Déclaration d’Édimbourg_v2011
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D-2000-01-2011 ⏐L’Association Médicale Mondiale
Manuel des Politiques de l’AMM
DÉCLARATION D’EDIMBOURG DE L’AMM
SUR
LES CONDITIONS CARCÉRALES ET LA PROPAGATION DE LA
TUBERCULOSE ET AUTRES MALADIES TRANSMISSIBLES
Adopté par la 52e
Assemblée générale de l’AMM, Edimbourg, Ecosse, Octobre 2000
et revisée par la 62e
Assemblée générale de l’AMM, Montevideo, Uruguay, Octobre 2011
PRÉAMBULE
Les prisonniers bénéficient des mêmes droits que les autres personnes. Cela inclut le droit
à un traitement humain et à des soins médicaux appropriés. Les normes qui régissent le
traitement des détenus sont inscrites dans plusieurs Déclarations et directives adoptées par
divers organismes des Nations Unies.
La relation entre le médecin et le prisonnier est régie par les mêmes principes éthiques que
la relation entre le médecin et un autre patient. La relation patient/médecin est soumise à
des tensions particulières que l’on ne retrouve pas dans les autres situations, notamment
sur le plan de la relation du médecin avec son employeur, les services carcéraux, et l’at-
titude générale de la société vis-à-vis des prisonniers.
Il y a aussi de graves raisons de santé publique pour renforcer l’importance de ces direc-
tives. La forte incidence de la tuberculose parmi les détenus dans un certain nombre de
pays rend encore plus nécessaire l’étude des questions de santé publique lorsque l’on
établit de nouvelles directives pour les prisons et que l’on réforme les systèmes carcéraux
et pénaux.
Les personnes passibles d’incarcération sont souvent issues de la partie la plus mar-
ginalisée de la société, ont peut-être eu un accès limité aux soins de santé avant incar-
cération. Leur état de santé est peut-être moins bon que beaucoup d’autres citoyens et il se
peut qu’elles entrent en prison avec des problèmes de santé qui n’ont pas été diagnostiqués,
détectés et pris en charge.
Les prisons peuvent être des foyers d’infection. Le surpeuplement, le confinement à
longueur de temps dans des espaces clos, mal éclairés, mal chauffés et donc mal ventilés
et souvent humides constituent la description souvent associée à l’emprisonnement. Tout
cela contribue à une propagation des maladies et à une détérioration de la santé. Là où ces
facteurs sont associés à un manque d’hygiène, à une mauvaise alimentation et à un accès
limité à des soins de santé corrects, les prisons peuvent être un enjeu majeur de santé
publique.
Les conditions d’incarcération qui exposent les prisonniers à des risques médicaux im-
portants constituent un problème humanitaire. Tout prisonnier atteint d’une infection crée
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un risque pour les autres prisonniers, pour le personnel pénitentiaire, pour les familles, les
autres visiteurs de prison et la communauté au sens large, pas uniquement lorsque le
prisonnier est libéré. Les barreaux des prisons ne sont effectivement pas étanches et le
bacille de la TB se propagera donc à l’extérieur. Le moyen le plus concret et efficace pour
réduire les risques de transmission des maladies est d’améliorer l’environnement carcéral
en installant un service médical efficace sachant comment détecter et traiter la maladie et
le plus important en ciblant le problème de la surpopulation carcérale pour décider d’ac-
tions les plus urgentes.
L’augmentation des cas de tuberculose active au sein des populations carcérales et l’ap-
parition chez certaines d’entre elles de formes de TB résistantes et notamment « multi-
résistantes » et « ultra résistantes », comme l’a constaté l’Association Médicale Mondiale
dans sa Prise de position sur le traitement de la tuberculose, atteint un taux d’incidence et
de prévalence très élevé dans les prisons dans certaines parties du monde.
D’autres affections comme l’hépatite C ou le VIH, sans présenter la même contagiosité que
la tuberculose, s’accompagnent d’un risque de transmission par le sang ou par les fluides
physiologiques partagés et échangés. La surpopulation favorise la propagation des mala-
dies sexuellement transmissibles. La consommation de drogues par voie intraveineuse
contribuera également à la propagation du VIH et de l’hépatite B ou C encore plus con-
tagieuse. Ces affections appellent des solutions spécifiques que cette prise de position
n’aborde pas. Cependant, les principes énoncés ci-dessous permettront de réduire les ris-
ques que ces agents infectieux entraînent.
Actions Requises
L’Association Médicale Mondiale estime qu’il est essentiel, pour des raisons humanitaires
et de santé publique, de veiller:
1 à protéger les droits des détenus, conformément aux textes statutaires des NU sur
les conditions carcérales. Comme le souligne la Déclaration de Lisbonne de l’AMM,
les détenus devraient avoir les mêmes droits que les autres patients;
2 à ne pas accepter que les droits des prisonniers soient ignorés ou non respectés au
motif qu’ils souffrent d’une maladie infectieuse;
3 à assurer que les conditions de détention des détenus et prisonniers, mis en garde à
vue pendant une enquête, dans l’attente du jugement ou effectuant leur peine, ne
contribuent pas au développement, à l’aggravation ou à la transmission de mala-
dies;
4 à assurer que les personnes en attente de procédures d’immigration soient placées
dans des conditions qui ne favorisent pas la propagation des maladies, bien que les
prisons ne devraient pas être utilisées pour loger de telles personnes;
5 à veiller à une coordination des services de santé à l’intérieur et à l’extérieur des
prisons pour faciliter la continuité des soins et le suivi épidémiologique des pa-
tients libérés après leur incarcération;
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6 à veiller à ce que les prisonniers ne soient pas isolés ou placés en confinement soli-
taire du fait de leur état infectieux sans bénéficier d’un accès aux soins et à toutes
solutions appropriées à leur état infectieux;
7 à veiller lors de l’admission ou du transfert dans un nouvel établissement péni-
tencier, à ce que l’état de santé des détenus concernés fasse l’objet d’un bilan de
dans les 24 heures qui suivent leur arrivée, afin d’assurer la continuité des soins;
8 à assurer le suivi du traitement des prisonniers encore malades au moment de leur
libération, en particulier ceux qui sont atteints de la TB ou d’une maladie infec-
tieuse. Parce qu’une erreur de traitement ou une interruption de traitement peut être
particulièrement dangereuse sur le plan individuel et épidémiologique, la planifi-
cation et la continuité des soins sont des éléments essentiels de la prise en charge
médicale en milieu pénitentiaire;
9 connaître que les mécanismes de santé publique qui, exceptionnellement et en de
très rares cas, peuvent entraîner la détention obligatoire de personnes qui présen-
tent de sérieux risques d’infection pour la communauté en général doivent être effi-
caces, nécessaires et justifiés et proportionnels aux risques encourus. De telles
mesures doivent rester exceptionnelles et n’intervenir qu’après une évaluation at-
tentive et critique de la nécessité de ces contraintes et de l’absence d’alternatives
efficaces. En pareils cas, la détention doit être aussi brève que possible et les res-
trictions autant que faire se peut limitées. Il faudra également veiller à ce qu’il
existe un système d’évaluation indépendant et de réexamen de ces mesures, en
prévoyant une possibilité d’appel par les patients. Ces mesures alternatives doivent
être utilisées chaque fois que les circonstances le permettent;
10 à ce que ce modèle soit utilisé, en tenant compte de toutes les mesures de préven-
tion des infections croisées et de traitement des personnes déjà infectées au sein de
l’établissement carcéral;
11 Les médecins exerçant en milieu carcéral ont le devoir de signaler aux autorités
sanitaires et aux organisations professionnelles de leur pays les insuffisances con-
statées dans la prestation de soins aux détenus et les situations qui comportent des
risques épidémiologiques élevés. Les AMN sont dans l’obligation de tenter de pro-
téger ces médecins contre d’éventuelles mesures de rétorsion;
12 Les médecins travaillant en milieu carcéral ont le devoir de suivre les directives
nationales en matière de santé publique lorsque celles-ci sont conformes à l’éthi-
que, notamment le signalement obligatoire des maladies infectieuses et transmis-
sibles;
13 L’AMM invite les associations membres à travailler avec les autorités péniten-
tiaires et les pouvoirs publics locaux et nationaux à la promotion de la santé et des
soins dans leurs institutions et à l’adoption de programmes garantissant un environ-
nement carcéral sain et sûr;
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ANNEXE
Textes internationaux relatifs aux soins médicaux dans les prisons
Déclaration Universelle des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des
Nations Unies, le 16 décembre 1948 (Voir Articles 4, 9, 10 et 11)
Ensemble de règles minimales pour le traitement des prisonniers, approuvé par le Conseil
économique et social des Nations Unies, le 31 juillet 1957 (Voir articles 22 et 26)
Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, adopté par l’As-
semblée générale des Nations Unies, le 16 décembre 1966 (Voir Article 12). Entrée en
vigueur : le 3 janvier 1976
Pacte international relatif aux droits civils et politiques et Protocole facultatif, adopté par
l’Assemblée générale des Nations Unies, le 16 décembre 1966 (Voir Articles 6, 7 et 10).
Entrée en vigueur : le 23 mars 1976
Principes d’éthique médicale pour la protection des prisonniers contre la torture, adoptés
par l’Assemblée générale des Nations Unies, le 18 décembre 1982 (Voir Principe 1)
Ensemble de principes pour la protection des personnes soumises à une forme quelconque
de détention ou d’emprisonnement, adopté par l’Assemblée générale des Nations Unies, le
9 décembre 1988 (Voir Principe 24)
Principes de base pour le traitement des prisonniers, adoptés par l’Assemblée générale des
Nations Unies, le 14 décembre 1990 (Voir Article 9)
Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté, adoptées par
l’Assemblée générale des Nations Unies, le 14 décembre 1990 (Voir principes 50 à 54)
Principes directeurs de l’OMS sur l’infection du SIDA et du VIH dans les prisons, publiée
en mars 1993, à Genève (Document WHO/GPA/DIR/93.3)
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