques suggérant des violences, car les médecins sont souvent les premiers à soupçonner des violences intrafamiliales ;
  2. connaître les méthodes pour recevoir de manière appropriée les histoires de maltraitance passée et présente, qui sont souvent délicates d’un point de vue culturel et être très conscients de la nécessité de respecter la vie privée du patient et de conserver une relation de confiance avec lui ;
  3. connaître les services sociaux, de quartier et autres pouvant servir aux victimes de violence et dans certains cas aux auteurs de violences, orienter leurs patients vers ces services, et recourir de manière habituelle à ces services pour venir en aide aux victimes, aux auteurs et aux témoins de violences intrafamiliales ;
  4. signaler les soupçons de violences contre des enfants et d’autres membres de la famille aux services de protection compétents dans le respect des obligations applicables et prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer de ne pas mettre en danger les victimes et les témoins de violence ;
  5. être encouragés à participer à des activités sociales coordonnées visant à réduire le poids et les conséquences de la violence intrafamiliale ;
  6. être encouragés à adopter une approche mettant le patient au centre de soins adaptés à son environnement et à développer des attitudes impartiales envers les personnes impliquées dans des violences intrafamiliales.

Adoptée par la 51e Assemblée Générale de l’AMM, Tel Aviv, Israël, Octobre 1999 et
révisée par la 61e Assemblée Générale de l’AMM, Vancouver, Canada, Octobre 2010
, et réaffirmée avec des révisions mineures par la 215e session du Conseil (en ligne), Cordoue, Espagne, Octobre 2020

 

PRÉAMBULE

Le traitement pharmacologique a pour objectif d’améliorer la santé et la qualité de vie des patients. Dans sa forme optimale, il doit être sans danger, efficace et performant. L’accès à ce type de traitement doit être équitable. Il requiert des informations de base exactes et actualisées répondant aux besoins des patients et des praticiens.

Le traitement pharmacologique est de plus en plus complexe et nécessite souvent l’intervention d’une équipe pluridisciplinaire et non plus uniquement celle du médecin pour l’administration et le suivi de la thérapie choisie. Dans les établissements hospitaliers, il est en plus en plus fréquent et utile d’avoir dans une telle équipe la présence d’un pharmacien clinicien.

Le droit de prescrire des médicaments devrait être fondé sur la compétence et idéalement relever de la responsabilité du médecin. Les médecins et les pharmaciens ont des responsabilités complémentaires et de soutien pour réussir à fournir un traitement pharmacologique optimal. Il faut établir la communication, le respect, la confiance et une reconnaissance mutuelle des compétences. Un accès à la fois des médecins et des pharmaciens aux mêmes informations précises et actualisées est important afin d’éviter de donner aux patients des informations contradictoires.

Les médecins et les pharmaciens doivent fournir un service de qualité à leurs patients et veiller à une utilisation sans danger des médicaments. La collaboration entre ces professions est donc impérative. En matière de formation continue et d’information, il doit y avoir aussi un partage des informations entre ces professions et avec les patients. Il est nécessaire de conserver un dialogue ouvert et permanent entre les organisations représentatives des médecins et pharmaciens afin de définir les fonctions respectives de chacune des professions et promouvoir un usage optimal des médicaments dans le cadre d’une structure de coopération transparente, le tout au mieux des intérêts des patients.

Dans sa prise de position conjointe sur les produits médicaux contrefaits, l’Alliance mondiale des professions de santé (AMPS) rappelle la priorité partagée d’identifier, de rechercher et d’éliminer les médicaments contrefaits, lutte dans laquelle les médecins et les pharmaciens jouent un rôle de premier plan.

Le patient reçoit de meilleurs soins si pharmaciens et médecins coopèrent, en reconnaissant le rôle de chacun afin que les médicaments soient utilisés en sécurité et à bon escient pour obtenir un résultat optimal pour la santé du patient

 

LES RESPONSABILITES DES MEDECINS

  1. Diagnostiquer les maladies sur la base de leur formation et de leurs connaissances et compétences spécifiques.
  2. Évaluer le besoin d’un traitement pharmacologique et prescrire les médicaments correspondants en consultation avec les patients, les pharmaciens et les autres professionnels de santé, le cas échéant.
  3. Informer les patients sur le diagnostic, les indications et les objectifs du traitement, ainsi que sur l’action, les avantages, les risques et les éventuels effets secondaires du traitement pharmacologique.
  4. Dans le cas de prescriptions non remboursées, le patient doit être en être informé. Contrôler et évaluer la réponse au traitement pharmacologique, les progrès par rapport aux objectifs thérapeutiques et, au besoin, réviser le plan thérapeutique (en concertation avec les pharmaciens, les autres professionnels de santé et si nécessaire le personnel soignant.
  5. Fournir et échanger des renseignements relatifs au traitement pharmacologique avec les autres prestataires de santé.
  6. Diriger une équipe de professionnels de santé responsable de la gestion d’un traitement pharmacologique complexe.
  7. Tenir pour chaque patient un dossier correspondant aux nécessités du traitement conforme à la législation en respectant la confidentialité et la protection des données des patients.
  8. Là où cela est possible, participer activement à l’établissement de systèmes électroniques de délivrance des médicaments sur le lieu de travail et venir en appui de ces systèmes par leurs connaissances professionnelles.
  9. Maintenir, par la formation continue, un haut niveau de connaissances professionnelles en matière de traitements pharmacologiques.
  10. Sécuriser l’approvisionnement et le stockage des médicaments que le médecin doit ou a l’autorisation de délivrer.
  11. Contrôler les ordonnances afin d’identifier les interactions, les réactions allergiques, les contre-indications et les doubles emplois thérapeutiques.
  12. Signaler les effets indésirables des médicaments aux autorités de santé, selon la législation nationale.
  13. Contrôler et limiter si nécessaire les prescriptions de médicaments qui risquent de générer une addiction.
  14. Documenter les effets indésirables des médicaments dans le dossier médical du patient.

LES RESPONSABILITES DES PHARMACIENS

  1. Assurer l’approvisionnement, le bon stockage et la bonne délivrance de médicaments conformément aux règlementations en vigueur.
  2. Donner des informations aux patients, pouvant inclure le prospectus d’information, le nom du médicament, son objectif, les interactions éventuelles, les effets secondaires ainsi que sur les conditions correctes d’emploi et de stockage.
  3. Contrôler les ordonnances afin de prévenir les interactions, les réactions allergiques, les contre-indications et les doubles emplois thérapeutiques. Les éventuelles inquiétudes devraient être discutées avec le médecin prescripteur et le pharmacien ne devrait pas modifier l’ordonnance sans en référer à ce médecin.
  4. Discuter des inquiétudes ou des problèmes médicaux liés à des médicaments prescrits, si nécessaire et à la demande du patient.
  5. Conseiller, le cas échéant, les patients sur le choix et l’emploi de médicaments en vente libre et la gestion d’affections ou de symptômes bénins. Lorsque l’automédication n’est pas indiquée, conseiller au patient de consulter son médecin pour diagnostic et traitement.
  6. Participer à des équipes pluridisciplinaires concernant des traitements pharmacologiques complexes en collaboration avec les médecins et les autres prestataires de soins, habituellement dans les établissements hospitaliers.
  7. Signaler les réactions indésirables aux médicaments au médecin prescripteur et aux autorités de santé, conformément à la législation nationale.
  8. Transmettre  et partager avec le public et les praticiens les informations et les conseils d’ordre général ou concernant les médicaments.
  9. Maintenir, par la formation continue, un haut niveau de connaissances professionnelles en matière de traitements pharmacologiques.

 

Adoptée par la 50e Assemblée générale Ottawa, Canada, Octobre 1998,
réaffirmée par la 59e Assemblée Générale de l’AMM, Séoul, Corée, Octobre 2008,
modifiée par la 61e Assemblée générale de l’AMM, Vancouver, Canada, Octobre 2010,
et par la 72e Assemblée générale de l’AMM (en ligne), Londres, Royaume-Uni, Octobre 2021

 

PREAMBULE

Aux fins de la présente prise de position, et conformément aux termes clés de la migration de l’OIM, « migrant » est un terme générique qui, reflétant l’usage commun, désigne toute personne qui quitte son lieu de résidence habituelle pour s’établir à titre temporaire ou permanent et pour diverses raisons, soit dans une autre région à l’intérieur d’un même pays, soit dans un autre pays, franchissant ainsi une frontière internationale. 

L’Association médicale mondiale (AMM) considère que la santé est un besoin primaire, un droit humain et l’un des principaux moteurs du développement économique et social.   

Selon l’Organisation mondiale de la Santé, l’accès universel à la santé suppose que toute personne et toute communauté ait accès à des services de santé complets, sans obstacle ou discrimination, selon ses besoins, dans le cadre d’un système de santé équitable et solidaire.   

Rappelant sa déclaration de Genève, l’AMM souligne qu’aucun médecin ne saurait permettre que des considérations d’âge, de maladie ou d’infirmité, de croyance, de nationalité, d’affiliation politique, de race, d’inclination sexuelle, de statut social ou tout autre critère, s’interposent entre son devoir et son patient.  

L’AMM souligne qu’un médecin se doit d’offrir son aide dans une situation d’urgence, conformément au Code international d’éthique médicale. 

S’appuyant sur sa déclaration d’Ottawa sur la santé des enfants et sa prise de position sur l’évaluation médicale de l’âge des demandeurs d’asile mineurs non accompagnés, l’AMM réaffirme que les enfants doivent bénéficier d’une protection spéciale, qui comprend le droit de recevoir des soins de santé adéquats sans subir de discrimination.  

Ces principes fondamentaux de l’AMM font également écho aux principes énoncés dans la déclaration universelle des droits de l’homme de l’ONU, la convention relative aux droits de l’enfant et le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, ainsi qu’à d’autres principes des Nations unies.  

La déclaration de Lisbonne de l’AMM sur les droits du patient proclame que toute personne a le droit de recevoir, sans aucune discrimination, des soins médicaux appropriés. Cependant, les législations nationales varient et font souvent obstacle à ce principe.  

Tous les jours, de grands nombres de personnes fuient une catastrophe naturelle, la pauvreté, la violence et d’autres injustices et mauvais traitements à la recherche de protection. Leur santé mentale et physique est mise à très rude épreuve. 

Rappelant sa prise de position sur les conflits armés et sa déclaration sur la santé et les changements climatiques, l’AMM a conscience que les changements climatiques, les catastrophes naturelles, les guerres et conflits armés et les autres situations d’urgence, y compris les troubles et instabilité civils et la violence conduiront inévitablement des personnes à fuir leur domicile.  

L’AMM est préoccupée par la situation précaire de certaines catégories de migrants, tels que les réfugiés, demandeurs d’asile, migrants sans papiers ou personnes déplacées, dont l’accès à la santé est souvent compromis, alors que dans certains pays, les médecins se voient sommés d’intervenir à l’encontre de leur devoir médical et de l’éthique médicale.  

Gardant à l’esprit les principes, les conventions internationales et les politiques de l’AMM citées plus haut, l’AMM défend un engagement fort et continu des médecins en faveur de la défense des droits humains et de la dignité de toutes les personnes, y compris migrantes, à travers le monde et formule, à l’attention de ses membres constituants et des médecins, les recommandations suivantes. 

 

RECOMMANDATIONS 

Les membres constituants de l’AMM devraient : 

  • faire prévaloir la prestation de soins médicaux à tous les êtres humains sur tout autre intérêt, qu’il soit personnel, matériel, économique ou politique; 
  • soutenir et promouvoir activement le droit de toute personne de recevoir des soins médicaux en fonction de ses seuls besoins cliniques et s’élever contre toute législation ou pratique qui porterait atteinte à ce droit fondamental ; 
  • appeler les gouvernements à conclure des accords politiques facilitant la mise à disposition de ressources suffisantes pour la prestation de soins de santé adéquats et coordonnés aux populations migrantes, y compris au sein des camps de réfugiés, où les conditions de vie rendent plus aisée la propagation des maladies et des virus ; 
  • exhorter les gouvernements à assurer à tous les migrants un accès à des conditions de vie sûres et adéquates et aux services essentiels, y compris avec le soutien d’organismes donateurs ou de philanthropes si nécessaire ; 
  • promouvoir l’égalité, la solidarité et la justice sociale, en garantissant l’accès des migrants et des réfugiés à la santé et aux services sociaux ; 
  • mettre en œuvre des politiques, des actions et des engagements qui favorisent la santé de toutes et tous, sans discrimination en s’attaquant aux déterminants sociaux de la santé qui concernent les migrants et les réfugiés. 

Les médecins : 

  • ont le devoir de dispenser les soins médicaux appropriés sur la seule base de la nécessité clinique, quel que soit le statut civil et politique du patient ; 
  • devraient s’élever contre toute législation ou pratique qui entraverait ce devoir ; 
  • ne sauraient être contraints de participer à une action judiciaire ou punitive contre des migrants, qu’il s’agisse de réfugiés, de demandeurs d’asile, de migrants sans papiers ou de personnes déplacées, ni de refuser un traitement médicalement nécessaire, ni d’administrer une mesure diagnostique ou un traitement non justifié médicalement, tel que des sédatifs pour faciliter le transfert d’une personne ou son expulsion d’un pays ; 
  • doivent bénéficier d’un temps adéquat et recevoir des ressources suffisantes, y compris les services d’un interprète, pour évaluer l’état physique et psychologique des personnes migrantes, réfugiées, demandeuses d’asile, admises ou non, ou des personnes déplacées. 

Adoptée par la 61e Assemblée Générale de l’AMM, Vancouver, Canada, Octobre 2010
et révisée par la 71e Assemblée générale de l’AMM (en ligne), Cordoue, Espagne, Octobre 2020

 

PRÉAMBULE

La violence perpétrée contre les femmes est un phénomène mondial, lequel comprend les violences intrafamiliales, les violences commises par l’entourage des femmes et celles qui sont cautionnées, voire commises par l’État. Ces violences sont justifiées par de nombreux prétextes, à la fois généraux et spécifiques, culturels et sociétaux, parmi lesquels les traditions, les croyances, les coutumes, les valeurs et la religion. Les violences commises par le conjoint ou partenaire, qu’il s’agisse de viol, de maltraitances sexuelles ou de harcèlement, l’intimidation au sein des établissements scolaires ou du lieu de travail, l’esclavage moderne, la traite des femmes ou la prostitution forcée sont toutes des violences qui sont cautionnées dans certaines sociétés. Cette violence est poussée à son paroxysme lorsque les violences sexuelles sont utilisées comme arme de guerre (résolution 1820 du Conseil de sécurité des Nations unies). Les pratiques culturelles qui portent atteinte aux femmes, comme les mutilations génitales, les mariages forcés, les agressions justifiées par un litige relatif à une dot et les crimes dits « d’honneur » sont commises dans le cadre familial.

Tous les êtres humains jouissent des mêmes droits fondamentaux. Les exemples cités ci-dessus supposent la négation de nombreux droits et chacun de ces mauvais traitements peut être mis en regard des principes affirmés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et le protocole additionnel de la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants (2000).

La négation de leurs droits et la violence ont des conséquences sur la santé des femmes. Outre les effets directs et spécifiques des violences sur la santé, la manière dont sont traitées les femmes en général peut conduire à des troubles mentaux disproportionnés et un fort taux de comportements suicidaires. Les conséquences sanitaires de la violence à court comme à long terme peuvent miner durablement le bien-être, l’appétit de vivre, le rôle social des femmes et leur capacité à apporter des soins adaptés aux personnes qui sont à leur charge. L’impossibilité de se nourrir convenablement peut causer chez des générations de femmes une santé fragile, voire une croissance et un développement déficients. L’éducation des femmes constitue un facteur majeur de bien-être pour l’ensemble de la famille. À l’inverse, l’absence d’éducation accroît le risque d’une santé défaillante chez tous les membres de la famille.

Outre qu’elle soit en elle-même inadmissible, la violence contre les femmes a des conséquences sociales et économiques qui nuisent à la famille comme à la société. Les conséquences économiques directes et indirectes de violences contre les femmes ne se limitent pas aux coûts induits pour le secteur de la santé. Le manque d’indépendance économique et d’une éducation de base signifie également que les femmes qui survivent à de mauvais traitements sont plus susceptibles de devenir dépendantes de l’État et de la société et moins capables de s’assumer et de jouer un rôle au sein de cette société.

Les médecins sont particulièrement bien placés pour observer les effets combinés des violences contre les femmes. Le point de vue holistique des médecins pourrait inspirer la société et les dirigeants politiques. Il est essentiel de gagner le soutien de la société pour revaloriser le statut des femmes et faire prévaloir leurs droits et leur liberté.

Cette prise de position, ainsi que les politiques connexes de l’AMM comme les prises de position sur les mutilations génitales féminines, sur l’avortement sexo-sélectif et le fœticide féminin, sur l’interruption médicale de grossesse, sur la violence intrafamiliale, sur la violence et la santé, sur les mauvais traitements et la négligence envers les enfants, sur le droit à la réhabilitation des victimes de torture constituent autant d’orientations pour les membres constituants de l’Association et les médecins sur des manières de soutenir les femmes qui sont victimes de violence et de lutter pour l’éradication des violences contre les femmes.

 

RECOMMANDATIONS

L’AMM :

  1. appelle à pratiquer la tolérance zéro pour toutes les formes de violence contre les femmes ;
  2. affirme que la violence contre les femmes ne se limite pas aux violences physiques, psychologiques et sexuelles, elle comprend également la négligence et les mauvais traitements comme les pratiques culturelles et traditionnelles et constitue à la fois un problème majeur de santé publique et un déterminant social de la santé ;
  3. reconnaît le lien entre une meilleure éducation, les droits des femmes en général et la santé et le bien-être au niveau de la société dans son ensemble. L’AMM souligne que l’égalité dans l’exercice des libertés civiles et des droits humains est une question de santé ;
  4. appelle l’Organisation mondiale de la santé (OMS), les autres agences des Nations unies et les acteurs concernés aux échelons national et international à accélérer la prise de mesures visant à mettre fin à la discrimination et à la violence contre les femmes ;
  5. exhorte les gouvernements à mettre en œuvre le plan d’action mondial de l’OMS visant à renforcer le rôle du système de santé dans une riposte nationale multisectorielle à la violence interpersonnelle, en particulier à l’égard des femmes et des filles et à l’égard des enfants ;
  6. encourage l’élaboration de supports éducatifs gratuits en ligne pour offrir des orientations, y compris des stratégies de prévention, au personnel de santé qui se trouve en première ligne de la prise en charge des mauvais traitements et de leurs effets.

Les associations médicales nationales sont appelées :

  1. à utiliser et promouvoir les supports éducatifs disponibles sur la prévention et le traitement des conséquences de la violence contre les femmes et à s’en faire les champions ;
  2. à s’efforcer d’assurer que les médecins et les autres personnels de santé soient conscients de ces violences, de leurs conséquences et des stratégies de prévention qui ont fait la preuve de leur efficacité et de transmettre ces connaissances aux jeunes étudiants comme aux internes en médecine et dans le cadre de la formation continue ;
  3. à reconnaître l’importance d’un compte-rendu plus complet des violences et à encourager les efforts de sensibilisation à la violence et de prévention ;
  4. à défendre l’adoption de lois spécifiques contre les pratiques qui portent atteinte aux femmes comme le fœticide féminin, les mutilations génitales féminines, les mariages forcés et les châtiments corporels ;
  5. à défendre la criminalisation des violences perpétrées par le conjoint ou le partenaire ainsi que le viol dans toutes les situations, y compris au sein du mariage ;
  6. à défendre la recherche de données sur les effets de la violence et de la négligence sur les victimes primaires et secondaires comme sur l’ensemble de la société et à cette fin, à plaider pour un financement accru de ces recherches ;
  7. à encourager les revues médicales à publier davantage d’articles de recherche sur les interactions complexes dans ce domaine, afin de maintenir vive la conscience de ce problème au sein de la profession et de contribuer à l’édification d’une base de recherche solide et d’une documentation fournie sur les types d’incidence des violences ;
  8. à défendre la mise en œuvre, au niveau national, de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDEF).

Les médecins sont encouragés :

  1. à utiliser les supports de sensibilisation préparés à leur intention pour mieux s’informer des effets des violences et des stratégies de prévention efficaces ;
  2. à traiter et à réparer autant que possible les complications et les conséquences néfastes des mutilations génitales féminines et à orienter les patientes vers des services de soutien social ;
  3. à s’opposer à la publication ou à la diffusion des noms et coordonnées des victimes sans la permission explicite de ces dernières ;
  4. à évaluer les risques de violences intrafamiliales lors des entretiens visant à retracer les antécédents médicaux d’un patient ;
  5. à rester vigilant quant à l’association entre la dépendance à l’alcool ou à d’autres drogues chez les femmes et les antécédents de violence ;
  6. le cas échéant, à signaler les soupçons de violences ou de mauvais traitements à l’encontre de femmes aux services de protection compétents et à prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer de ne pas mettre en danger les victimes de violence ;
  7. à soutenir les mesures prises aux niveaux mondial comme local afin de mieux comprendre les conséquences sanitaires à la fois de la violence et de la négation des droits des femmes et à plaider pour davantage de services d’aide aux victimes.

Adoptée par la 58e Assemblée Générale de l’AMM, Copenhague, Danemark, octobre 2007
et supprimée par la 65ème Assemblée Générale de l’AMM, Durban, Afrique du sud, octobre 2014 

Introduction

En médecine, l’utilisation de cellules et tissus humains à des fins thérapeutiques couvre un vaste domaine. Il convient d’établir des différenciations afin que l’équité règne parmi les différentes demandes de la biomédecine.

L’utilisation de “prélèvements tissulaires” tels que cornées, os, vaisseaux sanguins et valves cardiaques, est considérée comme une méthode thérapeutique bien établie. Les prélèvements sont prélevés, conservés, stockés puis greffés sur les patients dans un intervalle de temps variable. En principe, ils doivent donc être traités de la même manière que des organes utilisés pour des transplantations (cf. Déclaration de l’AMM sur le don et la transplantation d’organes et de tissus humains, Edinbourg 2000).

Par opposition les « thérapies avancées » telles que l’ingénierie tissulaire et d’autres techniques de la médecine régénératrice, impliquent l’emploi de tissus humains comme matériau de base pour obtenir un produit fini. Même si des alternatives thérapeutiques avérées existent déjà,  ces méthodes  seront probablement de plus en plus importantes sur le plan thérapeutique et de nombreuses évolutions dans ce domaine pourraient voir le jour. Dans l’optique d’une manipulation des tissus impliqués, de la nature souvent industrielle des établissements de production et de l’éventualité d’une centralisation des tissus, ce secteur de la biomédecine doit être réglementé d’une manière différente que celui  de la transplantation des tissus.

L’AMM limite cette prise de position aux tissus destinés à des transplantations  et publie les Recommandations suivantes pour ce secteur de la biomédecine :

  1. Les médecins ont le devoir fondamental de traiter leurs patients à partir de leurs meilleures connaissances et compétences possibles. Cela ne signifie toutefois pas se procurer des tissus humains à des fins thérapeutiques d’une manière non éthique ou illégale. L’obtention des tissus doit toujours prendre en considération les droits de l’homme et  les principes de l’éthique médicale.
  2. Pour permettre la disponibilité de tissus à des fins de transplantation, les médecins doivent informer les donneurs potentiels et/ou leurs familles sur la possibilité de donner des tissus. Dans le cas d’un don à la fois d’organe et de tissu, il convient simultanément de fournir les informations et d’obtenir un consentement.
  3. Il faut veiller à ce que le don de tissus soit un acte volontaire. Le consentement du donneur ou de sa famille parfaitement éclairé et n’ayant donné lieu à aucune coercition est indispensable pour toute utilisation de tissu humain à des fins de transplantation. La prise de décision libre et éclairée est une procédure nécessitant l’échange d’informations et leur compréhension ainsi que l’absence de toute coercition. Les prisonniers et autres personnes en détention n’étant pas en mesure de donner leur consentement en toute liberté et pouvant être sujets à une coercition, leurs tissus ne doivent pas être utilisés à des fins de transplantation, sauf pour les membres de leur famille proche.
  4. Les incitations financières telles que des paiements directs  pour obtenir un don de tissu à des fins de transplantation  doivent être bannies de la même manière que pour des transplantations d’organes. Toutes les autres étapes telles que l’approvisionnement,  les tests, le traitement, la conservation, le stockage et l’attribution de prélèvements tissulaires, ne doivent pas non plus faire l’objet d’une transaction commerciale.
  5. Si à la fois des organes et des tissus peuvent être prélevés sur un donneur potentiel pour une greffe ultérieure, le don d’organe doit être prioritaire sur le don de tissu.
  6. Le don posthume de tissu  à un receveur désigné (don direct au-delà de la  famille proche) doit être évité. Un don effectué par quelqu’un de son vivant requiert deux conditions :
    a) Prouver le lien personnel direct existant entre le donneur et le receveur (relations de sang, époux) et
    b) Exclure un intérêt matériel potentiellement coercitif.
  7. Pour les dons posthumes de tissus, l’AMM demande à ce que le constat de décès soit effectué conformément à la  Déclaration de Sydney sur la Détermination de la Mort.
  8. Le risque de transmission de maladies (par ex. infections, tumeurs malignes) par des tissus greffés doit être minimisé par des tests appropriés non seulement  conformes aux normes standards mais reflétant le niveau scientifique et technologique  atteint par le pays concerné dans le domaine médical.
  9. Dans le cas d’un retard dans le diagnostic d’une maladie infectieuse ou d’une tumeur maligne sur le donneur, une alerte doit être immédiatement diffusée à tous les receveurs de tissus afin de mettre en place les mesures de précaution qui s’imposent.
  10. Il faut éviter toute contamination au moment du prélèvement, du stockage, du traitement et de la greffe des tissus.
  11. Des protocoles d’attribution  non éthiques de greffes tissulaires doivent être bannis. Les attributions doivent reposer sur des indications médicales, sur l’urgence et sur les perspectives de réussite.
  12. Des études expérimentales et cliniques, tout comme des débats ouverts sur les principes éthiques et moraux de la société, sont importants pour établir de nouvelles méthodes de traitement. L’ensemble des études expérimentales et cliniques doivent être menées conformément à la  Déclaration d’Helsinki de l’AMM..  Les scientifiques et les médecins doivent informer constamment le public des évolutions de la biomédecine et de ses solutions thérapeutiques.
  13. L’échange international de tissus à des fins de transplantation doit être réglementé correctement selon les standards convenus.
  14. Les informations sur les donneurs de tissues doivent être enregistrées et préservées par les centres de transplantation nationaux et doivent être fournies uniquement si le donneur de son vivant ou la famille du donneur décédé fournit un consentement libre et éclairé.

Adoptée par la 60e Assemblée générale de l’AMM, New Delhi, Inde, Octobre 2009
et révisée par la 71e Assemblée générale de l’AMM (en ligne), Cordoue, Espagne, Octobre 2020

 

PREAMBULE

La recherche sur les cellules souches fait aujourd’hui partie des domaines de la biotechnologie où la croissance est la plus rapide.

Les cellules souches peuvent être prélevées sur un tissu formé (cellules souches adultes) ou dans le sang placentaire via le cordon ombilical. Ces sources de prélèvement ne donnent lieu, a priori, à aucun dilemme éthique particulier.

On peut aussi obtenir des cellules souches d’un embryon en formation (cellules souches embryonnaires). L’obtention et l’utilisation de ces cellules souches soulèvent des questions éthiques spécifiques et, pour certaines personnes, peuvent s’avérer problématiques. La recherche peut également recourir aux cellules souches pluripotentes induites, que l’on peut obtenir à partir de tissus adultes et qui, dans certains cas, peuvent être équivalentes aux cellules souches embryonnaires d’un point de vue fonctionnel.

Certaines juridictions ont interdit l’utilisation de cellules souches embryonnaires D’autres ont autorisé l’usage d’embryons dits « en excédent » issus de procédures de fécondation in vitro à des fins de recherche, mais la production d’embryons à seule fin de recherche peut être interdite. D’autres juridictions n’ont pas de loi ou de règlementation spécifique concernant les cellules souches embryonnaires.

Les embryons humains sont considérés par certaines personnes comme relevant d’un statut éthique spécifique. Ce débat divise les spécialistes de l’éthique, les philosophes, les théologiens, les cliniciens, les scientifiques, les professionnels de santé, le grand public et les législateurs.

La fécondation in vitro implique la production d’embryons à l’extérieur du corps humain Dans de nombreux cas, certains des embryons produits ne sont pas nécessaires pour parvenir à une ou plusieurs grossesses. Ceux qui ne sont pas utilisés peuvent être donnés pour le traitement d’autres personnes, pour la recherche ou stockés pendant un certain temps avant d’être détruits.

Les cellules souches peuvent servir à la recherche sur la biologie du développement, la physiologie humaine et la pathogenèse. Il existe actuellement de nombreux programmes de recherche sur l’utilisation des cellules souches pour traiter des maladies humaines. Les thérapies par cellules souches adultes, parmi lesquelles l’utilisation de moelle osseuse, de sang ombilical ou de cellules souches dérivées du sang à des fins de transplantation, reposent sur plusieurs progrès cliniques importants et largement confirmés. En revanche, les études cliniques n’ont pas encore validé l’utilisation des cellules souches embryonnaires à des fins thérapeutiques.

Les cellules souches embryonnaires peuvent cependant se révéler supérieures aux cellules pluripotentes induites pour certaines applications. C’est pourquoi la recherche sur les cellules souches embryonnaires pourrait demeurer nécessaire. Certains experts anticipent le recours à un éventail de thérapies basées sur les cellules souches, y compris la transplantation de tissus génétiquement compatibles. Il est cependant trop tôt pour évaluer les probabilités de succès d’une thérapie basée sur les cellules souches.

Les opinions représentées au sein du grand public concernant la recherche sur les cellules souches sont aussi variées que celles des médecins et des scientifiques.  Le débat public porte principalement sur les inquiétudes que suscitent la mauvaise utilisation de la technologie, l’éventuel préjudice pour les patients et l’utilisation des embryons. Les produits issus de la recherche sur les cellules souches peuvent également poser des risques inédits, parce qu’on ignore leurs effets à long terme sur la santé, comme d’éventuelles mutations.

Il est probable que l’adoption de lois conformes aux principes éthiques établis rassurerait de nombreuses personnes dans le grand public, en particulier si de telles lois font l’objet d’une application et d’un suivi sérieux et fiables.

 

RECOMMANDATIONS

  1. Dans la mesure du possible, la recherche devrait être menée sur des cellules souches qui ne sont pas d’origine embryonnaire. La recherche sur des cellules souches issues d’embryons surnuméraires après une opération de procréation in vitro ne devrait avoir lieu que s’il n’est pas possible d’utiliser d’autres types de cellules souches (notamment les cellules pluripotentes induites) pour obtenir les résultats escomptés. Toute recherche et toute autre utilisation devrait être conforme à la résolution de l’AMM sur la non-commercialisation des éléments humains de reproduction.
  2. Toutes les recherches sur les cellules souches, quelle que soit leur origine, doivent être menées en respectant les principes éthiques établis et avec le consentement éclairé des personnes concernées. La législation, existante et à venir, doit également respecter ces principes afin d’éviter toute confusion ou tout conflit entre la loi et l’éthique
  3. Les principes éthiques devraient si possible être conformes aux accords internationaux En reconnaissant que divers groupes ont des opinions très différentes sur l’utilisation, notamment, des cellules souches embryonnaires, ces principes devraient être suffisamment flexibles pour permettre aux différentes juridictions de règlementer de manière appropriée leur niveau de recherche.

Adoptée par la 60ème Assemblée Médicale Mondiale, Delhi, octobre 2009
Et révisée par la 73ème Assemblée générale de l’AMM, Berlin, Allemagne, octobre 2022

 

PRÉAMBULE

  1. Le terme général « santé numérique » désigne l’utilisation des technologies de l’information et de la communication en médecine et dans d’autres professions de santé pour la prise en charge des maladies et des risques sanitaires et pour la promotion du bien-être. Ce terme recouvre la santé électronique (e-santé) et des domaines en plein essor comme l’utilisation de technologies numériques de pointe (notamment les mégadonnées, la bioinformatique et l’intelligence artificielle). Cette définition englobe en outre la télésanté, la télémédecine et la santé mobile.
  2. Le terme « santé numérique » et le terme « e-santé » peuvent être employés indifféremment. Ces termes recouvrent également les termes suivants : « télésanté » ou « télémédecine » désignent tous les deux l’utilisation des technologies de l’information et de la communication pour la prestation de services de santé et la communication d’informations de santé à distance (longue ou courte). Ils sont employés pour désigner les services cliniques à distance, y compris le suivi des patients en temps réel comme dans les services de soins intensifs. Ils peuvent également être employés pour une consultation entre un patient et son médecin lorsqu’ils ne peuvent pas se voir pour des raisons d’emploi du temps ou de préférence, ou encore parce que le patient est empêché, par exemple par un handicap physique. Ils peuvent enfin désigner une consultation entre deux médecins ou plus. La différence entre les deux termes est que « télésanté » s’emploie également pour les services à distance, cliniques comme non-cliniques (services de prévention, recherche, formation initiale et formation continue destinée aux professionnels de santé).
  3. Les innovations technologiques, l’expansion croissante et le prix de plus en plus abordable des dispositifs mobiles ont permis une multiplication et une diversification des services de santé numérique, à la fois dans les pays du Nord et ceux du Sud. Dans le même temps, ce secteur relativement récent et en pleine évolution n’est encore que peu règlementé, ce qui pourrait avoir des conséquences pour la sécurité des patients.
  4. La santé numérique doit avoir pour ambition d’améliorer la qualité des soins, la sécurité des patients et l’équité d’accès à des soins qui ne seraient pas disponibles autrement.
  5. Les soins de santé numérique se distinguent des soins conventionnels pour ce qui est du médium utilisé, de son accessibilité, de ses effets sur la relation entre médecin et patient et sur les principes traditionnels applicables aux soins dispensés au patient.
  6. L’essor et l’utilisation de la santé numérique ont élargi l’accès aux soins de santé et à l’éducation à la santé à la fois dans les situations ordinaires et dans les situations d’urgence. Dans le même temps, il convient de tenir compte de leur effet sur la relation entre le médecin et le patient, la responsabilité, la sécurité du patient, les interactions entre plusieurs acteurs, la vie privée et la confidentialité des données, l’équité de l’accès aux services de santé et les autres principes sociaux et éthiques. Toutefois, la portée et l’application de la santé numérique, de la télémédecine ou de la télésanté dépendent du contexte. Des facteurs comme les ressources humaines de la santé, l’étendue de la zone desservie par les services de santé et le niveau des établissements de santé devraient également être pris en considération.
  7. Les médecins devraient être impliqués dans l’élaboration et la mise en œuvre des solutions de santé numérique utilisables dans les soins de santé, afin d’assurer qu’elles répondent aux besoins des patients et des professionnels de santé.
  8. Conformément au mandat de l’AMM, cette prise de position s’adresse prioritairement aux médecins et concerne leur rôle dans le système de soins de santé. L’AMM encourage cependant toutes les autres personnes concourant aux soins de santé à définir de tels principes et à les respecter, dans la mesure où ils s’appliquent à leur rôle au sein du système de santé.

Autonomie du médecin

  1. La prestation de soins optimaux impose des limites raisonnables à la relation entre médecin et patient, qui doivent être les mêmes en médecine numérique qu’en médecine en face à face. La santé numérique peut compromettre l’équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle du médecin en raison de sa disponibilité théoriquement permanente. Le médecin devrait informer les patients de sa disponibilité et recommander d’autres services lorsqu’il n’est pas disponible.
  2. Le médecin doit exercer son autonomie professionnelle pour décider s’il serait approprié de recourir à une consultation à distance. Cette autonomie suppose également de tenir compte du type de consultation prévue, de l’aisance du médecin avec ce médium et de l’évaluation qu’il fait, avec le patient, du confort de ce dernier dans ce type de soins.

Relation entre médecin et patient

  1. Les consultations face à face devraient être la norme lorsqu’une auscultation est nécessaire pour établir un diagnostic, ou lorsque le médecin ou le patient souhaite une communication en personne dans le cadre de l’établissement d’une relation de confiance entre médecin et patient. Les consultations face à face peuvent être préférables dans certaines circonstances pour identifier certains signes non verbaux, pour surmonter des difficultés de communication ou pour discuter de sujets sensibles. Dans l’idéal, une relation médecin-patient dans un cadre de santé numérique devrait être basée sur une relation préexistante et une connaissance suffisante des antécédents médicaux du patient.
  2. Cependant dans une situation grave et urgente, ou lorsqu’aucun médecin n’est accessible autrement, le recours à la télémédecine s’impose même en l’absence de relation médecin-patient préexistante. Le recours à la télémédecine est aussi possible lorsqu’un médecin ne peut être présent dans un délai sûr et acceptable ou pour la prise en charge à distance d’un patient, par exemple lorsque le patient assure lui-même sa prise en charge, pour une maladie chronique ou le suivi postérieur à un traitement initial qui s’est révélé sûr et efficace.
  3. Tout médecin proposant des services de télémédecine doit être familier de la technologie utilisée ou recevoir des ressources, une formation et un guidage suffisants pour une communication numérique efficace. En outre, le médecin devrait s’efforcer d’assurer la meilleure qualité possible de communication pendant une consultation de santé numérique. Il est également important que le patient soit à l’aise avec la technologie employée. Toute déficience technique significative doit être consignée dans le compte-rendu de la consultation et signalée, le cas échéant.
  4. La relation entre médecin et patient est fondée sur une confiance et un respect mutuels. Il est donc essentiel que le médecin et le patient soient en mesure de s’identifier mutuellement et de manière fiable lors d’un recours à la télémédecine. On doit cependant admettre que parfois des tiers ou des « représentants légaux » tels que des membres de la famille puissent être associés à la consultation : dans les cas de personnes mineures, fragiles, âgées ou en cas d’urgence. 
  5. Le médecin doit donner au patient des indications claires et explicites sur la personne chargée des éventuels suivi et poursuite des soins pendant la consultation de télémédecine.
  6. En cas de consultation numérique entre deux ou plusieurs professionnels, le médecin traitant demeure responsable des soins apportés au patient et de leur coordination. Le médecin traitant reste responsable de la supervision des protocoles, des entretiens et du suivi des dossiers médicaux en tout lieu et en toute circonstance. Les médecins qui assurent la consultation doivent être en mesure de contacter d’autres professionnels et techniciens de santé, ainsi que des patients, en temps utile.

Consentement éclairé

  1. Pour être authentique, le consentement éclairé suppose que le patient soit informé, soit en capacité de donner son consentement et qu’il le donne pour le type de santé numérique utilisé. Le patient doit recevoir toutes les informations nécessaires au sujet des caractéristiques de la santé numérique en général et de la télémédecine en particulier. Cela comprend notamment le fonctionnement de la télémédecine, la prise de rendez-vous, les éventuels manquements au respect de la vie privée, la possibilité d’une défaillance technique y compris d’une violation de la confidentialité, l’éventuelle utilisation secondaire des données le concernant, les protocoles de contact pendant une consultation virtuelle, les politiques de prescription et de coordination des soins avec d’autres professionnels de santé. Ces informations doivent être communiquées clairement et intelligiblement, sans contrainte ni influence indue sur les choix du patient, tout en tenant compte du niveau de connaissance de santé de celui-ci et des éventuelles limitations de ressources spécifiques au type de santé numérique utilisée.

Qualité des soins

  1. Le médecin doit assurer que les soins dispensés par le biais d’outils de santé numérique soient au moins équivalents à tout autre type de soins pouvant être proposé au patient dans ce contexte, dans ce lieu et à ce moment, compte tenu de la disponibilité des services de soins non virtuels. Si cette norme de soins ne peut être atteinte par le biais des technologies numériques, le médecin se doit d’en informer le patient et de proposer une autre forme de prestation de soins.
  2. Le médecin devrait disposer, lorsque cela est possible, de protocoles clairs et transparents, comme des directives de pratiques cliniques pour guider sa prestation de soins dans le cadre de la télésanté, tout en ayant conscience que les circonstances peuvent exiger certaines modifications. Toute modification des directives existantes relatives aux pratiques cliniques visant à les adapter au contexte numérique devrait être approuvée par l’organisme ou l’association régissant ou régulant la discipline. Si la solution de santé numérique est assortie d’une assistance automatique à la pratique clinique, celle-ci doit être strictement fondée sur les pratiques promues par la profession et soustraite à l’influence de tout intérêt économique.
  3. Le médecin proposant des services de santé numérique devrait suivre les protocoles et procédures règlementaires applicables en matière de consentement éclairé (verbal, écrit et consigné), de confidentialité et de respect de la vie privée, de conservation de documents et justificatifs, de propriété des dossiers des patients et de comportement approprié au téléphone/en visioconférence.
  4. Le médecin assurant des soins par télésanté devrait conserver un compte-rendu clair et détaillé des conseils dispensés à son patient, des informations sur lesquelles il a fondé ses recommandations et du consentement éclairé de son patient.
  5. Un médecin devrait être conscient et tenir compte des difficultés spécifiques et des incertitudes éventuelles qui se posent lorsqu’il est en contact avec le patient via des dispositifs de télécommunication. Il doit être prêt à recommander une consultation traditionnelle en sa présence à chaque fois que cela est possible s’il estime qu’elle est dans l’intérêt du patient ou qu’elle permettrait une meilleure adhésion du patient au traitement.
  6. Il convient d’identifier dûment les avantages et les inconvénients de la santé numérique dans les situations d’urgence. S’il est indispensable de recourir à la télémédecine dans un cas urgent, les conseils et les propositions de traitement dépendront de la gravité de l’état du patient et l’aisance de ce dernier en matière de technologie et de santé. Pour assurer la sécurité du patient, les organisations dispensant des services de télémédecine devraient établir des protocoles d’orientation dans les situations d’urgence.

Résultats cliniques

  1. Les organisations proposant des programmes de santé numérique devraient en effectuer le suivi et s’efforcer de toujours améliorer la qualité de leurs services afin de parvenir aux meilleurs résultats cliniques possibles.
  2. Les organisations qui proposent des programmes de santé numérique devraient disposer d’un protocole systématique de recueil, d’évaluation, de suivi et de compte-rendu des résultats de santé, de la sécurité des données et de l’efficacité clinique de leurs programmes. Il convient de déterminer et d’utiliser des indicateurs de qualité. Comme pour toutes les interventions de santé, l’efficacité, l’efficience, la sécurité, la faisabilité et le rapport qualité-prix des technologies numériques doivent être évalués. Il conviendrait de partager les données relatives à l’assurance qualité et à l’amélioration du service pour une utilisation plus équitable.
  3. Les structures utilisant la santé numérique sont instamment invitées à signaler toutes les conséquences involontaires de ces technologies afin d’améliorer la sécurité du patient et de faire progresser ce domaine. Les pays sont encouragés à intégrer ces principes à leur législation et à leur règlementation.

Équité des soins

  1. Bien que la santé numérique puisse permettre à des populations isolées et mal desservies un meilleur accès aux soins de santé, elle peut également exacerber des inégalités existantes : culturelles, d’âge, d’appartenance ethnique, de statut socioéconomique ou de rapport à l’écrit, entre autres. Les médecins doivent être conscients que certains patients pourraient ne pas disposer ou ne pas avoir les moyens de ces technologies numériques, accroissant ainsi le fossé entre riches et pauvres en matière de soins de santé.
  2. Les technologies numériques devraient faire l’objet d’une mise en œuvre et d’un suivi attentif pour éviter les inégalités d’accès à ces technologies. Le cas échéant, les services sociaux ou de santé devraient faciliter l’accès à ces technologies dans le cadre des prestations sociales de base, tout en prenant toutes les précautions requises pour assurer la confidentialité et la sécurité des données. L’accès aux technologies vitales ne saurait être refusé à quiconque pour des raisons financières ou d’illectronisme.

Confidentialité et sécurité des données

  1. Pour assurer la confidentialité des données, des mesures reconnues de protection des données s’imposent. Les données obtenues au cours d’une consultation numérique doivent être sécurisées par des mesures appropriées et perfectionnées pour éviter qu’elles ne soient divulguées ou consultées par un tiers non autorisé. Si une fuite de données survenait, le patient devrait en être immédiatement averti, conformément à la loi.
  2. Les technologies de santé numérique comprennent généralement la mesure ou la saisie manuelle de données médicales, physiologiques, environnementales, de mode de vie et d’activité afin de remplir leur principal objectif. La grande quantité de données ainsi générées peut également servir à la recherche et à d’autres fins pour améliorer les soins de santé et la prévention de maladies. Les utilisations secondaires de données personnelles de santé mobile peuvent cependant être attentatoires ou oppressives.
  3. Pour assurer l’authentique consentement éclairé du patient et garantir ses droits, il convient de mettre en œuvre des politiques robustes et des garde-fous suffisants pour réguler et sécuriser le recueil, le stockage, la protection et le traitement des données des utilisateurs de la santé numérique, notamment des données personnelles de santé.
  4. Si les patients pensent que leur droit à la vie privée a été enfreint, ils doivent pouvoir adresser une réclamation à la personne chargée de la confidentialité des données ou aux autorités compétentes, conformément à la règlementation locale.

Principes juridiques

  1. Il convient de définir un cadre juridique à même de répondre à toute mise en cause de la responsabilité qui pourrait émerger de l’utilisation de technologies numériques. Les médecins ne devraient pratiquer la télémédecine que dans les pays/juridictions pour lesquels ils disposent d’une autorisation d’exercer, et seulement dans le cadre légal applicable dans ledit pays ou ladite juridiction. Les médecins devraient assurer que leur police d’assurance professionnelle couvre la télémédecine et la santé numérique.
  2. Il convient de mettre en place des modèles de remboursement, en consultant les associations médicales nationales et les prestataires de soins de santé afin d’assurer que les services de soins numériques des médecins soient convenablement remboursés.

Principes spécifiques à la technologie de santé mobile

  1. La santé mobile (m-santé) est une forme de télésanté (e-santé) pour laquelle il n’existe pas de définition fixe. Elle a été décrite comme la pratique de la médecine et de la santé publique par le truchement de dispositifs mobiles tels que des téléphones portables, des dispositifs de surveillance de patients, les assistants numériques personnels (ANP) et d’autres systèmes à utiliser avec des dispositifs mobiles, parmi lesquels les messages vocaux et textos (SMS), les applications mobiles et le système de géolocalisation (GPS).
  2. Il convient de distinguer clairement les technologies de santé mobile utilisées pour favoriser un mode de vie sain de celles qui requièrent les compétences d’un médecin et relèvent des dispositifs médicaux. Cette dernière catégorie doit être règlementée adéquatement et les utilisateurs doivent être en mesure de vérifier la source des informations fournies, ces applications pouvant recommander des traitements non scientifiques ou non éprouvés. Ces informations doivent être complètes, claires, fiables, non techniques et facilement compréhensibles pour des profanes.
  3. Il convient d’améliorer l’interopérabilité, la fiabilité, la fonctionnalité et la sécurité des technologies de santé mobile par un travail concerté, notamment par l’élaboration de normes et de systèmes de certification.
  4. Les autorités compétentes doivent mener régulièrement des évaluations indépendantes et complètes en faisant appel à des experts de la médecine pour évaluer la fonctionnalité, l’intégrité des données, la sécurité des technologies de santé mobile et leur respect de la vie privée. Ces informations doivent être publiques.
  5. La santé mobile ne peut contribuer à améliorer les soins de santé que si les services qu’elle permet sont fondés sur des raisons médicales robustes. À mesure que la preuve est faite de son utilité clinique, il convient de publier ces observations dans des revues à comité de lecture et de permettre leur reproduction.

 

RECOMMANDATIONS

  1. L’AMM reconnaît l’intérêt de la santé numérique en complément des manières traditionnelles de prendre en charge la santé et de dispenser des soins de santé. L’objectif de la santé numérique devrait être d’améliorer la qualité des soins et l’équité d’accès à des services qui ne seraient pas disponibles autrement.
  2. L’AMM insiste sur le fait que l’utilisation de toutes les formes de santé numérique doit être conforme aux principes de l’éthique médicale tels qu’ils sont énoncés dans la Déclaration de Genève : le serment du médecin et le Code international d’éthique médicale.
  3. L’AMM recommande que la formation en matière de santé numérique et des compétences qu’elle suppose soient intégrées à l’enseignement de la médecine et à la formation continue.
  4. L’AMM demande instamment aux patients et aux médecins de faire preuve de discernement dans leur utilisation de la santé numérique et de garder à l’esprit ses implications et les éventuels risques qu’elle présente.
  5. L’AMM recommande de mener des recherches plus approfondies pour évaluer la sécurité, l’efficacité, le rapport coût-bénéfice et la faisabilité de la mise en œuvre de la santé numérique et son effet sur l’état de santé des patients.
  6. L’AMM recommande d’effectuer une veille des risques d’utilisation excessive ou inappropriée des technologies de santé numérique et leur éventuel effet psychologique sur les patients, aux fins d’assurer que les avantages de cette technologie l’emportent sur ses inconvénients.
  7. L’AMM recommande, à l’heure de recourir à la santé numérique, d’accorder une attention particulière aux patients handicapés (infirmités physiques, déficiences auditives ou visuelles) et aux patients mineurs.
  8. Le cas échéant, les associations médicales nationales devraient encourager l’élaboration et la tenue à jour de normes éthiques, de guides pratiques, de législations nationales et d’accords internationaux sur la santé numérique.
  9. L’AMM recommande que d’autres organes de règlementation, communautés, organisations et institutions professionnelles, ainsi que le secteur privé réalisent un suivi du bon usage des technologies numériques de la santé et diffusent largement leurs conclusions.

 

 

Adoptée par la 60e Assemblée Médicale Mondiale, New Delhi, Inde, Octobre 2009
et revisée par la 201e Session du Conseil de l’AMM à Moscou, Russie, Octobre 2015 

PREAMBULE

1. Cette politique vise à identifier les domaines où un conflit d’intérêts peut surgir au cours de l’exercice quotidien de la médecine et à aider les médecins à résoudre de tels conflits, dans le meilleur intérêt de leurs patients.  Un conflit d’intérêts se produit lorsque le jugement professionnel concernant les soins à apporter à un patient est influencé  de manière indue par des intérêts secondaires.

2. Dans certains cas, il peut suffire de reconnaître qu’un conflit réel ou potentiel existe. Dans d’autres cas, il peut être nécessaire de prendre des mesures spécifiques pour résoudre le conflit. Certains conflits d’intérêts sont inévitables et les conflits d’intérêt en médecine ne sont  pas intrinsèquement contraires à l’éthique. C’est la manière dont ils sont traités qui est essentielle.

3. Au delà de l’exercice clinique de la médecine et de la délivrance de soins, les médecins assument traditionnellement différentes fonctions  et poursuivent divers autres intérêts. Parmi ces intérêts,  la plupart louables et bénéfiques pour la société, figurent la participation à la recherche, l’éducation des futurs médecins ou la formation des médecins en exercice ainsi que des responsabilités administratives ou des fonctions de direction. Le secteur de la médecine ayant attiré des intérêts privés, il arrive que des médecins mettent leurs compétences également au service de ces intérêts, en occupant des postes de consultants (et parfois d’employés) dans des entreprises du secteur privé.

4. Même si la participation des médecins dans bon nombre de ces activités sera en fin de compte bénéfique pour le public, la priorité du médecin demeure la santé et le bien-être de ses patients. Les autres intérêts ne devraient pas entrer en conflit avec cette obligation première ou influencer les décisions cliniques (même de manière potentielle).

5. Tous les médecins ont le devoir moral d’analyser leur propre comportement dans l’optique d’éventuels conflits d’intérêts même si les conflits n’entrent pas dans le type d’exemples ou de situations traités dans ce document. Lorsqu’ils ne sont pas reconnus, les conflits d’intérêts peuvent sérieusement miner la confiance des patients dans la profession médicale et dans le praticien en particulier.

6. Les médecins peuvent éventuellement souhaiter profiter eux-mêmes de ressources supplémentaires telles que les sociétés de médecine, les associations médicales nationales ou les instances de contrôle. Ils devraient connaître dans ce cas la réglementation et les lois nationales en vigueur

RECOMMANDATION

Recherche

7. Les intérêts du clinicien et du chercheur peuvent ne pas être les mêmes. Si la même personne assume les deux fonctions, comme c’est souvent le cas, le conflit potentiel devrait être réglé en mettent en place des mesures appropriées pour protéger les patients, y compris en informant ces derniers du conflit potentiel.

Comme mentionné dans la Déclaration d’Helsinki:

7.1 La Déclaration de Genève de l’Association Médicale Mondiale engage les médecins dans les termes suivants : « La santé de mon patient sera mon premier souci » et le Code international d’éthique médicale énonce que « le médecin devra agir uniquement dans l’intérêt de son patient lorsqu’il lui procure des soins qui peuvent avoir pour conséquence un affaiblissement de sa condition physique ou mentale ».

7.2 La Déclaration d’Helsinki stipule que “Si l’objectif premier de la recherche médicale est de générer de nouvelles connaissances, cet objectif ne doit jamais prévaloir sur les droits et les intérêts des personnes impliquées dans la recherche.”

8. La recherche devrait être conduite avant tout pour faire progresser la science médicale. Un médecin ne devrait jamais faire passer  ses intérêts financiers avant le bien-être de son patient. Les intérêts des patients et l’intégrité scientifique devraient être prioritaires.

9. Il faut informer de l’ensemble des relations et intérêts matériels du chercheur-médecin  les éventuels participants à une recherche les comités d’éthique de la recherche, les instances de contrôle et de régulation concernées, les revues médicales, les participants à une conférence et le centre médical où est menée la recherche.

10. Tous les essais devraient être enregistrés et figurer dans un registre des recherches accessible au public

11. Un contrat clair devrait être signé par toutes les parties, y compris les sponsors, les chercheurs et les participants au programme,  avec un minimum de clarifications :

–  rémunération financière pour le chercheur-médecin (qui ne doit pas excéder la perte financière liée au non exercice de son activité normale de médecin)

–  le propriétaire des résultats de la recherche (qui seront détenus par le chercheur)

–  le droit du chercheur de publier des résultats négatifs,

–  Le droit du chercheur de fournir des informations aux personnes participant aux essais à tout moment en cours d’étude.

12. Les chercheurs-médecins devraient exercer un contrôle, avoir un accès complet à toutes les données des essais et refuser les clauses de non divulgation.

13. Indépendamment des résultats de la recherche, les chercheurs-médecins devraient veiller à ce que la présentation ou la publication des résultats ne soit pas indûment retardée ou bloquée.

14. Des primes ne devraient pas être acceptées pour avoir fourni le nom des participants potentiels à la recherche et les informations sur les patients ne devraient pas être transmises sans le consentement des patients, sauf si la réglementation ou les instances de contrôle l’imposent.

15. Tout dédommagement reçu des sponsors des essais  ne devrait pas excéder la perte financière liée au non exercice de son activité normale de médecin et devrait être à la hauteur des efforts du médecin menant la recherche. Lorsque le recrutement demande une grande implication et du temps, une rémunération complémentaire peut être envisagée pour dédommager le chercheur clinicien ou l’institution en particulier pour les efforts et le temps consacrés au recrutement de participants à la recherche.  Des bonus progressifs versés dans le but d’augmenter le nombre de participants à la recherche ne devraient pas être acceptés.

16. Les chercheurs-médecins devraient refuser d’étudier des demandes de subvention ou des soumissions d’articles de recherche de la part de collègues ou de concurrents si leurs relations risquent d’influencer leur jugement sur le dossier.

17. Des paiements ou des dédommagements de quelque nature que ce soit ne devraient pas être liées aux résultats des essais cliniques. Les chercheurs-médecins ne devraient pas avoir d’intérêts financiers dans une entreprise subventionnant un essai ou un produit étudié si ces intérêts risquent de varier positivement ou négativement en fonction des résultats de l’essai ; il ne devrait pas y avoir d’enjeu financier direct pour eux  lié aux résultats de l’essai. Ils ne devraient pas acquérir, acheter ou vendre  des actions de l’entreprise pendant la période des essais et jusqu’à ce que les résultats aient été publiés. Ces consignes pourraient ne pas s’appliquer aux médecins qui ont mis au point un médicament mais qui ne prennent pas part à la procédure de recrutement aux essais.

18. Les chercheurs-médecins devraient participer uniquement aux essais cliniques qui entrent dans le champ de leurs compétences médicales et devraient avoir une formation adéquate sur la conduite d’une recherche et sur les principes de l’éthique de la recherche.

19. Les droits d’auteur devraient être définis avant le début de l’essai et devraient être basés sur une importante contribution scientifique.

Les essais ne devraient pas interrompus uniquement pour des intérêts financiers

Education

20. Les besoins éducatifs des étudiants et la qualité de leur formation doivent être jaugés en fonction des meilleurs intérêts des patients. En cas d conflit d’intérêts, les intérêts du patient sont prioritaires.

21. Tout en reconnaissant que les élèves en médecine ont besoin d’une expérience sur des patients réels, les enseignants-médecins devraient veiller à ce que ces élèves  soient supervisés à la hauteur de leur niveau de formation.

22. Les patients devraient savoir qu’ils peuvent éventuellement être soignés en partie par des étudiants et des médecins en formation, y compris pour les procédures et les actes chirurgicaux, et devraient pouvoir donner ou non leur consentement éclairé.

23. Les patients devraient connaître l’identité et le niveau de formation des personnes qui participent à leurs soins.

24. Le refus du patient de se faire soigner par du personnel en formation ne devrait pas affecter l’importance et la qualité des soins qu’il recevra ensuite.

Auto-prescriptions et honoraires partagés

25. Toutes les prescriptions et ordonnances (qu’il s’agisse de biens ou de services spécifiques) devraient reposer sur une évaluation objective de la qualité du médecin (ou du service) auquel le patient est adressé.

26. Le fait pour des médecins d’adresser des patients à des établissements médicaux (par ex. des laboratoires) où ils ne sont pas professionnellement actifs mais où ils ont un intérêt financier s’apparente à de l’auto-prescription. Potentiellement cette pratique peut influencer beaucoup les décisions médicales et n’est pas jugée acceptable à moins que la communauté en question n’ait besoin d’un établissement et qu’il n’y en ait pas d’autres (par ex. dans les petites communautés rurales). Le médecin dans ce cas ne devrait pas percevoir davantage d’argent qu’un investisseur classique.

27. Des commissions (ou partage des honoraires)  existent lorsqu’un médecin perçoit de l’argent pour avoir adressé un patient à un praticien donné ou avoir prescrit un service spécifique donnant lieu au versement d’honoraires. Cette pratique est inadmissible.

Cabinets médicaux

28. Pour des raisons de commodités pour les patients, de nombreux cabinets médicaux sont situés à proximité d’autres établissements médicaux comme par ex. des laboratoires, des pharmacies et des opticiens. Le médecin ne devrait pas recevoir de rémunération financière ou d’autres avantages pour avoir adressé des patients à ces établissements ou pour être installé à proximité de ces derniers. Un immeuble appartenant à un  médecin ne devrait pas être loué à des prix supérieurs ou inférieurs à ceux du marché.

29. Les produits non médicaux (ceux n’ayant rien à faire avec la santé des patients ou l’exercice de la médecine) et des produits médicaux scientifiquement non validés scientifiquement ne devraient pas être vendus dans un cabinet médical. Si des produits médicaux scientifiquement validés sont vendus en cabinet médical, leur prix de vente devrait se limiter aux coûts engendrés pour se les procurer  et les produits devraient être proposés d’une manière telle que le patient ne se sent pas contraint de les acheter.

Conflits entre entreprises/établissements

30. Les établissements de santé en particulier sont de plus en plus sujets à de nombreuses pressions menaçant plusieurs de leurs missions et beaucoup de centres médicaux académiques ont commencé à rechercher d’autres sources de revenus. Il faudrait instaurer des politiques veillant à ce que ces nouvelles sources ne soient pas en conflit direct avec les valeurs et la mission de l’établissement (par ex. financement des écoles de médecine par l’industrie du tabac).

31. Les organisations et les institutions médicales (y compris mais sans s’y limiter, les écoles de médecin, les hôpitaux, les associations médicales nationales et les centres de recherches) devraient établir et si possible appliquer des directives régissant les conflits d’intérêts, à l’attention de leurs employés et de leurs membres.

32. Les chercheurs-médecins et autres tireront profit de la création de directives officielles régissant les conflits d’intérêts. Elles les aideront à faire connaître et à identifier clairement les situations où en raison d’un éventuel conflit, ils devraient refuser de participer à une étude ou à une autre activité.

33. Les établissements de santé académiques devraient fixer des limites précises entre les comités chargés des investissements, le transfert technologique et la branche recherche de l’établissement.

34. Des politiques écrites devraient contenir des directives sur la divulgation ou le refus de participation à une procédure décisionnaire, à l’attention des personnes qui sont en situation conflictuelle parce qu’une recherche est sponsorisée, parce qu’il existe des contrats de consultants, des holdings privés ou des accords de licence.

Adoptée par la 55e Assemblée générale de l’AMM, Tokyo, Japon, Octobre 2004,
et révisée par la 60e Assemblée générale de l’AMM, New Delhi, Inde, Octobre 2009
et par la 71e Assemblée générale de l’AMM (en ligne), Cordoue, Espagne, Octobre 2020

PRÉAMBULE

Pour traiter leurs patients, les médecins utilisent des médicaments, des instruments, des outils de diagnostic, des équipements et des produits conçus et fabriqués par des entreprises commerciales. L’industrie dispose de moyens pour financer des programmes de recherche et de développement coûteux qui nécessitent impérativement les connaissances et l’expérience de médecins. En outre, le soutien de l’industrie permet de poursuivre la recherche médicale, les conférences scientifiques et la formation médicale permanente qui peuvent être bénéfiques aux patients et à l’ensemble du système de santé. La combinaison des ressources financières et des connaissances sur les produits du côté de l’industrie et des connaissances médicales du côté des médecins permet le développement de nouvelles méthodes diagnostiques, de nouveaux médicaments, de nouvelles thérapies et de nouveaux traitements pouvant conduire à de grandes avancées médicales.

Il existe toutefois des conflits d’intérêts entre les entreprises commerciales et les médecins. Ces conflits peuvent porter préjudice aux soins des patients et à la réputation de la profession médicale. Le devoir du médecin est d’évaluer objectivement ce qui est le mieux pour le patient. En parallèle, les entreprises commerciales escomptent des profits pour les propriétaires lorsqu’elles vendent leurs produits et elles se concurrencent auprès de la clientèle. Des considérations commerciales peuvent nuire à l’objectivité du médecin, notamment si le médecin est d’une certaine façon dépendant de l’entreprise.

Plutôt que d’interdire toute relation entre les médecins et l’industrie, il est préférable d’établir des directives pour ces relations. Ces directives doivent contenir les principes essentiels de communication des informations, de transparence, de résistance aux conflits d’intérêts et de préservation de l’indépendance clinique du médecin afin qu’il puisse agir au mieux des intérêts des patients.

Ces directives qui règlementent les relations entre médecins et entreprises commerciales doivent être entendues à la lumière des principes éthiques de l’AMM, tels qu’ils sont décrits dans la Déclaration de Genève, la prise de position sur le conflit d’intérêts, la déclaration de Séoul sur l’autonomie professionnelle et l’indépendance clinique et le code international d’éthique médicale de l’AMM.

Les principes d’autonomie et d’indépendance clinique des médecins devraient se refléter dans toutes les décisions prises par les médecins pour les patients, quel soit leur environnement de travail : subventionné par l’État, privé, à but lucratif ou non, financé par des investisseurs, la compagnie d’assurance d’un employeur ou autre.

Les cursus des facultés de médecine et des programmes d’internat et de résidence devraient comporter des cours sur la relation entre entreprises et la profession médicale à la lumière des principes éthiques et des valeurs de la profession.

 

RECOMMANDATIONS

Conférences médicales

  1. Ces directives relatives aux conférences médicales s’appliquent, le cas échéant, aux évènements organisés sous l’égide d’entreprises, ainsi qu’aux évènements éducatifs et aux activités de promotion, y compris de dispositifs médicaux, parrainés par une entreprise commerciale. 
  1. Les médecins peuvent participer à des conférences médicales subventionnées pour tout ou partie par une entité commerciale si ces conférences respectent les principes suivants :
    • Le principal objectif de la conférence est l’échange d’informations professionnelles ou scientifiques dans l’intérêt des soins au patient.
    • L’hébergement pendant la conférence doit être secondaire à l’échange professionnel d’informations et ne doit pas excéder ce qui est habituellement et généralement acceptable localement.
    • Les médecins ne perçoivent pas de rémunération directement d’une entreprise commerciale pour couvrir les frais de voyage et de séjour (les leurs ou ceux d’une personne qui les accompagne) à l’occasion de la conférence ou à titre de compensation pour le temps qu’ils y consacrent, à moins que la loi ou la politique de leur association médicale nationale l’autorise ou à moins que cette compensation remplace des honoraires raisonnables rétribuant une prise de parole lors de la conférence.
    • Le nom de l’entreprise commerciale apportant un soutien financier est rendu public pour permettre à la communauté médicale et au public d’évaluer justement les informations communiquées à la lumière de la source de financement. De plus, les organisateurs de la conférence et les conférenciers se doivent de faire preuve de transparence et d’informer les participants de tout lien financier qui pourrait influencer les activités d’enseignement ou toute autre retombée de la conférence.
    • Conformément aux Directives de l’AMM pour les interventions médiatiques promotionnelles des médecins, la présentation d’un produit par un médecin est scientifiquement exacte, analyse objectivement toutes les autres options thérapeutiques possibles et n’est pas influencée par l’organisation qui subventionne l’évènement.
  1. Une conférence peut en outre se justifier au titre de la formation continue ou du perfectionnement professionnel que si elle répond aux principes suivants :
    • les entités commerciales qui les parrainent, telles que les laboratoires pharmaceutiques ou les entreprises du secteur des dispositifs et appareils médicaux, n’influencent ni le contenu, ni la présentation, ni le choix des intervenants ni la publication des résultats ;
    • les fonds engagés pour la conférence sont acceptés uniquement en tant que contribution aux frais généraux de la manifestation ;
    • l’indépendance des contenus de la conférence est garantie.

Cadeaux

  1. Afin de préserver le lien de confiance qui unit les patients et les médecins, ces derniers devraient décliner :
    • tout paiement en numéraire ou équivalent, ainsi que tout cadeau ou avantage personnel provenant d’une entité commerciale ;
    • les cadeaux visant à influencer la pratique clinique, y compris les incitations directes à la prescription.
  1. Les médecins pourraient accepter :
    • les cadeaux promotionnels si leur valeur est minime et si un tel cadeau n’est pas lié au fait que le médecin prescrive un certain médicament, utilise certains instruments ou matériaux ou adresse des patients à un certain établissement de santé ;
    • les cadeaux de courtoisie culturels, s’ils ne sont pas réguliers selon les normes locales, si leur valeur est minime et s’il n’a pas de lien avec la pratique de la médecine.

Recherche

  1. Un médecin peut effectuer des recherches financées par une entreprise commerciale, à titre individuel ou dans le cadre d’une institution, s’il se conforme aux principes énoncés ci-après :
    • Le médecin n’obéit qu’à la loi, aux principes et directives éthiques de la Déclaration d’Helsinki et au jugement clinique lorsqu’il mène des recherches. Il devrait se garder de toute pression extérieure concernant les résultats de ses recherches et ses publications.
    • Si possible, un médecin ou une organisation qui souhaite entreprendre des recherches, sollicite plusieurs entités commerciales pour les financer.
    • Les informations personnelles sur l’identité des patients impliqués dans les recherches ou des participants volontaires ne sont pas communiquées à l’entreprise partenaire sans le consentement des personnes concernées.
    • La rémunération versée au médecin pour sa recherche est basée sur le temps et les efforts qu’il y a consacrés. En aucun cas, cette somme ne saurait être liée aux résultats de la recherche.
    • Les résultats des recherches sont publiés en communiquant le nom de la société partenaire, accompagnés d’une mention indiquant qui est l’instigateur des recherches. Ce principe s’applique aussi bien à un subventionnement direct qu’indirect, total que partiel.
    • Les entités commerciales permettent la publication des résultats des recherches sans restriction.
    • Lorsque cela est possible, la recherche financée par les entreprises commerciales devrait être dirigée par des entités intermédiaires sans but lucratif, comme des instituts ou des fondations.

Affiliations à des entreprises commerciales

  1. Un médecin ne saurait s’affilier à une entité commerciale, par exemple en tant que consultant ou membre du comité scientifique sans que cette affiliation soit conforme aux principes énoncés ci-après :
    • L’affiliation ne porte pas atteinte à l’intégrité du médecin.
    • L’affiliation ne compromet pas les obligations du médecin vis-à-vis de ses patients.
    • L’affiliation, comme toute autre relation avec une entité commerciale est intégralement communiquée dans toutes les situations où cette information est utile, comme les conférences, les apparitions publiques, les articles, les comptes-rendus et les contributions susceptibles d’influencer les missions des associations médicales ou toute autre entité à but non lucratif.

Adoptée par la 51e Assemblée générale, Tel Aviv, Israël, Octobre 1999,
modifiée par la 60Assemblée Générale de l’AMM, New Delhi, Inde, Octobre 2009
et réaffirmée par la 212e session du Conseil de l’AMM, Santiago, Chili, Avril 2019

 

PREAMBULE

1. Certaines législations considèrent que les procédures médicales peuvent faire l’objet d’un dépôt de brevet.  Les brevets relatifs aux procédures  médicales portent souvent le nom de brevets sur les procédures  médicales. Un dépôt de brevet ou un brevet sur une procédure médicale confère des droits sur certaines techniques mais pas de droits sur de nouveaux  appareils.

2. Les brevets sur les procédures médicales sont interdits dans plus de 80 pays. Cette interdiction correspond aux négociations du Cycle d’Uruguay sur l’Accord du GATT sur les aspects des droits de la propriété intellectuelle liés au commerce (DPIC) : « Les Membres pourront aussi exclure de la brevetabilité (a) les techniques diagnostiques, thérapeutiques et chirurgicales pour le traitement des personnes ou des animaux » (Article 27).

3. L’objectif des brevets est d’encourager les investissements privés dans la recherche et le développement. Or, les médecins, en particulier ceux qui travaillent dans les établissements de recherche, bénéficient déjà d’éléments d’incitation à l’innovation et à l’amélioration de leurs compétences. Ces incitations sont notamment la notoriété, la carrière et l’obligation éthique et juridique d’offrir des soins médicaux de qualité (Code international d’éthique médicale). Les médecins sont déjà rémunérés pour ces activités et des fonds publics sont parfois mis à la disposition de la recherche médicale. L’argument selon lequel les brevets sont indispensables pour stimuler les découvertes de procédures médicales et selon lequel, s’ils n’existaient pas, les patients bénéficieraient de moins de procédures médicales bénéfiques, n’est pas convaincant lorsqu’existent ces autres incitations et mécanismes de financement.

4. Un autre argument voudrait que les brevets soient nécessaires  non pas pour stimuler la découverte mais pour le développement des produits. Cet argument ne tient pas non plus dans le cas des brevets sur les procédures médicales. Contrairement au développement d’un appareil qui exige un investissement dans l’ingénierie, les méthodes de production et la fabrication, le développement d’un brevet sur une procédure  médicale  repose sur les compétences intellectuelles et l’habileté manuelle acquises et perfectionnées par les médecins. Comme indiqué précédemment, si les médecins ont l’obligation de se consacrer à ces activités professionnelles ils en reçoivent aussi la récompense.

5. Les aspects éthiques des brevets sur les appareils médicaux sont sans rapport avec les aspects éthiques des brevets sur les procédures médicales. Les appareils sont fabriqués et distribués par des entreprises alors que les procédures médicales sont « fabriquées et distribuées » par les médecins. Les médecins ont des devoirs éthiques et juridiques envers leurs patients et des devoirs professionnels les uns envers les autres que n’ont pas les entreprises. Ce sont ces devoirs éthiques particuliers qui définissent notamment la médecine en tant que profession.

6. Il n’y a pas a priori de raison de croire que les détenteurs de brevets sur des procédures médicales les mettraient largement à disposition. Les détenteurs de brevets pourraient tenter de maximaliser leurs profits par une large diffusion au moyen d’une licence non exclusive assortie d’une redevance modeste. Ils pourraient aussi diffuser ces procédures de manière plus restreinte en facturant des prix plus élevés à ceux pour lesquels la procédure est  extrêmement importante et qui ont les moyens de la payer. La concurrence entre les  organisations de soins de santé pourrait pousser certaines d’entre elles à négocier des licences exclusives, voire des licences qui restreindraient fortement le nombre des personnes ayant accès à la procédure brevetée. De telles  licences pourraient constituer un avantage à une organisation en attirant des patients si cette organisation est en mesure de faire de la publicité  sur le fait  d’être la seule à proposer dans une région une procédure particulièrement appréciée. Ainsi, dans certains cas tout au moins les détenteurs de brevets médicaux préféreront probablement restreindre l’accès à leurs procédures médicales brevetées.

7. Les brevets sur les procédures médicales peuvent avoir des effets négatifs sur les soins de santé. L’existence d’un brevet sur une procédure médicale pourrait limiter l’accès aux soins médicaux nécessaires et de ce fait compromettre la qualité de ces soins. L’accès pourrait se trouver diminué pour les raisons suivantes:

7.1 Le coût de la prestation médicale serait probablement majoré du fait du paiement des droits et redevances d’exploitation et de l’augmentation de l’assurance médicale en couverture d’éventuels frais de litiges.

7.2 Certains médecins, bien que capables d’exécuter la procédure brevetée, pourraient ne pas obtenir la licence nécessaire. Le nombre de médecins bénéficiant de la licence d’exploitation pourrait être limité parce que certains médecins ne pourront pas acquitter ou ne paieront pas les droits de licence ou les royalties ou parce que le détenteur du brevet refusera de diffuser largement la licence. La limitation du nombre des licences pourrait, dans certains cas, restreindre le libre choix du médecin par le patient.

7.3 L’existence de brevets pourrait  empêcher les médecins de recourir même à des techniques non concernées par ces brevets. Les médecins pourraient  également s’interdire  d’instaurer de nouvelles procédures ou des procédures modifiées dans leur exercice.    Les appareils brevetés peuvent être labélisés s’ils sont brevetés mais pas les procédures. Par conséquent, on ne peut pas toujours savoir d’emblée si l’utilisation d’une technique viole un brevet. Mais comme l’ignorance ne constitue pas un moyen de défense en cas de violation, le médecin, en cas de doute, choisira simplement de s’abstenir d’utiliser la procédure.

8. L’instauration de brevets sur des procédures médicales peut aussi porter atteinte à la vie privée du patient et à l’obligation du médecin de respecter la confidentialité des dossiers médicaux des patients. En effet, lorsque les médecins exercent seuls ou en petits groupes, le moyen le plus efficace pour le titulaire du brevet de détecter d’éventuelles violations est de consulter les dossiers médicaux ou d’interroger les patients. La suppression des éléments d’identification des dossiers ne peut garantir la confidentialité, car quelques détails suffisent souvent à reconstruire l’identité des patients. Ce risque existe surtout dans les petites villes ou les cabinets relativement peu importants.

9. Les  médecins ont l’obligation éthique  à la fois d’enseigner leurs compétences et leurs techniques à leurs confrères et de mettre à jour continuellement leurs connaissances. Les brevets sur les procédures médicales peuvent s’avérer préjudiciables en la matière. Une fois qu’un brevet a été déposé sur une procédure, celle-ci  est entièrement divulguée (c’est l’une des conditions requises pour l’obtention d’un brevet). Toutefois, les praticiens sans licence n’ont pas le droit de l’utiliser. Le fait de limiter le nombre des utilisateurs enfreint l’esprit même du devoir éthique d’enseigner et de diffuser la connaissance. Cette limitation va également à l’encontre de l’obligation de formation continue car le médecin n’a aucun d’intérêt à acquérir des compétences qu’il ne peut pas utiliser légalement.

10. L’obligation d’enseigner et de transmettre la connaissance peut également être sapée si la possibilité de déposer un brevet conduit l’inventeur à retarder la publication ou la communication de ses résultats lors de conférences. Les médecins pourraient alors être tentés de garder le secret sur de nouvelles techniques tant qu’ils n’auront pas rempli toutes les formalités de dépose de brevet. En effet, toute utilisation publique d’une procédure  ou la publication de la description de la procédure avant le dépôt de la demande peut éventuellement invalider la demande de brevet.

11. Les médecins ont aussi l’obligation éthique  d’empêcher que l’appât du gain  influence le caractère libre et indépendant de leur jugement médical (Code international d’éthique médicale – Doc. 17.A). Le fait de briguer, d’obtenir ou d’utiliser un brevet portant sur une procédure médicale peut amener le médecin à enfreindre cette obligation. Les médecins détenteurs de brevets ou de licences pourraient  être tentés de plaider en faveur de ces procédures même en l’absence de toute indication, ou lorsqu’elles se sont pas les meilleurs dans un cas donné.  Les médecins qui n’ont pas de licence pour effectuer une procédure particulière pourraient refuser l’utilisation de ces procédures même si elle constitue dans le cas donné le meilleur choix thérapeutique.

12.  Pour finir, les obligations professionnelles des médecins d’exercer leur profession    avec conscience et dignité (Déclaration de Genève) pourraient être mises à mal par l’existence de brevets sur des procédures médicales. Le spectacle de médecins s’attaquant régulièrement en justice n’a rien qui puisse rehausser le prestige de la profession

POSITION

13. L’Association Médicale Mondiale

13.1 Déclare que les médecins ont une responsabilité éthique de diffuser, si possible, à leurs collègues et au public les informations scientifiques pouvant les intéresser.

13.2 Déclare que le dépôt de brevets pour des procédures médicales compromet gravement la pratique efficace de la médecine  en limitant potentiellement l’accès des patients aux nouvelles procédures médicales.

13.3 Estime que le dépôt de brevets sur les procédures  médicales est contraire aux valeurs éthiques et à celles de la profession médicale qui devraient servir de guide aux médecins tant dans les devoirs fournis au patient que dans les relations entre confrères.

13.4 Encourage les associations médicales nationales à faire tout leur possible pour préserver la motivation des médecins pour faire progresser la connaissance médicale et mettre au point  de nouvelles procédures médicales.

Adoptée par la 60ème Assemblée Médicale Mondiale ,New Delhi, I’ Inde Octobre 2009
et supprimée par la 71ème Assemblée générale de l’AMM (en ligne), Cordoue, Espagne, octobre 2020

PREAMBULE

1. Depuis plus de 150 ans, le monde entier reconnaît l’existence d’inégalités dans le domaine de la santé. Le Rapport Final de la Commission de l’OMS sur les déterminants sociaux de la santé a été récemment publié et met en lumière l’énorme impact des inégalités en matière de santé sur l’économie et la cohésion sociale dans tous les pays. Hormis les différences majeures entre les pays, notamment entre les pays en voie de développement et les pays développés, il existe au sein même des pays des disparités significatives du fait de la diversité socio-économique et culturelle. Les inégalités en matière de santé se traduisent  soit au niveau de l’accès aux soins soit au niveau de la qualité des soins ou bien les deux. Elles se manifestent de diverses manières –  telles que dans l’espérance de vie, la mortalité des nourrissons, la mortalité des enfants. L’existence d’inégalités spécifiques de plus en plus importantes est particulièrement préoccupante.

2. Les soins fournis par les médecins sont au cœur de ce sujet. Les associations médicales nationales devraient participer activement à la lutte contre les inégalités sociales et en matière de santé afin de permettre à leurs membres médecins de fournir un service de qualité, identique pour tous.

3. Le rôle du système de santé:La diversité socio-économique et culturelle  des groupes de population constitue la principale cause d’inégalités en matière de santé. Le système de santé peut toutefois jouer un rôle capital pour prévenir et réduire ces inégalités. Son rôle peut être résumé de la manière suivante :

3.1 Prévenir l’impact sur la santé des inégalités socio-économiques et culturelles – notamment en promouvant la santé et la prévention des maladies (prévention primaire)

3.2 Identifier, solutionner et réduire les inégalités actuelles en matière de santé, par ex.  avec un diagnostic précoce des maladies, une bonne prise en charge des maladies chroniques, une réhabilitation (Prévention secondaire et tertiaire)

RECOMMANDATIONS

4. Les membres de la profession médicale confrontés aux conséquences de ces inégalités, portent une grande responsabilité et demandent à leurs associations médicales  nationales de:

4.1 Reconnaître l’importance des inégalités en matière de santé et la nécessité de peser sur la politique et les actions nationales pour les prévenir et les réduire

4.2 Identifier les risques sociaux et culturels auxquels sont exposés les patients et leurs familles et planifier leurs activités cliniques (diagnostic et traitement) pour lutter contre leurs conséquences

4.3 Plaider en faveur d’une suppression des obstacles financiers pour obtenir les soins médicaux nécessaires.

4.4 Plaider en faveur d’un accès identique pour tous aux services de santé, quelles que soient les différences géographiques, sociales, celles liées à l’âge, au sexe, aux religions, aux origines ethniques, à l’orientation  sexuelle et les différences économiques.

4.5 Demander des études sur les inégalités en matière de santé (y compris l’étendue, la gravité, les causes, l’impact sur la santé, la vie économique et sociale) ainsi que des outils de compétence culturelle à tous les niveaux de la formation médicale académique, y compris la formation permanente pour ceux déjà en exercice.

Adoptée par la 48e Assemblée Générale Somerset West, République d’Afrique du Sud, Octobre 1996, révisée par la 59e Assemblée Générale de l’AMM, Séoul, Corée, Octobre 2008
et par la 70e Assemblée Générale, Tbilissi, Géorgie, Octobre 2019

 

PRÉAMBULE

La résistance aux antimicrobiens (RAM) constitue une menace croissante pour la santé publique mondiale, qui dépasse les frontières nationales et les divisions socioéconomiques. La résistance aux antimicrobiens met en péril la santé humaine, animale et environnementale. C’est une crise aux multiples facettes, avec de lourdes conséquences sur les plans humain, sanitaire et économique.

La lutte contre la résistance aux antimicrobiens est devenue une priorité sanitaire absolue au niveau mondial et incombe à tous les pays.

Les médicaments antimicrobiens sont un élément essentiel de la médecine moderne : ils permettent de limiter les risques de procédures complexes comme la chirurgie ou la chimiothérapie.

La résistance aux antimicrobiens menace l’efficacité de la prévention et du traitement d’un nombre croissant d’infections causées par des bactéries, des parasites, des virus et des champignons.

Une résistance aux antimicrobiens apparaît lorsque des microorganismes développent une capacité de résistance à l’action des médicaments antimicrobiens (tels que les antibiotiques, les antifongiques, les antipaludiques et les anthelminthiques).

De plus en plus de rapports font état d’infections causées par les bactéries résistantes à de multiples catégories d’antibiotiques.

Bien que l’apparition d’une résistance aux antimicrobiens soit un phénomène tout à fait naturel de l’évolution, elle est exacerbée par une surutilisation et un mauvais usage des antimicrobiens en médecine humaine et vétérinaire ainsi qu’en agriculture et par son emploi comme stimulateur de croissance ou comme agent de prévention sur des animaux sains.

L’apparition et la propagation de la résistance aux antimicrobiens est en outre aggravée par l’accès restreint à des médicaments efficaces, la vente libre d’antibiotiques dans certains pays, la disponibilité de produits de mauvaise qualité, voire contrefaits, la mauvaise utilisation des antibiotiques dans la production alimentaire, l’essor des déplacements internationaux, le tourisme et le commerce médicaux et la faible application des mesures de lutte contre les infections.

L’autre facteur principal de la résistance aux antimicrobiens est la dissémination d’antibiotiques dans l’environnement, soit du fait de mauvaises pratiques de fabrication ou d’élimination des médicaments non utilisés, soit par les déjections humaines et animales, soit par l’élimination inadéquate des cadavres d’humains et d’animaux.

Dans de nombreux pays, notamment ceux à revenu faible ou moyen, l’accès à des médicaments antimicrobiens efficaces et à des techniques complémentaires, de diagnostic ou de vaccination par exemple, reste une gageure, aggravant la RAM.

Les conséquences de la RAM ne se mesurent pas seulement sur le plan de la santé humaine mais aussi sur le plan économique. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a averti que la résistance aux antimicrobiens avait atteint des niveaux alarmants dans de nombreuses régions du monde et qu’à ce rythme, elle causerait la mort de 10 millions de personnes par an et une diminution de 2 à 3,5 % du PIB mondial d’ici 2050.

À l’allure à laquelle se propage la résistance aux antimicrobiens à travers le monde, elle compromet fortement la réalisation des Objectifs de développement durable des Nations unies et sape les efforts de réduction des inégalités de santé. Sans une action transectorielle harmonisée et coordonnée à l’échelle internationale, le monde se dirige vers une ère post-antibiotique à laquelle des infections courantes et des blessures mineures pourront de nouveau tuer.

La résistance antimicrobienne fait désormais partie des priorités au plus haut niveau politique, notamment pour l’assemblée générale des Nations unies. Elle est également inscrite à l’ordre du jour du G7 et du G20.

Il est nécessaire d’adopter une approche de type « un monde, une santé » (« One Health ») pour réduire au minimum l’utilisation inadaptée ou superflue des antimicrobiens ainsi que pour prévenir et lutter contre la transmission de la résistance existante. Une approche du type « un monde, une santé » permettrait d’assumer qu’il est nécessaire d’agir dans les domaines de la médecine humaine et vétérinaire, mais aussi de l’agriculture.

 

RECOMMANDATIONS

Recommandations générales

  1. Dans la population en général et dans les soins de santé, la principale mesure de prévention des infections consiste à réduire la demande d’antibiotiques. Pour ce faire, il convient de s’attaquer aux déterminants sociaux des maladies infectieuses comme la précarité des conditions de vie et le manque d’assainissement, des mesures qui se traduiront par la diminution des inégalités de santé et de la résistance aux antimicrobiens.
  2. Les nations disposent de différentes ressources pour lutter contre la résistance aux antimicrobiens et doivent coopérer avec l’Organisation mondiale de la santé, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE), qui promeuvent le plan d’action mondial qui sert de cadre aux plans d’action nationaux.
  3. L’Association médicale mondiale (AMM) et ses membres constituants devraient plaider pour :
    • un financement de la surveillance des infections résistantes aux médicaments, tant en médecine humaine et vétérinaire que dans les secteurs de l’agriculture, de la production halieutique et de l’agroalimentaire, ainsi que pour une coopération internationale en matière de procédures de partage des données en vue d’améliorer les réponses au niveau mondial ;
    • l’examen, par l’OMS et les autres agences onusiennes du rôle des accords sur le commerce international et des déplacements internationaux dans la propagation de la résistance aux antimicrobiens et la promotion de l’intégration, dans ces accords, de garanties contre la prolifération des pathogènes résistants aux médicaments dans l’alimentation ;
    • l’appui de l’OMS aux mesures d’assouplissement des aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) pour assurer l’accès à des médicaments de qualité à des prix abordables et son opposition à la multiplication des dispositions dites « ADPIC-plus » de ces accords, qui limitent ces assouplissements pourtant efficaces ;
    • l’emploi généralisé de techniques fiables telles que des systèmes de traçabilité pour assurer l’authenticité des produits pharmaceutiques ;
    • un accès égalitaire et un usage approprié des médicaments antimicrobiens de qualité existants et à venir, ce qui exige l’application efficace des listes des médicaments essentiels de l’OMS portant sur les antimicrobiens, à savoir ceux auxquels l’accès est indispensable, ceux à utiliser avec précaution et ceux à n’utiliser qu’en dernier recours. Pour que le programme d’action mondial de l’OMS et les programmes d’action nationaux soient efficaces, l’accès aux établissements de santé, aux professionnels de santé, aux vétérinaires, aux connaissances, à l’instruction et aux informations est vital ;
    • un recours massif à la vaccination pour lutter contre la résistance aux antimicrobiens, ce qui permettra de réduire le fardeau des maladies infectieuses et par voie de conséquence de réduire le besoin d’antimicrobiens, limitant ainsi l’apparition d’une résistance à ces derniers ;
    • que les organisations internationales chargées de la santé et les gouvernements amplifient leurs actions, se coordonnent pour promouvoir une utilisation appropriée des antibiotiques et travaillent ensemble à réduire la résistance aux antimicrobiens par une approche de type « un monde, une santé », qui reconnaisse que les santés humaine, animale et environnementale sont inextricablement liées afin d’enrayer la propagation de la résistance.
  4. L’Association médicale mondiale et ses membres constituants devraient encourager leurs gouvernements respectifs à :
    • accroître le financement de la recherche fondamentale et appliquée visant à mettre au point des agents antimicrobiens, des outils de diagnostic et des vaccins (notamment des vaccins antimicrobiens innovants) et à bien utiliser ces dispositifs thérapeutiques ;
    • assurer l’équilibre entre les ressources financières et techniques pour le développement de médicaments antimicrobiens, de vaccins et d’outils de diagnostic innovants ainsi que de méthodes novatrices de prévention et de lutte contre les infections, à la fois dans les domaines de la médecine humaine et vétérinaire et dans l’agriculture ;
    • appuyer des efforts de recherche et développement de nouveaux agents et vaccins antimicrobiens et de tests de diagnostic rapide qui soient dictés par les besoins et conformes aux principes détaillés dans la déclaration politique issue de la réunion de haut niveau de l’Assemblée générale des Nations unies sur la résistance aux agents antimicrobiens, adoptée en septembre 2016, à savoir l’accessibilité financière, l’efficacité, l’efficience et l’équité;
    • prendre des mesures règlementaires en vue de maîtriser la pollution environnementale qui permet la dissémination des gènes résistants aux antibiotiques dans le sol, l’eau et l’air.
    • former un nombre suffisant de spécialistes en maladies infectieuses cliniques dans chaque pays, condition indispensable pour combattre la résistance aux antimicrobiens et les infections acquises à l’hôpital.

Au niveau national

  1. Les membres constituants devraient exhorter leurs gouvernements à :
    • exiger que les agents antimicrobiens ne soient disponibles que sur prescription d’un professionnel de santé ou un vétérinaire et distribués ou vendus par des professionnels ;
    • lancer des campagnes nationales de sensibilisation aux conséquences dangereuses d’une surutilisation et d’un mauvais usage des antibiotiques auprès du grand public. Ces campagnes devraient être appuyées par la fixation d’objectifs nationaux pour accroître la sensibilisation de la population ;
    • soutenir leurs associations professionnelles, la société civile et les systèmes de soins de santé afin qu’ils supervisent l’adoption de comportements adéquats éprouvés en vue d’assurer un emploi approprié des antibiotiques et de mettre fin à leur surutilisation ;
    • assurer l’accès à des outils de diagnostic adéquats et utilisables sur les lieux d’intervention tels que les hôpitaux ou les cliniques afin d’informer les processus de décision et ainsi éviter la prescription inadaptée d’antibiotiques ;
    • commander le recueil de données sur l’usage d’antibiotiques, les prescriptions, les prix, les profils de résistance et les échanges commerciaux, tant dans le domaine de la prestation de soins de santé que dans celui de l’agriculture. Ces données devraient être mises à la disposition du grand public ;
    • appuyer la mise en œuvre de programmes efficaces de gestion antimicrobienne et de formation au bon usage des agents antimicrobiens et à la lutte contre les infections ;
    • poursuivre activement le déploiement d’un système de surveillance national de fourniture des antimicrobiens et de la résistance aux antimicrobiens. Les données issues de ce système devraient être comparées ou intégrées à celles du réseau mondial de veille de l’OMS.
    • Le suivi de l’utilisation d’antimicrobiens dans l’élevage et la production alimentaire doit être suffisamment précis pour assurer l’obligation de rendre des comptes.
  2. Les membres constituants devraient :
    • encourager les facultés de médecine et les programmes de formation continue à renouveler leurs efforts pour former les médecins à l’emploi approprié des antibiotiques, y compris à leur utilisation en pratique ambulatoire et aux bonnes pratiques de lutte contre les infections. Les médecins pourront à leur tour informer le grand public ;
    • encourager la formation de leurs membres aux différents aspects de la résistance aux antimicrobiens, y compris la bonne gestion des antimicrobiens, leur bonne utilisation et les mesures de lutte contre les infections, y compris l’hygiène des mains ;
    • plaider pour la publication et la communication d’informations locales relatives aux modèles de résistance, aux directives cliniques et aux options de traitement recommandées aux médecins ;
    • en collaboration avec les autorités vétérinaires, encourager les gouvernements à restreindre, par des mesures règlementaires, l’utilisation des antibiotiques dans l’agriculture, notamment l’élevage, y compris leur emploi à des fins de prophylaxie et de stimulation de la croissance et à n’autoriser que les catégories d’antimicrobiens essentiels en médecine humaine ;
    • soutenir une règlementation qui empêche les conflits d’intérêts entre vétérinaires lorsque ces derniers sont à la fois prescripteurs et vendeurs d’antibiotiques;
    • envisager d’utiliser les réseaux sociaux pour informer le grand public et promouvoir les bonnes utilisation et élimination des antibiotiques ;
    • encourager les parents à respecter pour leurs enfants les calendriers de vaccination recommandés. Les adultes également devraient avoir facilement accès aux vaccins contre la grippe et les infections à pneumocoque, entre autres.

Au niveau local

  1. Les professionnels de la santé et les systèmes de santé ont un rôle essentiel à jouer dans la préservation des médicaments antimicrobiens.
  2. Les médecins devraient :
    • avoir accès à des informations exactes, fiables, scientifiquement fondées et exemptes de tout conflit d’intérêts et mener, ou à tout le moins participer activement aux programme de bonne gestion mis en place par les hôpitaux, les cliniques et les autorités pour améliorer l’utilisation des antibiotiques ;
    • sensibiliser leurs patients à l’antibiothérapie, à ses risques et ses avantages, à l’importance du strict respect du traitement prescrit, aux bonnes pratique de prévention des infections et aux problèmes que pose la résistance aux antibiotiques ;
    • promouvoir les mesures d’hygiène (notamment d’hygiène des mains) et les autres mesures de prévention des infections et assurer qu’elles sont respectées.

 

Adoptée par la 59e Assemblée Générale de l’AMM, Séoul, Corée, Octobre 2008
et réaffirmée avec une révision mineure par la 210e session du Conseil de l’AMM, Reykjavik, Islande, Octobre 2018

PRÉAMBULE

Le mercure est un métal lourd présent dans la nature et une puissante neurotoxine. L’exposition humaine au mercure passe le plus souvent par l’ingestion de méthylmercure présent dans des poissons contaminés, moins fréquemment par l’inhalation de vapeurs de mercure anorganique lorsque du mercure est renversé ou au cours d’un processus de fabrication.

Le mercure a été considéré comme l’élément idéal à utiliser dans les appareils médicaux de mesure de la température et de la pression. De fait, un grand hôpital peut facilement posséder plus de 45 kg de mercure contenu dans différents appareils situés dans divers locaux.

Les hôpitaux et les cliniques peuvent éviter les risques professionnels et environnementaux liés au mercure en utilisant des produits ne contenant pas de mercure. De grands établissements de santé dans le monde ont montré qu’il existait des produits alternatifs sûrs et efficaces, utilisables en toute sécurité dans la plupart des cas, comme des thermomètres électroniques, des appareils médicaux anéroïdes récemment calibrés et des batteries sans mercure.

Même si des motifs d’ordre professionnel et environnemental sont à la base de nombreuses décisions volontaires de remplacer le mercure, des considérations financières peuvent également achever de convaincre les hôpitaux de lancer un programme de remplacement du mercure. L’élimination des déchets dangereux, l’obligation de signaler toute fuite ou tout épanchement de mercure, la perturbation de services et la formation du personnel coûtent cher. Les coûts engendrés par l’élimination d’une contamination importante peuvent s’avérer beaucoup plus élevés que le passage à des solutions sans mercure.

En mettant en place une méthode de gestion optimisée pour l’utilisation du mercure, on pourrait peut-être éviter la prise de mesures de régulation plus draconiennes par les autorités. Ces mesures de régulation risqueraient de peser lourdement sur les établissements : certains pourraient ne pas être en mesure d’en assumer les coûts.

L’Association médicale mondiale rappelle sa déclaration sur la dégradation de l’environnement et pour une gestion avisée des produits chimiques, qui contient des recommandations en matière de sensibilisation et de renforcement des capacités à même de contribuer à la lutte contre ce fléau.

RECOMMANDATIONS

Les recommandations suivantes sont basées sur l’urgente nécessité de réduire à la fois la fourniture et la demande de mercure dans le secteur de la santé : 

Au niveau mondial

L’Association médicale mondiale et ses Membres constituants devraient :

  • plaider en faveur d’une coopération entre les Nations unies et les gouvernements pour la mise en œuvre des points clés du programme relatif au mercure du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) qui fournit un cadre pour réduire l’utilisation, la diffusion, le commerce et les risques liés au mercure ;
  • favoriser l’activité des partenariats existants.

Au niveau régional et national

Les associations médicales nationales devraient demander à leurs gouvernements de travailler à la réduction des risques liés au mercure dans l’environnement :

  • en réduisant la dépendance à l’extraction du mercure au bénéfice de sources de mercure sans risque pour l’environnement, comme le mercure recyclé ;
  • en développant des solutions et des plans scientifiquement fondés pour sécuriser le stockage à long terme des surplus de mercure ;
  • en invitant instamment les États membres à ratifier et à mettre en œuvre la Convention de Minamata sur le mercure, adoptée par les Nations unies en 2013 en vue de protéger la santé humaine et l’environnement contre les émissions anthropiques et les rejets de mercure et de composés mercuriels.
  • en encourageant la suppression du mercure dans le secteur de la santé ;
  • en concevant et en mettant en place des règlementations ou des obligations visant à réduire significativement les émissions de mercure provenant de la combustion du charbon et de la production de ciment, et en ayant recours à des contrôles spécifiques des émissions de mercure.

Au niveau local

Les médecins devraient :

  • étudier comment éliminer les produits à base de mercure dans leurs cabinets et leurs pratiques cliniques, y compris les thermomètres, les sphygmomanomètres, les tubes gastro-intestinaux, les piles, les lampes, les générateurs électriques, les thermostats, les jauges de pression et les autres réactifs et dispositifs de laboratoire ;
  • veiller à ce que les hôpitaux et les établissements de santé locaux aient un programme d’identification des sources de mercure sur le lieu de travail et de réduction de l’utilisation du mercure et une politique de gestion du mercure en matière de recyclage, d’élimination et de formation ;
  • encourager les hôpitaux et les établissements de santé locaux à supprimer les produits à base de mercure et à passer à des équivalents sans mercure ;
  • orienter les patients vers les conseils locaux et nationaux relatifs à la consommation de poisson conçus pour limiter l’exposition au mercure des enfants et des femmes en âge de procréer.

Adoptée par la 59e Assemblée Générale de l’AMM, Séoul, Corée, Octobre 2008
et révisée par la 70e Assemblée Générale, Tbilissi, Géorgie, Octobre 2019

 

PRÉAMBULE

Le sel alimentaire de table est un composé ionique, plus précisément du chlorure de sodium. Il contient 40 % sodium (Na+) et 60 % de chlorure (Cl-). Il existe désormais des preuves irréfutables qu’une consommation excessive de sodium constitue un facteur de risque pour l’apparition ou l’aggravation de l’hypertension, qui est elle-même un des principaux facteurs de risque cardiovasculaire. Ce pourrait également être un facteur indépendant de risque de maladies cardiovasculaires et de mortalité. L’effet de la consommation alimentaire de sodium sur la pression artérielle est influencé par des facteurs tels que l’âge et l’appartenance ethnique. L’absorption de sodium est également un facteur de risque de cancer de l’estomac [1].

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande une consommation alimentaire journalière moyenne de sodium de moins de 2000 mg, soit 5 g de sel pour un adulte (à partir de l’âge de 16 ans). Pour les enfants âgés de 2 à 15 ans, la dose limite de 2 g par jour recommandée pour un adulte doit être ajustée à la baisse en tenant compte des besoins journaliers en énergie d’un enfant, par rapport à ceux d’un adulte [2].

La majeure partie de la population mondiale consomme trop de sodium : en moyenne 3,95 g (entre 3,89 et 4,01 g) par jour, soit l’équivalent de 10,06 g (entre 9,88 et 10,21 g) de sel de table par jour. Ces niveaux de consommation dépassent largement la limite recommandée [3].

La principale source de sodium est la consommation alimentaire, à 90 % [4] sous la forme de sel ajouté [2], soit à la discrétion du consommateur lors de la préparation ou du repas, soit dans les produits alimentaires transformés comme les soupes, les condiments à base de sel, les repas de restaurants, le bicarbonate de soude, la charcuterie (jambon, bacon, salaisons…), le fromage, les en-cas salés ou les nouilles instantanées, entre autres. Dans les pays à revenu élevé, le sodium ajouté pendant la transformation alimentaire peut représenter jusqu’à 75 à 80 % de l’absorption totale de sel [5].

Le Plan d’action mondial pour la lutte contre les maladies non transmissibles pour 2013-2020 comporte 9 cibles volontaires mondiales, parmi lesquelles une réduction relative de 30 % de la moyenne de la consommation alimentaire de sodium par la population. L’OMS a créé le dossier technique SHAKE en vue d’aider les États membres à élaborer, mettre en œuvre et réaliser le suivi des stratégies de réduction de la consommation de sel.

L’OMS reconnaît cependant que bien que la réduction de la consommation de sel soit recommandée au niveau mondial, les troubles dus à une carence en iode pourraient réapparaître, le sel constituant le principal vecteur d’absorption de l’iode, par l’entremise d’aliments enrichis. Dès lors, l’OMS, considérant que la réduction de la consommation de sel et l’enrichissement de l’alimentation en iode sont compatibles, appelle à coordonner les efforts relevant de ces deux programmes [6].

Au niveau de la population, même une petite baisse de la pression sanguine produit de substantiels avantages. Les efforts entrepris à l’échelle de la population pour réduire la consommation de sodium alimentaire constituent donc une bonne façon de réduire l’hypertension générale et donc les maladies cardiovasculaires. Les données scientifiques suggèrent que le maintien de la consommation de sodium en deçà de la limite de référence permettrait d’éviter près de 2,5 millions de décès chaque année [7].

 

RECOMMANDATIONS

 1. L’AMM et ses membres constituants devraient :

a. exhorter les gouvernements à reconnaître que la consommation de sodium est un problème sanitaire grave et à faire de la prévention une priorité dans le cadre d’une approche égalitariste, à la fois efficace et économique et destinée préserver la vie de l’ensemble de la population afin de lutter contre la surconsommation de sodium et la prévalence des maladies cardiovasculaires associées ;

b. en coopération avec les organisations de santé nationales et internationales, sensibiliser dès l’enfance les consommateurs aux conséquences de la consommation excessive de sodium sur l’hypertension et l’apparition de maladies cardiovasculaires et aux bénéfices d’une baisse à long terme de la consommation de sodium ainsi qu’aux sources alimentaires de sel/sodium et à la manière de réduire cette consommation ;

c. exhorter les gouvernements et les autres acteurs concernés à coopérer pour la réalisation des cibles définies dans le Plan d’action mondial pour la lutte contre les maladies non transmissibles pour 2013-2020 ;

d. reconnaître le rôle essentiel de l’industrie agroalimentaire et des services de restauration dans la réduction de la quantité de sodium dans l’alimentation et appuyer les efforts de règlementation fixant des objectifs obligatoires en matière de transformation alimentaire, de teneur en sodium des aliments et d’étiquetage clair. Les efforts de reformulation doivent cibler les aliments qui sont les plus couramment consommés au sein de la population.

2. Les membres constituants de l’AMM devraient :

a. encourager leurs gouvernements respectifs à faire appliquer strictement les lois régissant la teneur en sodium des aliments transformés ;

b. adopter une approche multipartite dans leurs efforts visant à réduire la consommation excessive de sodium par la population, y compris par la promotion de l’information des médecins au sujet des conséquences d’une surconsommation alimentaire de sodium ;

c. reconnaître que les programmes de réduction de la consommation de sodium et d’iodation du sel doivent être compatibles et appuyer les stratégies de réduction de la quantité de sodium qui ne compromettent pas l’absorption de la quantité nécessaire d’iode ou qui n’aggravent pas les troubles liés à une carence en iode, notamment dans les milieux à faible revenu ;

d. contribuer à sensibiliser le grand public aux éventuelles conséquences d’une carence en iode en raison d’une alimentation trop pauvre en sel iodé ;

e. encourager leurs membres à contribuer aux recherches scientifiques sur les stratégies de réduction de la consommation de sodium ;

f. encourager l’étiquetage clair des produits alimentaires ainsi que le lancement de campagnes médiatiques et de politiques à l’échelle de la population comme l’obligation de modifier la formule des aliments afin de parvenir à une réduction importante de la consommation globale de sodium plutôt que de privilégier les interventions ciblant les individus.

3. Les médecins devraient :

conseiller leurs patients en leur indiquant les principales sources de sodium dans leur alimentation et les manières de réduire leur consommation de sodium, y compris en réduisant la quantité de sel dans leur cuisine et l’utilisation de substituts du sel et en luttant contre toutes les pratiques et croyances locales qui contribuent à une absorption élevée de sodium.

 

Références

[1] Fonds mondial de recherche contre le cancer / American Institute for Cancer Research, Food, Nutrition, Physical Activity, and the Prevention of Cancer: a Global Perspective, Washington DC: AICR, 2007.

[2] Guideline: Sodium intake for adults and children, Genève, Organisation mondiale de la santé (OMS), 2012. Le résumé d’orientation de ces directives est disponible en français à l’adresse suivante : http://apps.who.int/iris/bitstream/handle/10665/85223/WHO_NMH_NHD_13.2_fre.pdf?sequence=1&isAllowed=y.

[3] Mozaffarian, Dariush, Fahimi, Saman, Singh, Gitanjali M., Micha, Renata, Khatibzadeh, Shahab, Engell, Rebecca E., Lim, Stephen, Danaei, Goodarz, Ezzati, Majid and Powles, John (2014), Global sodium consumption and death from cardiovascular causes. New England Journal of Medicine, 371 7: 624-634. doi:10.1056/NEJMoa1304127

[4] J. He, N.R.C. Campbell, G.A. MacGregor, Reducing salt intake to prevent hypertension and cardiovascular disease. Rev. Panam, Salud Publica, 32 (4) (2012), pp. 293-300

[5] Bureau régional pour l’Europe de l’Organisation mondiale de la santé, Mapping salt reduction initiatives in the WHO European Region (Web. 10 mai 2014.) http://www.euro.who.int/__data/assets/pdf_file/0009/186462/Mapping-salt-reduction-initiatives-in-the-WHO-European-Region.pdf (2013)

[6] Salt reduction and iodine fortification strategies in public health, 2014. http://www.who.int/nutrition/publications/publichealth_saltreduc_iodine_fortification/en/

[7] McLaren L, Sumar N, Barberio AM, Trieu K, Lorenzetti DL, Tarasuk V, Webster J, Campbell NRC.Population-level interventions in government jurisdictions for dietary sodium reduction. Cochrane Database of Systematic Reviews2016, n° 9. art. n° : CD010166.DOI: 10.1002/14651858. CD010166.pub2.

 

Adoptée par la 50ème Assemblée Médicale Mondiale Ottawa, Canada, octobre 1998
Amendée par la 59ème Assemblée Générale de l’AMM, Séoul, Corée, octobre 2008, et par la 66ème Assemblée Générale, Moscou, Russie, octobre 2015
et révisée par la 69ème Assemblée Générale de l’AMM à Reykjavik, Islande, octobre 2018

 

PREAMBULE

Les Déclarations de Genève, d’Helsinki et de Tokyo de l’AMM énoncent clairement les devoirs et responsabilités de la profession médicale quant à la préservation et à la sauvegarde de la santé du patient ainsi qu’à son engagement au service de l’humanité. Dès lors, et à la lumière des conséquences humaines catastrophiques d’un éventuel recours aux armes nucléaires et de l’impossibilité de leur apporter une réponse sanitaire et humanitaire significative, l’AMM estime qu’il est de son devoir de travailler à l’élimination des armes nucléaires. La réalisation d’un monde sans armes nucléaires constitue une nécessité.

RECOMMANDATIONS

Par conséquent, l’AMM :

  1. Condamne la mise au point, les tests, la production, le stockage, le transfert, le déploiement, la menace d’utilisation et l’emploi des armes nucléaires ;
  2. Demande à tous les gouvernements de s’abstenir de développer, de tester, de produire, de stocker, de transférer, de déployer, de menacer d’utiliser et d’employer des armes nucléaires et d’œuvrer en toute bonne foi à leur élimination ;
  3. Fait observer à tous les gouvernements que même une guerre nucléaire limitée entraînerait d’immenses souffrances humaines et un grand nombre de morts avec des effets catastrophiques sur l’écosystème de la Terre, ce qui en conséquence raréfierait l’approvisionnement alimentaire mondial et ferait courir un risque de famine à une grande partie de la population de la planète ;
  4. Exprime sa vive préoccupation face aux programmes de conservation indéfinie et de modernisation des arsenaux nucléaires, à l’absence de progrès des États nucléaires en matière de désarmement et au danger croissant de guerre nucléaire qu’elle soit volontaire, y compris par cyberattaque, accidentelle ou causée par une négligence ;
  5. Salue l’adoption du traité sur l’interdiction des armes nucléaires et rejoint les autres membres de la communauté internationale, notamment le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant rouge, l’association internationale des médecins pour la prévention de la guerre nucléaire, la Campagne internationale pour abolir les armes nucléaires et une large majorité d’États membres pour appeler, en qualité de médecins, tous les États à signer, ratifier ou rejoindre et à mettre en œuvre en toute bonne foi le traité sur l’interdiction des armes nucléaires, et ce dans les plus brefs délais ;
  6. Demande à toutes les associations médicales nationales de se joindre à l’AMM afin de soutenir cette déclaration, d’utiliser les ressources pédagogiques existantes pour sensibiliser le grand public et d’inciter leurs gouvernements respectifs à œuvrer pour l’élimination des armes nucléaires y compris par l’adhésion et la mise en application du traité sur l’interdiction des armes nucléaires.