Prise de position de l’AMM sur les médecins traitant leurs proches


Adoptée par la 73ème Assemblée générale de l’AMM, Berlin, Allemagne, octobre 2022

 

PRÉAMBULE

La relation entre le médecin et ses proches ayant besoin de soins médicaux peut être assez complexe. De plus, elle a un caractère hautement culturel. L’interaction peut commencer par la recherche d’un simple conseil, d’une consultation pour une affection bénigne ou par des questions générales sur les soins de santé ou la promotion de la santé et peut aller jusqu’à une demande de soins médicaux, voire de chirurgie. Les médecins sont souvent la première personne qu’appellent leur famille et leurs proches lorsque ceux-ci ont besoin d’un soutien médical ou émotionnel. Ils peuvent être en mesure de dispenser des soins immédiats en cas d’urgence et de permettre des soins auto-administrés, bien informés et fondés sur des preuves. Les médecins devraient éviter de traiter les personnes dont ils sont proches, hormis dans des situations d’urgence, pour donner des informations médicales générales ou pour soigner des affections bénignes.

Les principes éthiques qui guident le travail des médecins ne perdent ni leur importance ni leur pertinence lorsque ceux-ci soignent des proches. Lorsqu’il traite une personne proche, le médecin peut avoir plus de difficultés à respecter l’autonomie de son patient, par d’éventuels manque d’intimité, atteinte involontaire à la confidentialité ou manquement à l’obligation d’obtenir le consentement éclairé de son patient. La relation personnelle qu’entretient le médecin avec ses proches peut compromettre la capacité du patient à prendre des décisions en toute indépendance.

Le fait de prodiguer des soins à des proches peut se révéler difficile dans les circonstances suivantes :

  • lorsque l’objectivité du médecin est compromise, notamment sous l’influence de facteurs émotionnels, les risques sont que le traitement prodigué au proche soit insuffisant ou excessif, ou que le problème rencontré dépasse le savoir-faire ou la formation du médecin, ce qui peut déboucher sur de graves préjudices;
  • lorsque d’éventuels obstacles empêchent la prise en compte des antécédents médicaux délicats d’un proche ou la réalisation des examens physiques qui s’imposent, avec pour résultat un diagnostic inexact ou un traitement inadapté ;
  • lorsqu’un médecin ne satisfait pas à certaines exigences quant au dossier du patient, ce qui peut conduire à des difficultés de suivi du traitement correspondant de ce dernier ou à la mise en cause de la responsabilité du médecin en cas de litige ;
  • lorsqu’une évolution défavorable de l’état de santé du patient pourrait compromettre la relation entre ce dernier et son médecin ;
  • lorsqu’un traitement n’est pas dans l’intérêt supérieur du patient ou va à l’encontre de sa volonté alors qu’il se trouve être un proche du médecin ;
  • Lorsque le médecin risque, délibérément ou non, consciemment ou non, de faire bénéficier un proche d’un avantage indu.

 

RECOMMANDATIONS

  1. Les médecins devraient éviter d’être habituellement le médecin de premier recours d’un proche ou d’être le médecin traitant d’un proche dont le pronostic vital est engagé. Les médecins peuvent prodiguer des soins à leurs proches en cas d’urgence, d’affection bénigne ou si aucun médecin qualifié n’est disponible.
  2. Les patients faisant partie des proches de leur médecin peuvent lui demander un second avis au sujet des soins dispensés par un autre médecin. Dans ce cas, l’avis délivré devrait être conforme aux présentes recommandations et aux devoirs d’un médecin vis-à-vis de ses collègues. Le médecin devrait veiller à ne discuter que du traitement le plus approprié et recommandé, plutôt que de juger des soins et avis du médecin traitant.
  3. Lorsqu’il traite un membre de sa famille, un médecin devrait garder à l’esprit les règles ci-après :
  • Le médecin doit se conformer strictement à l’éthique médicale et respecter l’autonomie du patient et son consentement. Il se doit d’accorder une attention particulière aux mineurs.
  • Le médecin a l’obligation de respecter le droit du patient au respect de sa vie privée : il ne saurait donc divulguer illégalement des informations à des tiers, y compris d’autres membres de la famille, à l’exception des informations cliniques nécessaires lorsqu’il oriente son patient vers d’autres professionnels de santé.
  • Si un proche fait part de son intention de rechercher un second avis au sujet des soins dispensés par un autre médecin, il convient de respecter ce choix.
  • Le patient majeur comme mineur capable de discernement doit pouvoir donner son consentement à un traitement et pour être valide, ce consentement doit être pleinement éclairé.
  • Selon la nature de la relation entre patient et médecin, l’écoute d’une histoire sensible ou un examen physique pourrait être impossible ou inconfortable pour le patient ou le médecin. Dans une telle situation, le médecin et le patient devraient envisager de consulter un autre médecin.
  • Les médecins doivent tenir à jour les dossiers médicaux de leurs patients, de manière claire et concise.
  1. Si le médecin n’est pas en mesure de se conformer aux recommandations ci-dessus, il devrait éviter de traiter ses proches.
  2. Bien que les médecins soient invités, sauf exception, à s’abstenir de soigner leurs proches, ceux-ci les sollicitent souvent pour un conseil ou un traitement médical. Leur aide est souvent bienvenue et appréciée.
  3. Un médecin doit appliquer en toute circonstance les normes professionnelles et éthiques les plus rigoureuses, conformément à la Déclaration de Genève, au Code international d’éthique médicale et à la Déclaration de Lisbonne de l’AMM sur les droits du patient.

 

 

Prise de position
Confidentialité, impartialité, Patients, proches

Code International d'Éthique Médicale de l'AMM

Adopté par la 3e Assemblée Générale de l’AMM, Londres, Grande-Br...

Déclaration de Lisbonne de l'AMM sur les Droits du Patient

Adoptée par la 34e Assemblée Médicale Mondiale Lisbonne, Portuga...

Déclaration de Genève

Adoptée par la 2e Assemblée Générale, Genève, Suisse, Septembre...

Déclaration de Cordoue de l’AMM sur la relation entre médecin et patient

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