Prise de position de l’AMM sur la vaccination contre le papillomavirus humain
Adoptée par la 64ème Assemblée générale de l’Association médicale mondiale, Fortaleza, Brésil, octobre 2013
et révisée par la 75ème Assemblée Générale de l’AMM, Helsinki, Finlande, octobre 2024
PREAMBULE
La vaccination contre le papillomavirus humain (HPV) constitue pour les médecins une occasion précieuse et sans équivalent de réduire de façon substantielle la morbidité et la mortalité dues à certains cancers dans toutes les populations et d’améliorer la santé maternelle. Pour les pays qui, dans le cadre du mouvement actuel de promotion des soins de santé préventifs, parviendraient à une vaccination généralisée de leur population contre le HPV, cela pourrait se traduire par des retombées économiques. Par conséquent, le vaccin contre le HPV mérite d’être traité par l’Association médicale mondiale (AMM) séparément des autres vaccins.
Le HPV est un virus qui se transmet principalement par voie sexuelle. Il est si répandu que la plupart des adultes sexuellement actifs sont infectés au cours de leur vie. La plupart des infections sont asymptomatiques et se soignent sans intervention médicale. Mais le HPV est à l’origine de près de 100 % des cancers de l’utérus. Treize des quarante types de HPV sont oncogènes et lorsqu’ils causent une infection persistante, ils peuvent générer un cancer du col de l’utérus, mais aussi un cancer du vagin, de la vulve, de l’anus, du pénis, de la tête, du cou, de la zone anogénitale ou de l’oropharynx.
Peu de maladies reflètent autant les iniquités mondiales que le cancer du col de l’utérus, lequel est le quatrième cancer le plus courant chez les femmes dans le monde. La plupart des cas et des décès dus à ce cancer se trouvent dans les pays à revenu faible ou moyen.
Les vaccins contre le HPV protègent contre les infections causées par des types précis de HPV. Tous les vaccins disponibles offrent une protection contre les types 16 et 18, qui sont les types les plus oncogènes, et peuvent également protéger contre les verrues anogénitales. La vaccination contre le HPV peut être recommandée à toutes les femmes et tous les hommes âgés de 9 à 45 ans et aux personnes immunodéprimées. Les vaccins contre le HPV sont sûrs, efficaces et bien tolérés.
L’OMS recommande un vaccin en une ou deux doses pour les femmes âgées respectivement de 9 à 14 ans et de 15 à 20 ans. Les femmes de plus de 21 ans devraient recevoir deux doses à 6 mois d’écart. Les avantages de la vaccination pour les jeunes hommes sont de les protéger contre les verrues génitales et de prévenir la transmission du HPV aux partenaires sexuels.
En 2020, l’Assemblée mondiale de la santé a adopté la Stratégie mondiale en vue d’accélérer l’élimination du cancer du col de l’utérus en tant que problème de santé publique. Pour y parvenir, d’ici 2030, 90 % des jeunes filles seront complètement vaccinées contre le HPV à l’âge de 15 ans, des programmes de dépistage seront en cours au moyen d’un test de haute performance afin de dépister 70 % des femmes avant leurs 35 ans, puis avant leurs 45 ans et 90 % des femmes présentant un cancer invasif seront prises en charge.
Les programmes de vaccination à l’école ou de quartier sont recommandés pour accroître l’accès aux vaccins des personnes des tranches d’âge concernées, notamment pour cibler les jeunes avant le début de toute activité sexuelle pour assurer un effet positif maximal.
RECOMMANDATIONS
- Réaffirmant sa prise de position sur l’accès aux soins de santé des femmes et des enfants et sa prise de position sur l’immunisation, l’AMM insiste sur les droits des femmes, des enfants et en fait, de toute personne, à des soins de santé sûrs et adaptés et exhorte les gouvernements à allouer des ressources aux programmes d’immunisation.
- L’AMM encourage la mise en place et le financement accélérés de programmes visant à mettre à disposition de l’ensemble des femmes et des hommes des vaccins sûrs et de haute qualité contre le HPV.
- L’AMM milite résolument pour l’offre de programmes fiables, rapides et accessibles de dépistage du cancer du col de l’utérus permettant la détection et le traitement des lésions précancéreuses dans tous les pays, notamment dans ceux qui présentent des taux élevés de mortalité due au cancer du col de l’utérus.
- L’AMM spécifie clairement que le vaccin contre le HPV ne saurait se substituer aux programmes de dépistage du cancer du col de l’utérus.
- L’AMM recommande que les traitements contre le cancer et les soins palliatifs soient accessibles à toutes les personnes à qui l’on a diagnostiqué un cancer du col de l’utérus.
- Il est principalement recommandé de mettre en place des programmes de vaccination à l’école ou de quartier pour accroître l’accès aux vaccins des personnes des tranches d’âge concernées, notamment pour cibler les jeunes avant le début de toute activité sexuelle et ainsi assurer un effet positif maximal.
- L’AMM invite instamment les autorités nationales de santé à collaborer avec les associations de professionnels de santé et les autres acteurs concernés pour la mise en œuvre de programmes intenses d’information et de sensibilisation afin :
- d’accroître, pour toutes les personnes indépendamment de leur sexe, la connaissance et la compréhension du HPV et des maladies qui lui sont associées (telles que le cancer du col de l’utérus, le cancer de la tête et du cou, le cancer de l’anus, le cancer de l’appareil génital, etc.), de la disponibilité et l’efficacité du vaccin contre le HPV et de la nécessité d’effectuer des dépistages réguliers des cancers liés au HPV dans l’ensemble de la population.
- d’améliorer la prise de conscience du fait que les préservatifs n’offrent pas une protection suffisante contre l’infection au HPV parce qu’ils ne couvrent pas toute la zone anogénitale et que le HPV est également à l’origine de cancers de l’oropharynx, de l’anus et du pénis ;
- de communiquer sur le fait que des vaccins contre le HPV sont disponibles et efficaces et d’informer la population de l’importance de se faire vacciner contre le HPV ;
- de recommander la vaccination contre le HPV et un dépistage régulier du cancer du col de l’utérus et le traitement de toutes les personnes éligibles, quelles que soient leurs ressources socioéconomiques, leur culture ou leur religion, y compris les personnes qui sont isolées (par un handicap, une situation de réfugié ou de demandeur d’asile, par une orientation sexuelle ou une identité de genre minoritaire) ;
- d’encourager la disponibilité du vaccin contre le HPV et le dépistage régulier du cancer du col de l’utérus pour les groupes de patients qui bénéficient le plus des mesures préventives, y compris, sans s’y limiter, les populations dont les revenus sont bas ou qui n’ont pas encore de vie sexuelle active ;
- de proposer la vaccination contre le HPV (primaire ou de rattrapage) dans tous les établissements de soins de santé concernés et lors des visites aux personnes qui seraient éligibles et de proposer également un examen de routine du col de l’utérus (que les personnes soient ou non vaccinées contre le HPV) ;
- de proposer la vaccination contre le HPV et un dépistage de routine du cancer du col de l’utérus aux personnes incarcérées ;
- de comprendre la nécessité d’un dépistage régulier du cancer du col de l’utérus, de l’intégrer dans tous les établissements de santé concernés et lors des visites à domicile et d’informer que le dépistage du HPV est plus sensible et efficace que le frottis cervico-vaginal, l’inspection visuelle avec acide acétique (IVA) et l’inspection avec le soluté de Lugol (IVL) ;
- d’intégrer les méthodes de prévention du HPV, le dépistage et le diagnostic précoces, le traitement et les soins palliatifs aux programmes existants et de formation initiale. Ces formations permettront d’accroître l’adhésion aux programmes de lutte contre le HPV et contribueront à la vaccination ;
- de financer la recherche de méthodologies de dépistage et de méthodes de détection précoces pour les autres cancers associés au HPV que le cancer du col de l’utérus ;
- d’encourager et d’assurer la formation de survivantes du cancer du col de l’utérus à la sensibilisation à la vaccination contre le HPV et le dépistage ;
- de faire connaître et de mettre en œuvre la stratégie mondiale de l’OMS en vue d’accélérer l’élimination du cancer du col de l’utérus en tant que problème de santé publique et ses objectifs chiffrés : 90-70-90 ;
- de soutenir et de promouvoir les campagnes de sensibilisation à la vaccination contre le HPV.
- L’AMM invite instamment les médecins à se former et à informer leurs patients aux sujets du HPV, des maladies qui lui sont associées, de la vaccination contre le HPV et de l’intérêt du dépistage régulier du cancer du col de l’utérus.