Les médecins appelés à participer activement aux évolutions des politiques de soins de santé et des systèmes de santé pour préserver leur autonomie professionnelle : Nouveau leader mondial des médecins
Le nouveau Président de l’Association médicale mondiale (AMM), le Dr Ashok Philip, a lancé un appel à tous les médecins à travers le monde à continuer de participer à l’élaboration des politiques de soins de santé et à l’évolution des systèmes de soins de santé, alors que le secteur médical est en pleine évolution.
Dans son discours d’intronisation, prononcé à l’occasion de l’Assemblée générale de l’Association médicale mondiale à Helsinki, il a insisté sur la nécessité, pour toute la profession médicale, de s’impliquer activement dans l’évolution de la prestation de soins de santé et des systèmes de santé afin d’assurer aux patients les meilleures perspectives et de préserver l’autonomie de la profession.
Le Dr Philip a défendu auprès des médecins présents à Helsinki l’idée que si les tâches de discussions politiques et de planification pouvaient paraître laborieuses et « nous éloigner des soins concrets des patients, à long terme ces tâches protègent nos patients, et c’est l’engagement que nous avons pris ».
Le Dr Ashok Philip est spécialisé en médecine interne et exerce actuellement dans le secteur privé en Malaisie. Il est l’ancien Président de l’Association médicale malaisienne. À l’AMM, il est membre du groupe de travail sur la réforme de la gouvernance et du comité sur la mobilisation, qu’il préside. Le Dr Philip représente la région Pacifique au sein du Conseil de l’Association médicale mondiale.
Dans son discours de prise de la fonction de Président de l’AMM, le Dr Philip a détaillé les risques qui menacent actuellement l’autonomie professionnelle des médecins, des menaces qui ont été exacerbées par l’augmentation des coûts des soins de santé à mesure de l’allongement de l’espérance de vie.
« L’autonomie professionnelle désigne avant tout la liberté de prendre des décisions cliniques relatives aux soins des patients. C’est là ce que la plupart d’entre nous pensons lorsque nous entendons « autonomie » et de mon point de vue, c’est l’aspect le plus menacé, a déclaré le Dr Ashok Philip, qui préside l’Association médicale mondiale jusqu’à l’automne 2025. Si nous acceptons la réduction, voire la suppression, de notre autonomie, ce sont nos patients qui en pâtiront ».
Au sujet des coupes budgétaires dans les soins de santé, le Dr Philip a déclaré : « Des questions d’accessibilité et de rationnement pourraient se poser, et encore une fois, il nous incombe d’apporter des éléments de preuves à la table des négociations pour aider les décideurs politiques à prendre leurs décisions. Nous devons également être vigilants quant à l’intrusion d’objectifs politiques dans les soins de santé ».
« Nous devrions examiner soigneusement si nous devons laisser libre cours, dans le domaine médical, à la recherche de profit telle qu’elle est pratiquée dans le domaine commercial. Personne ne choisit d’être malade. Les patients n’ont pas d’autre choix que de prendre les traitements qui sont disponibles », a-t-il ajouté.
Le Dr Philip a souligné l’importance de directives, indépendantes des considérations purement financières pour décider de la manière dont les patients sont traités et a indiqué que ces directives doivent être élaborées par les médecins. Il a affirmé qu’il faut résister aux mesures de retrait ou d’exclusion des médecins des équipes soignantes, qui visent officiellement à pallier la pénurie de professionnels de la médecine, mais qui en réalité n’ont qu’un objectif de réduction des coûts.
« Les chefs de file naturels dans les soins de santé devraient être ceux qui ont une vision d’ensemble et généralement, ce sont les médecins. Il n’est pas dans l’intérêt des patients ni des systèmes de santé que les médecins soient écartés de leur rôle de direction ».
Alors qu’il entame son année de présidence de l’Association médicale mondiale, fonction dans laquelle il représentera plus de neuf millions de médecins dans le monde, le Dr Philip appelle les professionnels de la médecine à ouvrir la marche vers un avenir meilleur pour les patients, les populations et la profession.
Dans son discours de fin de mandat, la Présidente sortante de l’AMM, la Dre Lujain AlQodmani, a insisté sur les grands défis qui attendent aujourd’hui les médecins : « Les conflits font rage, le climat se dérègle, le système économique est en crise et les violations des droits humains se poursuivent », a déclaré la Dre AlQodmani.
« Cette année, les soins de santé font face à d’immenses dangers, avec plus de 980 attaques signalées par le système de surveillance de l’OMS dans des zones de conflit comme le Liban, l’Ukraine, le Soudan et Gaza. Du Kenya à la Corée, en passant par le Royaume-Uni et l’Inde, des médecins descendent dans la rue pour exiger des lieux de travail plus sûrs. Il ne s’agit pas là d’incidents isolés, ils revendiquent un changement systémique, le respect et le droit de remplir leurs obligations morales », a-t-elle poursuivi.
La Dre AlQodmani a attiré l’attention sur le rôle de l’AMM dans la promotion de collaborations internationales pour d’une part atteindre les objectifs de développement durable, notamment la couverture santé universelle, et d’autre part, assurer que la santé reste un droit et non un privilège.
« En tant que médecins, nous n’avons pas seulement des obligations envers nos patients, mais aussi envers toute la population, pour la santé et le bien-être de toutes et tous. Aussi peu réjouissant que le monde nous paraisse, nous devons garder intacte notre passion pour cet engagement », a proclamé la Dre Lujain AlQodmani à l’heure de devenir Présidente sortante de l’Association médicale mondiale.
Sur un plan plus personnel, la Dre AlQodmani a rappelé qu’elle n’était que la cinquième femme à présider l’Association médicale mondiale depuis 77 ans, c’est pourquoi elle était profondément consciente de l’honneur et de la responsabilité qui étaient les siens de représenter tous ceux qui n’ont pas encore de siège à la table des discussions. Maintenir l’équilibre entre ses obligations de mère et de présidente n’a pas toujours été simple, a-t-elle ajouté. Ces défis n’avaient que renforcé son engagement à créer un environnement plus inclusif et équitable.
La Dre AlQodmani est actuellement Chief Action Officer à EAT. Elle est membre du Conseil de l’Association médicale mondiale, membre du groupe de travail de l’AMM sur la gouvernance et coprésidente du groupe de travail sur l’environnement de l’AMM. La Dre AlQodmani était auparavant directrice des relations internationales de l’Association médicale koweïtienne.