Archived: Déclaration de l’AMM sur les soins médicaux en fin de vie
Adoptée par la 62e Assemblée Générale de l’AMM, Montevideo, Uruguay, Octobre 2011
et supprimée par la 73e Assemblée générale de l’AMM, Berlin, Allemagne, octobre 2022
INTRODUCTION
Tout le monde a droit à des soins de santé de qualité sur le plan scientifique et humain. Dans ces conditions, recevoir des soins médicaux appropriés en fin de vie ne doit pas être considéré comme un privilège mais comme un véritable droit, indépendamment de l’âge ou d’autres facteurs associés. L‘AMM réaffirme les principes énoncés dans la Déclaration de l’AMM sur la maladie en phase terminale et la Déclaration de l’AMM sur l’euthanasie. Ces déclarations viennent en soutien et en complément de la Déclaration sur les soins médicaux en fin de vie.
Les soins palliatifs en fin de vie font partie des soins médicaux de qualité1. Il existe un gros besoin d’accès à des soins palliatifs améliorés, notamment dans les pays en voie de développement. L’objectif des soins palliatifs est de donner la meilleure qualité de vie possible en palliant la douleur et d’autres symptômes physiques pénibles et en accordant de l’attention aux besoins sociaux, psychologiques et spirituels du patient.
Les soins palliatifs peuvent être apportés à domicile et dans des centres de soins primaires et spécialisés. Le médecin doit adopter une attitude particulièrement compassionnelle et humaine face à la souffrance, agir avec empathie, respect et tact. L’abandon d’un patient lorsqu’il a besoin de ses soins constitue une pratique médicale inacceptable.
RECOMMANDATIONS
1. Prise en charge de la douleur et des symptômes
1.1 Il est essentiel d’identifier dès que possible les patients proches de leur fin de vie afin quele médecin puisse bien évaluer leurs besoins. Il faut toujours établir un programme de soins pour le patient ; lorsque cela est possible, ce programme de soins sera établi en consultant directement le patient.
Pour certains, ce processus peut débuter des mois ou un an avant la date de décès anticipé. Ce processus implique de connaître et traiter les probables douleurs et les autres symptômes pénibles et de répondre aux besoins sociaux, psychologiques et spirituels des patients pour le temps qu’il leur reste à vivre. L’objectif prioritaire est de préserver la dignité des patients et de leur éviter les symptômes pénibles. Les programmes de soins veillent à leur apporter le confort et le contrôle autant que possible et à reconnaître l’importance du soutien apporté à la famille et à la prise en charge respectueuse du corps après le décès.
1.2 D’importants progrès ont été accomplis dans la prise en charge de la douleur et des autres symptômes pénibles. La bonne utilisation de la morphine, les nouveaux analgésiques et les autres mesures peuvent éliminer ou soulager la douleur et les autres symptômes pénibles dans la plupart des cas. Les autorités sanitaires doivent faciliter l’accès et la disponibilité des médications nécessaires aux médecins et à leurs patients. Les groupes de médecins devraient établir des directives pour l’utilisation correcte des médications, dont l’augmentation des doses et les éventuels effets secondaires possibles.
1.3 Dans certains cas très limités, généralement à un stade très avancé d’une maladie physique, certains symptômes peuvent apparaître et être réfractaires aux traitements classiques. Dans de tels cas, il est permis de proposer une sédation palliative menant au coma lorsque l’espérance de vie n’est que de quelques jours. Ce type de sédation doit être considéré comme une mesure exceptionnelle en réponse à une souffrance que le patient et le clinicien considèrent comme intolérable. La sédation palliative ne doit jamais être utilisée avec l’intention de provoquer la mort du patient ou sans l’accord du patient ayant conservé ses facultés mentales. Le niveau et le timing de la sédation palliative doivent être proportionnés à la situation. Le dosage doit être soigneusement calculé pour soulager les symptômes mais doit cependant être le plus faible possible tout en donnant un résultat.
2. Communication et consentement ; éthique et valeurs
2.1 L’information et la communication entre le patient, la famille et l’équipe médicale font partie des éléments majeurs contribuant à la qualité des soins en fin de vie. Il faudrait encourager le patient à exprimer ses préférences en matière de soins. Ses émotions et son angoisse existentielle doivent être prises en considération.
2.2 Des soins en fin de vie conformes à l’éthique en fin de vie devraient systématiquement favoriser l’autonomie du patient et la participation aux décisions. Ils doivent respecter les valeurs du patient et de sa famille.
2.3 Les médecins devraient discuter directement les préférences du patient avec le patient et/ou éventuellement le décisionnaire remplaçant pour ce qui les soins. Ces discussions devraient commencer de bonne heure et systématiquement être proposées à tous les patients. Elles devraient être renouvelées régulièrement afin d’étudier toute modification exprimée par le patient quant à ses souhaits, notamment si l’état clinique du patient a changé. Les médecins devraient inciter leurs patients à documenter officiellement leurs objectifs, valeurs et préférences en termes de traitement et à désigner un décisionnaire remplaçant pour ce qui concerne les soins avec lequel le patient pourra discuter par avance de ses valeurs en matière de soins de santé et de traitement. Les patients qui sont dans le déni sur les implications de leur maladie peuvent ne pas vouloir prendre part à de telles discussions, à certains stades de leur maladie mais devraient savoir qu’ils ont le droit de changer d’cis. Les directives anticipées et documentées n’étant souvent pas disponibles dans des situations d’urgence, les médecins devraient souligner auprès de leurs patients l’importance de discuter de leurs préférences en termes de traitement avec les décisionnaires remplaçants pour ce qui concerne les soins.
2.4 Si un patient est capable de donner son consentement, les soins devraient être basés sur ses souhaits tant que ceux-ci demeurent médicalement, éthiquement et légalement fondés. Le consentement doit reposer sur des informations et un dialogue suffisants et le médecin a le devoir de veiller à ce que le patient soit correctement traité au niveau des douleurs et de son inconfort avant d’obtenir un consentement car la souffrance physique et mentale inutile ne doit pas altérer la décision.
2.5 Le parent le plus proche du patient ou la famille devrait être informé et impliqué dans la prise de décision, à la condition que le patient ne s’y oppose pas. Si le patient est incapable de donner son consentement et en l’absence de directives anticipées, l’avis du décisionnaire remplaçant, désigné par le patient, sur les soins et le traitement doit être pris en compte.
3. Dossiers médicaux et considérations médico-légales
3.1 Les médecins soignant un patient en fin de vie doivent documenter soigneusement les décisions thérapeutiques et les raisons pour lesquelles ils ont choisi telle ou telle procédure, y compris les souhaits et les consentements du patient et de sa famille, dans les notes d’évolution des dossiers médicaux. Un dossier médical correct est d’une extrême importance pour la continuité et la qualité des soins médicaux en général et des soins palliatifs en particulier.
3.2 Le médecin doit aussi tenir compte du fait que ces notes peuvent avoir un intérêt médico-légal, par exemple pour déterminer si le patient est capable de prendre des décisions.
4. Membres de la famille
Il convient de reconnaître l’importance de la famille et de l’environnement émotionnel du patient. Les besoins de la famille et des personnes qui ont été proches tout au long de la maladie doivent être reconnus. L’équipe soignante devrait favoriser la collaboration pour la prise en charge du patient et apporter un soutien pendant toute la fin de vie du patient et si nécessaire après le décès du patient. Les besoins des enfants et des familles peuvent nécessiter une attention et/ou des compétences particulières, et les deux lorsque les patients sont des enfants ou dépendent du patient.
5. Travail d’équipe
Les soins palliatifs sont généralement assurés par des équipes pluri et interdisciplinaires, constituées de membres des professions de santé et autres. Le médecin doit être celui qui dirige l’équipe, en étant responsable, entre autres obligations, du diagnostic et du traitement médical. La continuité des soins est très importante. L’équipe devrait aussi faire tout ce qu’elle peut pour faciliter le souhait du patient de mourir à son domicile lorsque cela est possible.
6. Formation des médecins
Le nombre croissant de personnes nécessitant des soins palliatifs et le plus grand nombre de traitements efficaces signifient que les questions concernant les soins de fin de vie devraient être une composante importante de la formation médicale universitaire et postuniversitaire.
7. Recherche et éducation
Il faut davantage de recherches pour améliorer les soins palliatifs. Cela inclut sans être exhaustif les soins médicaux en général, les traitements spécifiques, les implications psychologiques et l’organisation. L’AMM apportera son aide dans les efforts entrepris pour mieux former les médecins aux compétences requises pour améliorer la prévalence et la qualité de l’organisation de soins programmés en fonction de l’évolution.
Conclusion
Les soins qu’une population prodigue à ses patients mourants dans le cadre des ressources disponibles est une indication de son niveau de civilisation. En tant que médecins dans la plus pure tradition humanitaire, nous devrions toujours nous engager à fournir des soins de fin de vie les meilleurs possibles.
L’AMM recommande que toutes les Associations Médicales Nationales mettent au point une politique nationale sur les soins palliatifs et la sédation palliative, basée sur les recommandations énoncées dans cette déclaration.