Révision de la prise de position de l’AMM sur les accidents de la route
Adoptée par la 42e Assemblée Médicale Mondiale Rancho Mirage (Californie, Etats-Unis), Octobre 1990 et
révisée par la 57e Assemblée générale, Pilanesberg, Afrique du Sud, Octobre 2006 et par la 67e Assemblée générale, Taipei, Taiwan, Octobre 2016
PREAMBULE
Les grands blessés et les morts que l’on dénombre dans les accidents de la route constituent un problème de sante publique avec des conséquences équivalentes à celle des grandes pathologies telles que le cancer ou les maladies cardio-vasculaires. Dans le monde, 1,2 millions de personnes sont tuées chaque année sur les routes et 20 à 50 millions sont blessées. D’ici 2020, on s’attend a ce que les accidents de la route soient le troisième élément majeur du fardeau des maladies et blessures.
Au-delà du prix personnel et social inestimable payé par les victimes d’accidents de la route et leurs familles, les accidents de la route ont un énorme impact économique. Les coûts économiques des traumatismes et infirmités liés aux accidents de la route, y compris les soins d’urgence et de rééducation, le coût des invalidités et les années de vie corrigées du facteur invalidité (AVCI) s’élèvent à 1% du PNB dans les pays pauvres et 1,5-2% dans les pays riches. Une grosse partie de ce fardeau est prise en charge par le secteur sanitaire.
Les accidents de la route continuent à augmenter dans de nombreux pays, notamment dans les pays à faibles et moyens revenus qui représentent actuellement 85% de tous les décès attribuables aux accidents de la route. Les accidents de la route sont la deuxième cause majeure de décès parmi les jeunes dans le monde entier.
La plupart des accidents de la route pourraient être évités par de meilleures mesures de prévention. Lutter contre les accidents de la route nécessite une prise de responsabilité partagée par des groupes et individus au niveau national et international, et au niveau des communautés, y compris les gouvernements, les ONG, l’industrie, les professionnels de santé publique, les ingénieurs et la justice.
La vitesse est largement reconnue comme le plus important danger en matière de sécurité routière, impactant à la fois la vraisemblance d’un accident et sa gravité. Une augmentation moyenne de la vitesse de 1 km/h correspond à une augmentation de 3% du risque d’accident avec dommages corporels et de 5% de traumatismes graves ou mortels.
Les efforts pour réduire les accidents de la route et les traumatismes doivent cependant s’accompagner d’une « approche systématique » qui identifie et traite les multiples facteurs qui contribuent au risque d’accidents et de traumatismes, y compris les paramètres concernant les individus, les véhicules et la conception des routes.
Pour prévenir les accidents de la route il convient de traiter les déterminants sociaux de la santé – les facteurs sociaux, économiques, environnementaux et politiques impactant la santé de la population. Dans les pays à faibles et moyens revenus où il existe des infrastructures moins sécurisées, moins de normes minimales sur la sécurité des véhicules et des soins d’urgence de faible qualité, on y observe le plus grand nombre d’accidents de la route. De ce fait, il y a une interaction entre les facteurs humains, les véhicules et l’environnement avant, pendant et après une collision. Une intervention à tous ces niveaux permettra de réduire les accidents et les dommages corporels. Une intervention efficace requiert une éducation du public ainsi que l’implication des professionnels dans le domaine de l’engineering, de la justice et de la santé.
Intervenir en amont vise à prévenir les accidents et à réduire les facteurs de risque. Exemples : empêcher les conducteurs de prendre la voiture lorsqu’ils sont fatigués (surtout les chauffeurs de poids lourds), distraits ou qui sont sous l’emprise de drogues ou d’alcool. Les politiques nécessaires pourraient comporter une interdiction des téléphones portables et des couvre-feux la nuit ou un permis de conduire progressif pour les jeunes conducteurs. Les mesures en amont incluent également l’instauration de normes de construction des véhicules pour les rendre sûrs sur la route et les brider pour éviter des vitesses excessives. D’autres mesures de prévention des accidents incluent la mise en place de limitations de vitesse, l’installation de radars et l’optimisation du tracé des routes.
A un deuxième niveau, l’intervention vise à prévenir ou à réduire les traumatismes liés aux accidents. Une telle intervention comporte l’usage obligatoire de la ceinture de sécurité et du siège enfant, le port du casque pour les cyclistes, la conception de véhicules équipés de dispositifs de sécurité et de protection, la limitation de la vitesse, la suppression d’objets lourds et rigides tels que les glissières en béton ou en métal, les poteaux d’éclairage et les piliers sur le bord des routes.
Intervenir après un accident vise à tout faire pour sauver des vies et à apporter des soins qui atténuent les traumatismes ce qui inclut une meilleure prise en charge médicale avant l’arrivée à l’hôpital et des soins d’urgence pour les traumatisés ainsi que de la rééducation.\
RECOMMANDATIONS
- L’AMM soutient les conclusions et les recommandations clés du rapport 2015 de l’OMS sur la prévention des accidents de la route et demande leur application par ses AMN membres et leurs gouvernements et instances concernées.
- Les médecins doivent considérer les accidents de la route comme un problème de santé publique et reconnaître leurs responsabilités dans la lutte contre ce problème mondial.
- Les AMN et leurs membres médecins devraient persuader les gouvernements et les décideurs politiques de l’importance de cette question et contribuer à traduire les informations. empiriques et scientifiques dans des politiques pragmatiques.
- Les AMN et les médecins sont des acteurs clés en matière d’éducation publique et devraient intégrer la sécurité routière dans leurs actions de promotion de la santé.
- Les médecins devraient s’impliquer dans la collecte et l’analyse des données sur les accidents de la route et sur les dommages corporels qui s’en suivent, ainsi que dans la surveillance des traumatismes.
- Les médecins devraient contribuer à modifier l’attitude du public vis-à-vis des voyages en voiture, y compris faire pression pour améliorer les transports publics, les pistes cyclables et les trottoirs afin de dissuader les gens de prendre la voiture et afin de leur faire adopter des options plus saines telles que la marche et le vélo.
- Les médecins devraient travailler sur le facteur humain et les causes médicales des accidents de la route, y compris entre autres la prise de médicaments ou certaines maladies susceptibles de nuire à la capacité à conduire un véhicule, et explorer de nouvelles voies pour prévenir et réduire la gravité des traumatismes.
- Les médecins devraient faire pression pour assurer la mise en place des mesures énoncées précédemment qui réduisent le risque et la gravité des accidents de voiture et en évaluer l’impact.
- Les AMN et leurs membres médecins devraient encourager la recherche et mettre au point des formations et des soins médicaux améliorés à tous les niveaux, y compris des systèmes de communication et de transport efficaces pour localiser et évacuer les victimes, des systèmes de soins d’urgence pour assurer les premiers secours vitaux, des soins spéciaux pour les traumatismes et des soins de rééducation. Elles devraient faire pression pour que soient augmentées les ressources nécessaires à ces services.